29 mars 2024

Le dialogue Euro-Arabe et la naissance d’Eurabia (1)

La compréhension et la négligence qu’ils lui manifestèrent équivalaient à un encouragement. L’élimination des chefs du terrorisme fut qualifiée « d’assassinat » et les terroristes du Hamas de « combattants », d’«activistes », le Hamas, lui même, de «Résistance », Israël fut accusé de « terrorisme d’Etat ». En France surtout, les actes criminels commis par des activistes issus de l’émigration arabo-musulmane, contre des individus et des biens communautaires juifs ont pu s’autoriser de cette condamnation. Aujourd’hui encore le gouvernement français refuse de placer le Hezbollah sur la liste des organisations terroristes.

Cette convergence de politiques propres à l’Union Européenne (UE) et à la partie palestinienne qu’elle finance, ainsi qu’à celles des pays arabes, apparaît comme l’aboutissement d’un processus de longue date. A quelques nuances près, le discours contre Israël, entendu simultanément des deux côtés de la Méditerranée, présente des caractères identiques. Cette judéophobie du XXI siècle s’enracine dans une structure européenne transnationale, issue d’un contexte historique et de la politique euro-arabe des 30 dernières années. Les populations européennes lui restent grosso modo extérieures, même si elles furent, des décennies durant, soumises à une idéologie médiatisée démonisant Israël.

Il s’ensuit que les Européens risquent fort d’être le jouet et les victimes de haines religieuses, d’intérêts politiques et économiques masqués par le conflit israélo-arabe et un discours pseudo-humanitaire. Car la structure idéologique de cette nouvelle judéophobie est importée du monde arabo-musulman, même si elle s’exprime dans les cadres d’un discours européen que répercutent trois secteurs : les partis politiques, les médias et le secteur religieux.
L’antisionisme/antisémitisme qui caractérise une grande partie de l’islam aujourd’hui, s’accompagne d’une haine de l’Occident et, comme on le verra plus bas avec l’évolution du dialogue euro-arabe, d’une ambition irrépressible d’islamisation de l’Europe, de son histoire et de sa culture, qu’expriment par exemple jusqu’au cœur de Londres certains leaders islamistes. Cette politique glorifie la palestinité, elle instille dans l’opinion occidentale une version imaginaire de la religion, de l’histoire et de la civilisation islamiques. Elle oblige l’Europe à réviser sa propre interprétation de son identité et de son histoire pour la rendre con-forme à la vision islamique de l’Europe.

L’embargo sur le pétrole : le déclencheur


Après la guerre israélo-arabe de 1967, la France se fit l’instigatrice d’une politique européenne anti-israélienne. Elle ne pardonna pas à Israël sa victoire éclair sur une coalition qui alliait l’Egypte, la Syrie, la Jordanie, les Palestiniens, et qui était soutenue par l’ensemble du monde arabe. Dans les instances internationales, la France vota les résolutions arabes anti-israéliennes et décréta un boycott unilatéral sur les ventes d’armes à l’État hébreu (1969). Au plan européen, la diplomatie française soutint les intérêts arabes en s’efforçant d’infléchir la politique de l’Eu-rope dans une direction pro-arabe et anti-israélienne. Dans cette perspective elle examina avec la Libye la conception d’un Dialogue Euro-Arabe (DEA) (note 1).

La guerre syro-égyptienne contre Israël en 1973 et l’embargo arabe sur le pétrole, utilisé comme une arme de pression mondiale, précipita ce projet. Morti-fiés par la défaite arabe, les pays arabes producteurs de pétrole quadruplèrent le prix du pétrole, ordonnèrent une réduction sur la production et imposèrent un embargo sur les livraisons destinées aux Etats-Unis et aux Pays-Bas ; les pays consommateurs furent classés en pays amis, neutres ou ennemis. Aussitôt, les neuf pays de la Communauté Européenne (CE), réunis à Bruxelles le 6 novembre 1973, proclamèrent une Résolution conjointe qui s’alignait totalement sur la politique franco-arabe à l’égard d’Israël et décidèrent un embargo unilatéral sur les ventes d’armes à l’État hébreu (note 2). Comme en 1967, Israël était puni de sa vic-toire sur des ennemis déterminés à l’exterminer.

Dans cette résolution, la CE introduisait trois nouveaux points:

1. l’inadmissibilité de l’acquisition de territoires par la force ; 2. Israël devait se retirer sur les lignes d’armistice de 1948 ; 3. l’inclusion des «droits légitimes des Palestiniens » dans la définition de la paix.

La première proposition était absurde car la Palestine ottomane avait été conquise par la force en 1917 par les Anglais, qui en détachèrent 78% pour créer la Transjordanie (1921-23). Par la guerre de 1948 contre Israël, l’Egypte avait pris Gaza par la force et la Transjordanie avait occupé la Judée et la Samarie. Par ailleurs tous les pays qui aujourd’hui sont arabes furent conquis à l’origine par des armées arabes. Toutes ces conquêtes territoriales imposées par la force et la guerre, étaient-elles aussi inadmissibles? Quels critères détermineraient l’irréversibilité d’une conquête et d’une injustice, l’occupation de territoires ou leur libération ? L’Espagne, les Balkans, étaient-ils occupés ou libérés?

Dans le deuxième point l’Europe adoptait avec complaisance le refus des Arabes de leur propre défaite en 1967, une guerre qu’ils avaient eux-même déclenchée après celle de 1948, pour détruire Israël. La CE entérinait ainsi l’interprétation arabo-islamique de la Résolution 242, car celle-ci, effectivement, ne mentionne qu’un retrait partiel « de » territoires (from territories), une formulation intentionnelle de la part de ses concepteurs.

Le 3è point de la résolution introduisait dans le con-flit du Moyen-Orient, une innovation qui s’avèrerait, dans l’avenir, dramatique pour l’Europe. Jusqu’en 1970, en effet, le peuple palestinien n’existait pas. On ne parlait que des Arabes en Palestine qui ne se distinguaient en rien des autres Arabes des vingt pays de la Ligue Arabe, et surtout des Arabes de Transjor-danie, c’est-à-dire des 78% de la Palestine historique, détachés par l’Angleterre en 1921 pour en faire un pays exclusivement arabe. La résolution 242 de l’ONU recommandait une solution aux problèmes des réfugiés arabes de Palestine et des réfugiés juifs expulsés des pays arabes et dépouillés de tous leurs biens. La création ex nihilo d’un peuple palestinien, après l’embargo arabe sur le pétrole en 1973, conduirait l’Europe à lui fabriquer une légitimité, une histoire, un droit symétrique et même supérieur à celui d’Israël, par une réactualisation de la théologie du remplacement constamment nourrie d’une propagande démonisant Israël pour justifier sa déchéance. Cette voie l’engagera dans une solidarité active avec la politique exterminationiste arabe, la promotion, le financement et la légitimation du terrorisme international personnifié par l’OLP.

La formation du bloc économico-politique euro-arabe


La démarche anti-israélienne de la CE répondait aux exigences des Arabes pour ouvrir un dialogue avec l’Europe, ils l’en récompensèrent par une augmenta-tion immédiate du pétrole. Né de l’embargo pétrolier, le Dialogue Euro-Arabe s’établit dès le début comme un marché : les pays de la CE s’engageaient à soutenir la politique arabe contre Israël, et en échange, ils bénéficieraient d’accords économiques avec les pays de la Ligue Arabe (note 3). Le côté arabe exigeait un engagement politique de l’Europe contre Israël puisque le volet économique du dialogue était subordonné au contexte politique de la guerre arabe contre Israël. Le domaine économique s’inscrivait ainsi dans une solidarité politique euro-arabe contre Israël.

La volonté du Dialogue fut confirmée par le prési-dent Georges Pompidou et le chancelier Willy Brandt durant leur rencontre les 26-27 novembre 1973. Moins d’un mois plus tard, le président français convoqua un sommet le 15 décembre 1973 à Copenhague pour examiner la crise du Moyen-Orient et jeter les bases d’une coopération entre les pays de la Ligue Arabe et ceux de la CE. Quatre ministres arabes des Affaires étrangères, invités à suivre les travaux, proposèrent divers projets. Le 10 juin 1974, les ministres des Affaires étrangères des Neuf réunis à Bonn dans le cadre de la coopération politique, adoptèrent un texte où ils précisaient les domaines et les moyens de développer leur coopération et leurs relations avec les pays arabes. Ces domaines concernaient l’agriculture, l’industrie, les sciences, la culture, la formation, la technologie, la coopération financière, l’infrastructure civile, etc.

Au cours des réunions suivantes, les ministres des Affaires étrangères des Neuf, jetèrent les bases de cette coopération avec les pays arabes, selon une structure institutionnalisée, reliée aux plus hautes autorités de chaque pays de la CE. Cette formule permettait d’harmoniser et d’unifier la politique des Communautés Européennes dans leurs échanges et leur coopération avec les pays de la Ligue Arabe. Le 31 juillet 1974 à Paris, une première rencontre officielle au niveau ministériel, réunissait le ministre des Affaires étrangères du Koweït, le Secrétaire Général de la Ligue Arabe, le Président de la Commission des Com-munautés Européennes et le Président en exercice de la Communauté pour discuter de l’organisation du Dialogue.
La Conférence de Damas (14-17 septembre 1974) organisée par l’Association interparlementaire de la Coopération Euro-Arabe, rassembla les membres représentant tous les partis des Parlements de la CE, excepté le Danemark. Les Arabes posèrent les pré-conditions politiques aux accords de coopération économique avec les pays de l’Europe occidentale. Le domaine économique qui intéressait la CE était conditionné par les exigences politiques des Arabes concer-nant le Moyen-Orient conformément au principe du troc, principe fondamental du Dialogue.

Les Arabes réclamaient :

1. le recul inconditionnel d’Israël sur les lignes d’armistice de 1948;
2. l’islamisation de Jérusalem dont ils s’étaient emparés par la force en 1948 et en avaient expulsé tous les Juifs;
3. la reconnaissance du peuple palestinien et de son seul représentant, l’OLP (note 4) ;
4. des pressions exercées par la CE sur les Etats-Unis pour les rapprocher de la politique arabe et les détacher d’Israël.

Un secrétariat permanent de 350 membres chargé de la Coopération Euro-Arabe, fut créé avec son siège à Paris. Le Dialogue Euro-Arabe fut structuré en divers comités chargés de la planification de projets conjoints industriels, commerciaux, politiques, scientifiques, techniques, culturels et sociaux.
L’importance du volet politique du Dialogue fut sou-ligné au 7e Sommet de la Conférence Arabe (Rabat, octobre 1974) où il fut rappelé que le Dialogue Euro-Arabe devait se développer dans le contexte de la Déclaration du 6e Sommet de la Conférence Arabe à Alger, adressée à l’Europe le 28 novembre 1973. Il est intéressant de noter que la Déclaration de cette Conférence, et les suivantes également, parle uniquement de la Nation Arabe, déterminée à récupérer ses territoires. Le territoire israélien est considéré comme appar-tenant à une nation arabe indifférenciée dont tous les membres soutiennent leurs frères en Palestine (note 5). Pour les Arabes, le Dialogue devait continuer jusqu’à la réalisation de ses objectifs. Les dimensions politiques et économiques de la coopération étaient interdépendantes.

Le 10 juin 1975, une délégation de la CEE (Communauté Economique Européenne) rencon-trait au Caire une délégation de vingt pays arabes et de l’OLP. Plus d’une trentaine de pays étaient représentés par un Comité général au niveau des ambassadeurs et par de nombreux spécialistes. La CE et le Secrétariat de la Ligue Arabe étaient représentés au niveau politique. Le porte-parole jordanien de la délégation arabe, M. Dajani insista sur l’aspect et les implications politiques du Dialogue Euro-Arabe. Le marché entre les deux parties était clairement défini : accords économiques avec l’Europe en échange de l’alignement européen sur la politique arabe concernant Israël. Un Mémorandum Conjoint du Comité Mixte d’Experts donna une première formulation des principes généraux et des objectifs du dialogue euro-arabe.

Dans les années suivantes, cette collaboration fut renforcée par des réunions chaque six mois et diver-ses activités au niveau mondial (Rome, 24/7/1975 ; Abu Dhabi, 27/11/75 ; Luxembourg 18-20/5/1976 ; Bruxelles, plusieurs réunions en 1976 ; Tunis, 10-12/2/1977). Les membres du Secrétariat permanent pour la Coopération Euro-Arabe, effectuèrent de nombreux voyages aux États-Unis pour orienter la politique américaine vers les thèses de l’OLP. Les Arabes réclamaient de l’Europe la reconnaissance de Yasser Arafat et d’un État palestinien, le boycott d’Israël au niveau international et une stratégie de pressions politiques et économiques mondiales pour forcer l’État hébreu à reculer dans les lignes de 1948. Des groupes de travail étudièrent les méthodes propres à conditionner l’opinion publique européenne et internationale pour l’amener à soutenir l’OLP. Selon al-Mani, l’OLP « utilisa avec succès le patronage du DEA pour amélio-rer son statut diplomatique en Europe ». Faisant un bilan du DEA l’auteur estime que la centrale palestinienne fut l’un de ses soutiens les plus actifs, exploitant ses structures comme un canal pour diffuser ses demandes; ainsi « le Dialogue réussit à persuader les Européens de la nécessité d’une patrie palestinienne et de la participation de l’OLP comme seul représentant des Palestiniens aux négociations futures sur le Proche- Orient (note 6).

Cette observation de al-Mani confirme le lien direct entre l’OLP et les transactions économiques de la CE. Dans son discours du 26 août 1980, Béchir Gémayel, après avoir décrit la guerre terroriste de l’OLP au Liban, avait dénoncé son rôle funeste en Europe :

« Voilà un petit bilan des agissements de ce peuple pour lequel s’agitent à longueur d’années les chancelleries du monde civilisé, et dont les vieilles nations d’Europe se bousculent pour arracher les faveurs. » (note 7).
Il est clair que l’OLP joua un rôle déterminant dans le troc des profits économiques accordés par les pays arabes à l’Europe, en contre-partie d’un soutien politique à leur guerre contre Israël. Les réunions du DEA se concluaient par des déclara-tions de la délégation européenne alignées sur celles de la politique arabe (Londres, 9/6/1977; Bruxelles, 26-28/10/1978) : retrait d’Israël sur les lignes de 1948, obligation pour Israël de reconnaître les droits nationaux palestiniens, la paix liée au retrait d’Israël sur les lignes de 1948 et à sa reconnaissance des droits nationaux palestiniens, invalidation de toutes mesures et décisions prises par Israël dans les territoires extérieurs aux lignes de 1948, y compris à Jérusalem. Judée et Samarie sont désignées comme « territoires arabes occupés».

Les négociations de paix israélo-égyptiennes de Camp David (1977-78) sous la houlette du président américain Carter, jetèrent un froid sur le DEA . La Ligue Arabe les rejeta totalement, et expulsa l’Egypte de ses rangs. Les pays arabes étaient furieux du succès de l’influence américaine dans la région au détriment de la diplomatie européenne qu’ils contrôlaient par la coopération économique. La France s’abstint de reconnaître les Accords de Paix tandis que les autres pays de la CE les acceptèrent mais, à l’instigation de la France, avec une réserve.

Le DEA reprit cependant ses activités et la 4e réunion de la Commission Générale réunie à Damas (9-11 déc.1978), approuva la création d’un centre euro-arabe au Koweït, pour le transfert de techno-logie. Selon al-Mani, dans « la Déclaration conjointe de 14 points à Damas, le DEA posait les principes d’une politique de l’immigration qui garantissait aux immigrants arabes en Europe, l’égalité économique avec les nationaux, une représentation légale et l’éducation professionnelle pour les migrants et leurs enfants. » (note 8).

Il est vrai que les textes du DEA établissaient une réciprocité, mais cette récipro-cité était toute théorique, puisque jamais aucun pays arabe ne naturaliserait des millions d’immigrants européens et leur octroierait des droits identiques à ceux des musulmans, alors qu’ils refusaient cette égalité à leurs minorités non-musulmanes, même indigè-nes. Cette Déclaration de la Commission Générale, c’est-à-dire au niveau des ambassadeurs, engageait la responsabilité des dix États de la CE.

Au cours de la réunion au Luxembourg (18-20 mai 1976), l’organisation et la procédure du Dialogue Euro-Arabe avaient été définies et publiées dans l’Annexe 4 du Communiqué final. Le Dialogue se composaient de trois organes :1) la Commission Générale; 2) les Groupes de travail; 3) le Comité de Coordination.

La Commission générale réunissait les délégués des deux parties, comprenant des fonctionnaires ayant rang d’ambassadeurs, des membres de la Ligue des États Arabes et des Communautés européennes, du Secrétariat général de la Ligue des Etats Arabes et de la Commission des Communautés européennes ainsi que des co-présidents et rapporteurs des groupes de travail. La Présidence de la Commission générale était assurée conjointement par les chefs des déléga-tions arabe et européenne. La Commission prenait en charge la conduite générale du Dialogue et le suivi de ses développements dans les divers domaines. Elle était responsable de son instauration et de son orien-tation vers les objectifs politiques, culturels, sociaux, technologiques et économiques qui lui étaient assignés ainsi que de l’approbation du programme du Dialogue et de ses travaux. Les divers mandats de la Commission étaient précisés. Les séances de réu-nion se tenaient à huis-clos et sans procès-verbaux. A l’issue de chaque réunion, la Commission générale pouvait publier un résumé des décisions prises et un communiqué commun (note 9).

La composition des groupes de travail obéissait au même principe, chaque groupe comprenait des experts et des techniciens spécialisés des deux parties, ainsi que des représentants du Secrétariat général de la Ligue des États Arabes et de la Commission des Communautés Européennes. Chacune des deux parties arabe et européenne nommait un président pour chaque groupe de travail. Les groupes de travail procédaient selon les instructions que leur communiquait la Commission générale concernant leurs mandats.

Chaque groupe de travail pouvait créer des sous-groupes spécialisés dont les experts étaient choisis en coordination avec le Secrétariat général de la Ligue des États Arabes et la Commission des Communautés Européennes.

Le Comité de coordination était composé de repré-sentants de la présidence et du Secrétariat général de la Ligue des États Arabes et de la présidence européenne, les deux parties présidant conjointement. Le Comité était responsable de la coordination des travaux des divers groupes de travail sous la direction de la Commission générale. Toute information et docu-mentation était transmise par le Secrétariat Général de la Ligue des États Arabes et de la Commission des Communautés européennes.

Cette structure, résumée ici brièvement, établit une symbiose, une interpénétration des politiques arabe et européenne, engageant la responsabilité des États européens au plus haut niveau. Il est clair que la politique européenne hostile à Israël, unifor-misée par les structures de la CE, n’est pas le fruit de jugements erronés, de préjugés susceptibles d’être corrigés. Elle repose sur une construction politico-économique minutieuse dans ses moindres détails et enracinée dans sa symbiose multiforme avec le monde arabe.

Naissance d’Eurabia, nouvelle entité politique


Eurabia est le titre d’une publication éditée par le Comité Européen de Coordination des Associations d’Amitié avec le Monde arabe (Paris) et réalisée avec la collaboration du Middle East International (Londres), France-Pays Arabes (Paris) et le Groupe d’Etudes sur le Moyen-Orient (Genève).

Dans son n°2 (juillet 1975), Eurabia publiait les résolutions votées à l’unanimité les 7 et 8 Juin 1975, à Strasbourg, par l’Assemblée Générale de l’Association Parlementaire pour la coopération Euro-Arabe. Cette Association regroupait plus de 200 membres de Parlements des pays d’Europe occidentale, qui repré-sentaient toutes les tendances des partis politiques. C’est dire que le consensus du programme d’entente euro-arabe traversait dans sa totalité l’échiquier politique européen.

L’éditorial d’Eurabia spécifiait « la nécessité d’une entente politique entre l’Europe et le monde arabe comme base aux accords économiques » et l’obligation du côté européen de « comprendre les intérêts politiques autant qu’économiques du monde arabe. » Le dialogue euro-arabe devait exprimer « une volonté politique conjointe ». Cette condition préalable à tous les accords écono-miques avec les pays de la Ligue Arabe, nécessitait la création en Europe « d’un mouvement d’opinion» favorable aux Arabes. Cette question avait été exa-minée par de nombreux experts de l’Association de Solidarité Franco-Arabe et de l’Assemblée Générale de l’Association Parlementaire pour la coopération Euro-Arabe à Strasbourg :

« S‘ils veulent réellement coopérer avec le monde arabe, les gouvernements européens et les dirigeants politiques ont l'obligation de s’élever contre le dénigrement des Arabes dans leurs organes d'information. Ils doivent réaffirmer leur confiance en l'amitié euro-arabe et leur respect envers la contribution millénaire des Arabes à la civilisation universelle. Cette contribution et son application pratique seront l’un des thèmes de notre prochain numéro ». (Editorial).

Les exigences politiques arabes concernant les conditions du Dialogue, ne se limitaient pas à Israël exclusivement. Elles concernaient l’Europe aussi. M.Tilj Declerq, membre belge de l’Association Parle-mentaire pour la Coopération Euro-Arabe, soumit à la commission économique de cette Association une étude sur les conditions de cette coopération, récapitulée dans Eurabia, sous le titre : «Un point de vue européen ».

Il y est répété que la « coopération économique euro-arabe doit résulter d’une volonté politique. Elle doit donc reconnaître les intérêts politiques de cette coopération. » Autrement dit les échanges économiques étaient subordonnés au soutien de la CE à la guerre des Arabes pour détruire Israël. S’agissant de l’Europe elle-même, l’auteur belge préconisait une coopération économique par l’association des réserves de main d’œuvre et de matiè-res premières arabes — sans doute le pétrole — avec la technologie européenne.
« Une politique à moyen et à long terme doit être élaborée dès maintenant afin de réaliser une coopération économique par la conjugaison des réserves de main d’œuvre et de matières premières arabes, de la technologie et du «management » européens ».
C’est apparemment cette clause qui fut à l’origine dès les années 1970 de l’immigration massive arabe en Europe qui semble avoir été liée aux accords éco-nomiques de la CEE avec le monde arabe.

Selon M. Declerq, le recyclage des pétrodollars devait réaliser l’interdépendance de l’Europe occi-dentale et des pays arabes pour « arriver graduellement à une intégration économique aussi complète que possible ». Mais cette intégration économique euro-arabe demeurerait théorique si le volet politique n’était pas réalisé, c’est-à-dire le combat contre Israël. Aussi : « Une volonté politique réelle doit être à la base de projets concrets de coopération et doit se manifester à trois niveaux : au niveau national, au niveau du continent, au niveau mondial. » Dans cette même optique « la coopération et la solidarité euro-arabe devait se réaliser à travers les organisations internationales et les conférences internationales ».
Des réunions préparatoires communes et des colloques euro-arabes devaient «être multipliés à tous les niveaux, économique, monétaire, commercial etc. afin d’arri-ver à des positions communes ».

Les propositions de M. Declerq furent toutes inté-grées dans les Résolutions de l’Association Parle-mentaire pour la Coopération Euro-Arabe, réunie à Strasbourg (7-8 juin 1975) et publiées dans Eurabia. La section politique des Résolutions visait trois domaines : la politique européenne à l’égard d’Israël, la création d’un mouvement d’opinion favorable aux Arabes, l’accueil des immigrés musulmans en Europe.

Concernant Israël, l’Association s’aligna sur les exigences arabes et réclama le retrait d’Israël sur les lignes d’armistice de 1948, contredisant la résolution 242. L’Association réclamait, en outre, des gouvernements européens la reconnaissance de l’OLP comme le seul représentant des Arabes palestiniens, point fondamental qu’ils devaient imposer, dans les initiatives qu’il leur incombait de prendre dans la politique conjointe euro-arabe. La CE devait forcer Israël à accepter les droits de la nation palestinienne et l’existence d’un Etat palestinien sur toute la rive ouest du Jourdain et à Gaza.

A
u niveau de l’Europe, l’Association réclamait une information favorable aux causes arabes et des conditions spéciales pour les immigrés:

« L'Association réclame des gouvernements européens un aménagement des dispositions légales concernant la libre cir-culation et le respect des droits fondamentaux des travailleurs immigrés en Europe : ces droits doivent être équivalents à ceux des citoyens nationaux.
L’Association considère le règlement politique du conflit israélo-arabe comme une nécessité absolue pour l'établisse-ment d’une réelle coopération euro-arabe ».
Dans le même paragraphe, l’Association estimait que « le développement harmonieux de la coopération entre l’Europe occidentale et la nation arabe » gagnerait à la libre circulation des idées et des citoyens.

La Résolution économique exprimait son inquiétude concernant des choix politiques qui avaient :
« porté préjudice à la coopération euro-arabe, tels que la création de l'Agence Internationale de l’Energie et la signature d’un accord entre la C.E.E. et Israël, avant l’achèvement des négociations entre la C.E.E. et les pays arabes. A ce sujet, elle demande formellement que la coopération économique entre la C.E.E. et Israël ne s’applique pas aux territoires occupés. »

Eurabia, nouvelle entité culturelle


La Résolution culturelle contenait plusieurs affirma-tions dont on citera quelques unes :

« Reconnaissant la contribution historique de la culture arabe au développement européen;
Soulignant l'apport que les pays européens peuvent encore attendre de la culture arabe, notamment dans le domaine des valeurs humaines » ; l’Association réclamait le développement de l’en-seignement de la langue et de la culture arabe en Europe :
« Souhaitant que les gouvernements européens facilitent aux pays arabes la création de larges moyens pour la participation des travailleurs immigrants et de leurs familles à la vie culturelle et religieuse arabe ».
L’Association faisait appel à la presse, aux groupes d’amitié et au tourisme pour améliorer l’opinion publique concernant le monde arabe. Elle « demande aux gouvernements des Neuf d’aborder le secteur culturel du dialogue euro-arabe dans un esprit constructif et d’accorder une plus grande priorité à la diffusion de la culture arabe en Europe
Demande aux gouvernements arabes de reconnaître les con-séquences politiques d’une coopération active avec l’Europe dans le domaine culturel ».

La Résolution se terminait par une condamnation et une accusation d’Israël. Elle « condamne, tout en reconnaissant le droit à l’existence de l’État d’Israël, la volonté sioniste de substituer sur le territoire palestinien la culture juive à la culture arabe, afin de priver le peuple palestinien de son identité nationale; Considérant qu’en effectuant des fouilles dans les lieux saints de l'Islam — partie occupée de Jérusalem — Israël a commis une violation du droit international, malgré la mise en garde de l’Unesco; Considérant que des fouilles ne pouvaient qu’entraîner l'inévitable destruction de témoins de la culture et de l’histoire arabe; Regrette que la décision de l’Unesco de ne pas admettre Israël dans son groupement régional ait été exploité avec parfois un grand manque d’objectivité ».

La réunion à Strasbourg fut suivie quelques jours plus tard d’un symposium au Caire, du Comité Mixte d’experts (14 juin 1975) pour une première formula-tion des principes généraux et objectifs du dialogue euro-arabe. Le Memorandum conjoint de cette réu-nion précise dans son Introduction que « Le dialogue euro-arabe est le fruit d’une volonté politique commune qui s’est dégagée au niveau le plus élevé et qui a pour objet l'établissement de relations spéciales entre les deux groupes».

Les deux parties rappelaient que le dialogue trouvait son origine dans leurs échanges à la fin de 1973 et notamment dans la déclaration des Neuf du 6 novembre 1973 concernant la situation au Moyen-Orient. Il y était affirmé que la croissance et l’épanouissement de la coopération économique euro-arabe dans un vaste domaine d’activités, se fondaient sur cette entente politique concernant Israël. Dans le domaine économique, le dialogue avait pour but «d’établir les conditions fondamentales du développement du Monde arabe dans son ensemble et à réduire le fossé technologique qui sépare les pays arabes des pays européens ».

Parmi les innombrables domaines de coopération énumérés dans le Memorandum, sont mentionnés la coopération dans la technologie nucléaire, dans la finance, la banque et la gestion des capitaux, dans la recherche scientifique, le développement technologique, la formation technique et professionnelle, l’utilisation de l’énergie nucléaire. La formation de personnel spécialisé pour les nombreux projets envisagés, se ferait « soit par l’envoi d’équipes d’experts européens en vue de former la main-d’œuvre arabe, soit par la formation de cette main-d’œuvre dans les établissements des pays de la Communauté. » Il était prévu de mettre en place une coopération « effective et d’échanges d’informations entre universités arabes et européennes » dans les méthodes de recherche, divers programmes et projets.

La section concernant la « Coopération dans les domaines de la culture et de la civilisation » précisait que son principal objectif était la consolidation et l’approfon-dissement des bases de la compréhension culturelle et du rapprochement intellectuel entre les deux régions.
À cette fin diverses mesures étaient prévues, dont la création d’une institution culturelle euro-arabe commune, des échanges d’experts, le développement des rapports dans les domaines de l’éducation et du tourisme. Enfin les problèmes de main-d’œuvre des travailleurs émigrés devaient être réglés par l’égalité de traitement concernant:

1. la situation de l’emploi; 2. les conditions de vie et de travail ; 3. les régimes de sécurité sociale.
Après presque trois décennies, quel fut l’impact sur le continent Europe de cette politique qui scelle en un seul bloc lié au monde arabe, des secteurs en principe indépendants, l’économie, l’immigration, la politique et la culture?

L’engrenage : l’instrumentalisation arabe de la Communauté européenne


Dans cette corrélation entre secteur économique et politique, l’on constate tout d’abord la différence de niveaux entre les perspectives de la CE et celles de la Ligue Arabe. La CE recherche le rendement économique, le profit, par une stratégie d’expansion sur les marchés pétroliers, commerciaux, industriels. Son action se caractérise uniquement par un pragmatisme affairiste de gestionnaires technocrates qui élaborent des programmes d’assistance et de développement régionaux, ainsi que des ventes massives d’armes, d’équipements nucléaires (Osirak en Irak) et indus-triels dans la course au profit.
Le côté arabe, par contre, exploite l’économie comme le moyen radical d’instrumentaliser la CE dans une stratégie politique à long terme visant Israël, l’Europe et l’Amérique. L’emprise politique arabe sur l’économie de la CE imposera rapidement à cette dernière les directives politiques arabes concer-nant Israël. L’un des délégués arabes exprimait bien l’esprit du Dialogue, lors de la réunion d’experts de la Coopération Euro-Arabe, à Amsterdam en 1975 :

« Les Européens et les Arabes peuvent par une stratégie d’interdépendance faire progresser la suppression de la source d’irritation constante dans leurs côtes — le problème israélien — et s’atteler à la tâche herculéenne au devant d’eux.. » (note 10).

Les accords économiques entre la CE et le monde arabe sortant de la sphère de traités commerciaux conduisirent à une inféodation progressive de l’Eu-rope aux objectifs politiques arabes. Le DEA devint — surtout avec la France — une diplomatie associative dans les forums internationaux où la CE s’alignait sur les positions antisionistes arabes. Véhicule de légitimation et de propagande de l’OLP, le DEA lui procura une reconnaissance diplomatique internatio-nale et conféra à Arafat et à son mouvement terroriste, une honorabilité et une stature internationale. C’est au sein du DEA que se construisit toute la politique de guerre contre Israël, aux niveaux nationaux et internationaux de la CE, dans les syndicats, les media et les universités. Le DEA fut le porte-voix qui diffusa et popularisa dans toute l’Europe la démonisation et la diffamation d’Israël. La France, la Belgique et le Luxembourg furent les agents les plus actifs du DEA.

En Europe même, la stratégie arabe se développa principalement dans trois directions :1) obtenir la parité économique et industrielle avec l’Occident par le transfert des technologies modernes, notamment nucléaire et militaire; 2) implanter sur le sol européen une large population musulmane jouissant de tous les droits politiques, culturels, sociaux et religieux des pays d’accueil; 3) imposer la marque politique, culturelle et religieuse de l’arabo-islamisme dans l’es-pace européen par une immigration qui demeurait politiquement et culturellement attachée aux pays d’origine. Les pays arabes demandaient un transfert de technologie, la coopération dans le développement nucléaire et le développement industriel.
Au niveau géostratégique, la Coopération Euro–Arabe fut un instrument politique d’anti-américanisme en Europe visant à séparer et affaiblir les deux continents par l’incitation à l’hostilité réciproque et par le dénigrement permanent de la politique améri-caine au Moyen-Orient.

La synchronisation de l’importation de main-d’œuvre islamique en Europe avec l’exportation de produits européens dans les pays arabes, permit l’im-plantation définitive de plusieurs millions d’immigrés musulmans, processus dont la rapidité et l’ampleur sont uniques dans l’histoire. Même au cours de la colo-nisation européenne, l’émigration d’Européens vers les colonies procédait à un rythme infiniment plus ralenti. Le nombre de colons européens, descendance comprise, même après un à deux siècles maximum, fut incomparablement inférieur à celui des immigrés musulmans actuels dans chacun des pays d’Europe, après trois décennies seulement.

Le laxisme politique des gouvernements européens fut aggravé par l’octroi aux pays arabes, d’exporter, avec leur population, leur culture et leur mœurs (Déclaration du DEA à Damas, 11 sept. 1978). Cette implantation culturelle en Europe, intégrée dans l’immigration, c’est-à-dire le transfert de millions de musulmans d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie avec leur culture d’origine dans les pays d’accueil, avait déjà été planifiée au cours du séminaire Euro-Arabe tenu à l’Université de Venise (28-30 mars, 1977) sur « Les moyens et les formes de la coopération pour la diffusion en Europe de la langue arabe et de sa civilisation littéraire. » Le Séminaire fut organisé par l’Instituto per l’Oriente à Rome et la Faculté de Langues étrangères, section de littérature arabe, de l’Université de Venise. Les participants comptaient 14 universitaires des pays arabes, 19 arabisants des universités européennes, de nombreuses autres personnalités liées au monde musulman ainsi que le représentant de l’Institut Pontifical des Etudes Arabes, à Rome. Le séminaire était intégré au Dialogue Euro-Arabe, c’est-à-dire avec l’assentiment du Président de la CE et des ministres des Affaires étrangères de chaque pays qui y était représenté. Les participants arabes représen-taient l’Algérie, l’Arabie Saoudite, l’Egypte, l’Irak, la Jordanie, le Qatar, le Soudan et la Tunisie, (note 11).

Parmi les sujets abordés durant les quatre sessions de travail, les rapporteurs européens présentèrent leurs rapports sur la diffusion et la connaissance de l’arabe et de la civilisation des Arabes dans leurs pays respec-tifs. Les délégués arabes de leur côté exposèrent les méthodes d’enseignement facilité de l’arabe pour les non-Arabes, qu’ils pratiquaient dans leur pays. Le Séminaire se conclut par l’adoption de nombreuses Recomman-dations. On ne peut ici les reproduire toutes, mais leur teneur générale préconise la création dans les capita-les européennes, de Centres de diffusion de la langue et de la culture arabe dans tous les pays européens en coordination avec les pays arabes. Ce projet prévoit l’instauration dans les Instituts et les Universités européennes de professeurs arabes spécialisés dans l’enseignement aux Européens.

« Les participants à ce séminaire présentent unanimement les recommandations suivantes à l’attention des gouverne-ments des Etats membres de la Communauté Européenne et de la Ligue des États Arabes.

1. Coordination des efforts faits par les pays arabes pour diffuser la langue et la culture arabe en Europe et trouver la forme appropriée de coopération parmi les Institutions arabes opérant dans ce domaine.
2, Création de Centres Culturels Euro-Arabe jumelés dans les capitales européennes qui entreprendront la diffusion de la langue et de la culture arabe.
3. Encouragement aux institutions européennes, au niveau universitaire ou à d’autres niveau; qui sont concernés par l’enseignement de la langue arabe et la diffusion de la culture arabe et islamique.
4. Soutien aux projets jumelés de coopération entre des ins-titutions européennes et arabes dans la recherche linguistique et l’enseignement de la langue arabe aux Européens » (note 12).

La 10e recommandation stipule que l’enseignement de l’arabe doit être lié à la culture arabo-islamique et aux préoccupations actuelles arabes. La 11e souligne la nécessité de coopération entre les spécialistes européens et arabes afin de présenter un tableau objectif de la civilisation arabo-islamique et des problèmes contemporains arabes aux étudiants et au public éduqué européen, afin de l’attirer vers les études arabes. Les résolutions suivantes définissent les formes de coopération entre universités arabes et européennes et leurs spécialistes respectifs ainsi que l’organisation des fonds nécessaires à ce projet d’ara-bisation dans la CE.

La dernière recommandation (19) considère nécessaire l’établissement d’un comité permanent d’experts arabes et européens chargés de contrôler le suivi et l’application des décisions concernant la diffu-sion de l’arabe et de la culture arabe en Europe, dans le cadre du Dialogue Euro-Arabe. Ce cadre signifiait l’approbation des ministres des Affaires étrangères des pays de la CE et de sa présidence, en relation avec le Secrétaire de la Ligue des pays arabes, ainsi que les autres diplomates, représentés dans la Commission Générale dont les travaux se déroulaient à huis-clos et sans procès-verbaux.

Les exigences culturelles du bloc arabe


Ainsi dès les années 1970, la politique de l’immigration, intégrée dans la conception économico-politique du DEA (1973), n’envisageait pas une émigration ponctuelle d’individus désireux de s’intégrer aux pays d’accueil. Elle planifiait une implantation homogène dans le tissu laïc européen, de collectivités étrangères se chiffrant en millions, venues non pour s’intégrer mais avec le projet d’imposer de droit, aux pays d’ac-cueil, leur propre civilisation. La pusillanimité politique de la CE facilita la création de milieux en rupture, hostiles à leur environnement dont ils rejettent les institutions laïques considérées inférieures à celles de la charia donnée par Allah. Ainsi dès le début de l’im-migration, l’intégration était exclue, alors même que le DEA réclamait pour les immigrés arabes, les droits conférés par des institutions juridiques européennes que ces derniers refusaient, puisqu’ils se prévalaient de leur propre culture arabo-islamique fondée sur la charia.

Le Symposium de Hambourg (11-15 avril 1983) fut inauguré en grande pompe par le discours d’ouverture de Hans-Dietrich Genscher, ministre des Affaires étrangères de la République Fédérale d’Allemagne, suivi par celui du Secrétaire Général de la Ligue Arabe, Chadly Klibi. Genscher rappela avec force la dette de l’Europe envers la civilisation islamique et souligna l’importance du Dialogue pour cimenter la solidarité euro-arabe. Il évoqua le début, en 1973, du Dialogue et l’importance du volet politique qui ne devait pas être ignoré – autrement dit la politique anti-israélienne de la CE au Moyen-Orient comme fondement de tout l’édifice économique de la Coopération Euro-Arabe. Les deux parties du Dialogue — recommandait Genscher — devaient toujours se souvenir du Mémorandum Conjoint émis au Caire en 1975. Ce document constituait la Charte du Dialogue et insistait sur la vision politique commune des Arabes et de la CE qui ensemble, luttaient pour la création d’une relation spéciale entre les deux groupes. «Nous Européens, nous avons parlé fort et de façon convaincante pour une reprise du Dialogue Euro-Arabe dans la Déclaration de Venise du 13 Juin 1980.

Depuis lors, les différents groupes de travail intégrés au Dialogue sont devenus plus actifs et les projets pour le futur sont maintenant prometteurs » (note 13).
Dans la Déclaration de Venise, la CE s’était totalement alignée sur les exigences politiques arabes concernant Israël. Elle avait affirmé les droits natio-naux des Palestiniens « qui n’étaient pas seulement des réfugiés » (art.6). L’article 7 exigeait la participation de l’OLP aux négociations. Dans l’article 8 « les Neuf soulignent qu'ils n’accepteront aucune initiative unilatérale visant à changer le statut de Jérusalem. » Dans l’article suivant « Les Neuf soulignent le devoir pour Israël de mettre fin à l’occupation territoriale qu’il a maintenu depuis le con-flit de 1967 comme il l’a fait pour une partie du Sinaï. Ils sont profondément convaincus que les villages (settlements) israéliens constituent un obstacle sérieux au processus de paix au Moyen Orient. Les Neuf considèrent que ces villages, comme les modifications de population et de propriété dans les territoires arabes occupés, sont illégaux par rapport à la loi internationale. »

Au cours du Symposium les orateurs des deux par-ties présentèrent divers exposés liés à l’intégration des deux civilisations. Les participants furent répartis en trois groupes de travail. Le premier examina les pers-pectives d’avenir des échanges culturels. On y discuta des accords entre universités, des échanges d’étu-diants et de professeurs dans tous les domaines cul-turels, et de la diffusion en Europe des publications arabes. Les domaines de cette coopération culturelle devaient être définis par un Accord culturel général entre la Ligue Arabe et la Communauté Européenne. A l’intérieur de ce contexte des domaines plus spécialisés seraient délimités. Un petit comité conjoint dans le cadre du Dialogue serait créé et mandaté pour surveiller l’application et la conformité de ces accords avec les buts visés, il examinerait les nouveaux projets et leur exécution. Le groupe de travail suggéra divers projets qu’on résumera ici:

1. La publication bi-annuelle d’un journal Euro–Arabe destiné à faire connaître au public européen, le développement culturel et intellectuel du monde arabe.
2. Le renforcement des contacts et de la coopération intellectuelle par des accords et des échanges entre des syndicalistes arabes des différentes professions et leurs semblables européens. Le côté arabe proposa tout particulièrement des accords avec l’union des Ecrivains et des Editeurs arabes, des rencontres périodiques entre les syndicats européens et arabes de la Radio et de la Télévision et entre des Associations de producteurs de films et des acteurs.
3. La programmation de séminaires entre petits groupes de spécialistes sur différents thèmes tels que l’historiographie arabe, le dialogue religieux, la publication de livres, la formation des libraires, l’investigation du contenu des livres scolaires à tous les niveaux concernant l’histoire des deux régions.

Le second groupe de travail se consacra aux : «Conséquences de la Migration des Travailleurs et des Intellectuels » . Les participants constatèrent que l’immigration arabe se transformant en résidence permanente, l’exécution de la Déclaration de Damas (décembre 1978), était désormais insuffisante pour la situation en 1983. Il fallait notamment compléter l’article stipulant les droits du migrant arabe et des membres de sa famille, à jouir dans les pays européens, de l’égalité de traitement en matière de loge-ment, de travail, de salaires, de droits économiques, d’association, et de libertés publiques fondamentales.

Des mesures politiques et des programmes « propres à assurer l’exécution de ces principes furent planifiés afin d’assurer le maximum de prestations aux migrants et un maximum de bénéfices pour les pays d'origine et d’accueil dans un esprit de franche coopération parmi les pays engagés dans le Dialogue ».
« Il est recommandé que l’intégration sociale des immigrés et de leurs familles soit facilitée dans les pays d’accueil par:

a. l’octroi de droits égaux dans le logement, le travail, le système éducatif la formation professionnelle et l’apprentissage,
b. rendre le grand public plus conscient du milieu culturel des immigrés par la promotion par exemple des activités cul-turelles des communautés immigrées,
c. fournir des informations adéquates sur la culture des communautés immigrées dans les programmes scolaires,
d. créer des facilités spéciales d’enseignement et de formation pour les fonctionnaires en relations avec les immigrés, médecins, policiers, enseignants, travailleurs sociaux, etc ».

Les immigrants arabes devaient avoir également accès aux mass media afin de leur assurer des informations régulières dans leur propre langue, sur leur culture et sur les conditions de vie des pays d’accueil. Il fut également recommandé «d’élargir la coopération entre les groupes d’immigrés et la population nationale et de prendre des mesures pour augmenter la participation des groupes d’immigrants dans les activités syndicales et d’explo-rer leur participation dans la vie politique ».

Le sixième point recommandait aux pays arabes d’origine de renforcer leur soutien culturel aux immigrés arabes en Europe et de renforcer la coordination pour soutenir les efforts des communautés arabes pour promouvoir la langue et la culture arabes en Europe.
Le troisième groupe de travail examina la coopération dans le domaine de l’enseignement de l’arabe et des langues européennes. Ce groupe souligna que cette question était de la plus haute importance car elle constituait un principe de base du Dialogue Euro-Arabe. Les décisions du Séminaire de Venise (1977) furent complétées par celles du Symposium de Hambourg (1983). On réitéra la nécessité de diffuser en Europe la langue et la culture arabes par les pays arabes et leurs institutions spécifiques ainsi que par des Centres culturels Euro-Arabe dans les capitales européennes. Il fallait enseigner l’arabe aux enfants immigrés, assurer la publication et la distribution de journaux et de livres arabes destinés à un public cul-tivé européen afin de donner un tableau objectif et séduisant de la civilisation islamique. Un programme d’exécution de toutes les activités examinées fut planifié sur cinq ans.

À la lecture des actes de ces nombreux symposiums, l’on est frappé par la différence de discours entre les deux parties. Les Européens adoptent un langage prudent, admiratif et flatteur envers l’islam. Des hommages excessifs sont rendus à la grande civilisation islamique à laquelle s’abreuva celle de l’Europe dans toutes ses composantes (Hans-Dietrich Genscher, ministre allemand des Affaires Etrangères, Symposium de Hambourg, 1983).

De plates et humbles excuses sont formulées pour la colonisation et les préjugés européens anti-arabes. Du côté arabe, par contre, le ton est celui d’un maître qui fustige et enseigne, sûr de la tolérance, de l’humanisme et de la grandeur de sa civilisation, source spirituelle et scientifique de l’Europe. Les reproches ne manquent pas, notamment concernant l’insuffisance des mesures européennes contre Israël, point central et essentiel sur lequel s’est bâtie toute l’infrastructure du Dialogue. Les discours arabes martèlent en termes venimeux (l’usurpation sioniste, la main sioniste brandie pour tuer le peuple arabe dans chaque pays, politique raciste institutionnalisée) l’obligation des Européens de sévir contre Israël. Ils leur rappellent le devoir de reconnaître et d’enseigner au niveau universitaire, la grandeur et la supériorité de la civilisation islamique et de l’islam. Des prédicateurs exposent l’origine islamique du judaïsme, du christianisme et de toute l’humanité, née musulmane dans sa pureté originelle.

L’alignement de la Communauté européenne


On peut sans hésiter affirmer que le Dialogue Euro–Arabe transforma en trente ans (1973-2002) la civilisation européenne, donnant naissance à une culture hybride: Eurabia. On énumérera ici les conséquences du Dialogue.

Au plan politique la CE s’est totalement alignée sur les directives concernant Israël formulées par la Ligue Arabe dès 1970 comme on le constate dans la Déclaration des Neuf sur le Moyen-Orient (Londres, 29juin 1977) et le Discours prononcé par M. Simonet, ministre belge des Affaires étrangères, et président de la CEE aux Nations Unies (New York, 26 septembre 1977). Certaines de ces déclarations répètent mot pour mot celles émises par la 2è Conférence islamique de Lahore (1974).

Ainsi, le Conseil Européen (Londres, 29juin 1977) précisait dans l’article 2 de sa Déclaration :

— l’inadmissibilité de l’acquisition de territoires par la force
— la nécessité pour Israël de mettre fin à l’occupation territoriale qu’il maintient depuis le conflit de 1967
— la reconnaissance que, dans l’établissement d’une paix juste et durable, il devra être tenu compte des droits légitimes des Palestiniens.

Dans son article 3, on lit:

« Les Neuf sont convaincus qu’une solution du conflit au Moyen- Orient ne sera possible que si le droit légitime du peuple palestinien à donner une expression effective à son identité nationale se trouve traduit dans la réalité qui tiendra compte de la nécessité d’une patrie pour le peuple palestinien. Ils considèrent que les représentants des parties au conflit, y compris le peuple palestinien, doivent participer aux négociations d’une manière appropriée, à définir en consultation entre toutes les parties intéressées. Dans le cadre d’un règle-ment d’ensemble, Israël doit être prêt à reconnaître les droits légitimes du peuple palestinien. De même la partie arabe doit être prête à reconnaître le droit d’Israël à vivre en paix à l’intérieur de frontières sûres et reconnues » (note 14).

Cette déclaration avait été préparée par la session de la Commission Générale du DEA de Tunis (10-12 Février 1977) et confirmée par la troisième session de la Commission Générale (Bruxelles, 26-28 octo-bre 1977) dont l’article 9 énonce que la partie arabe a répété que le moment était venu pour les Neuf de reconnaître comme représentant légitime du peuple palestinien l’Organisation de Libération de la Palestine qui a été reconnue comme telle par tous les États arabes, par la plupart des autres pays ainsi que par les Nations Unies.

Le 26 septembre 1977, M. Simonet, ministre belge des Affaires étrangères et président du Conseil de la CEE avait déclaré à l’Assemblée Générale de l’ONU à New York, que le conflit du Proche-Orient devra être fondé sur les résolutions 242 et 338 (1973) :

« ainsi que sur les principes de base suivants : d’abord, l’inadmissibilité de l’acquisition de territoires par la force; ensuite, la nécessité pour Israël de mettre fin à l’occupation territoriale qu’il maintient depuis le conflit de 1967; puis le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance de chaque État de la région et de son droit de vivre en paix dans des frontières sûres et reconnues; et enfin, la reconnaissance que, dans l’établissement d’une paix juste et durable, il devra être tenu compte des droits légitimes des Palestiniens.

Les Neuf continuent également à penser qu’une solution au conflit ne sera possible que si le droit légitime du peuple palestinien à donner une expression effective à son identité nationale se trouve traduit dans les faits. Ce qui tiendrait compte bien sûr de la nécessité d’une patrie pour le peuple palestinien…
Il convient de rappeler ici que les Neuf ont fait part publiquement de leurs inquiétudes devant les mesures illégales prises récemment par le gouvernement d’Israël dans les ter-ritoires occupés…
Dans cette attente, les Neuf réaffirment le souci qu’ils ont eu l'occasion d’exprimer à différentes reprises aux parties, que celles-ci s’abstiennent de toute déclaration et de l’adoption de toute mesure administrative, législative, militaire ou généra-lement quelconque constituant un obstacle au processus de paix. » (note 15).

Concernant Jérusalem, le communiqué final publié à l’issue de la deuxième session de la Commission Générale (Tunis 10-12 février 1977) déclarait que «la partie européenne… a marqué également son opposition à toute initiative tendant à modifier unilatéralement le statut de Jérusalem. La partie arabe a dit combien elle appréciait cette attitude. ». Cette prise de position fut réitérée par l’article 10 de la déclaration publiée à l’issue de la quatrième session de la Commission Générale du DEA (Damas, 9-11 décembre 1978).

Ces prises de position faisaient fidèlement écho à la Déclaration rendue publique par la deuxième Conférence islamique de Lahore (24 février 1974) :

« 1. La cause arabe est celle de tous les pays qui s’opposent à l’agression et qui n’admettent pas que l’usage de la force soit récompensé par l’obtention de territoires ou par tout autre gain.
2. Un appui total et efficace devrait être accordé aux pays arabes pour leur permettre de recouvrer par tous les moyens disponibles, tous leurs territoires occupés.
4. La restauration de la plénitude des droits nationaux du peuple palestinien sur sa patrie est la condition primordiale et fondamentale à l’établissement d’une paix durable fondée sur la justice.
7. La Conférence note avec satisfaction les efforts constructifs déployés par les Églises chrétiennes partout dans le monde et dans les pays arabes, notamment au Liban, en Egypte, en Jordanie et en Syrie, pour expliquer la cause palestinienne à l’opinion publique internationale et aux conférences religieuses mondiales et pour obtenir leur appui à la souveraineté arabe sur Jérusalem et les autres Lieux saints de Palestine.
8. Toute mesure prise par Israël pour changer le caractère des territoires arabes occupés, et en particulier de la Ville Sainte de Jérusalem, est une violation flagrante du droit international et une atteinte aux sentiments des Etats membres de la Conférence islamique et du monde islamique en général » (note 16).

La porte ouverte à l’islamisme


Alors que la CE n’offre à Israël qu’un verbiage qui ne peut qu’être insignifiant pour les civilisations du djihad — paix juste et durable, frontières sûres et reconnues — elle exige de l’État hébreu des faits concrets : cession de territoires, arabisation de Jérusalem, création de la Palestine arabe sur le territoire dévolu originellement à l’État d’Israël, et l’obligation pour Israël de négocier avec Arafat, chef terroriste avéré jusqu’aux accords d’Oslo, reconverti au djihad durant le processus qui s’en est suivi. Reprenant la rhétorique arabe concernant la création d’un État palestinien (le second après la Jordanie, créée en 1921 par les Anglais) la CE, s’alignant sur les exigences de la Ligue Arabe, reconnut Arafat comme son seul représentant. Elle conféra ainsi, une honorabilité et une légitimité au père du terrorisme international et à l’ennemi irréductible de l’État d’Israël.

La CE exigea le retour d’Israël sur les lignes d’armistice de 1948 en feignant de croire à la viabilité d’un tel État. Son refus de reconnaître le droit d’Israël à sa capitale, Jérusalem, implique une délégitimation et une négation de l’histoire du peuple juif dont l’Eu-rope du fait de ses origines chrétiennes est pourtant le témoin par excellence. La CE adopta l’obsession pathologique arabe conférant à Israël une centralité maléfique, qui éclipsa tous les événements de la planète. Elle l’instrumentalisa comme clé d’explication et de politique internationale, faisant du conflit israélo-arabe sa priorité absolue, aveugle aux dangers menaçant sa sécurité et son devenir. C’est ainsi qu’elle abandonna les chrétiens du Liban aux massacres des Palestiniens, et les chrétiens du monde islamique aux persécutions de la dhimmitude. La libération d’Israël, minuscule portion des territoires qui furent colonisés par les Arabes en Asie, Afrique et Europe par la guerre et la force, provoqua une paranoïa qui masqua les souffrances de millions de victimes des djihads modernes. En s’engageant dans la guerre arabo-isla-mique contre Israël, l’Europe récuse toutes ses valeurs et le fondement même de sa civilisation.

Sur le plan démographique européen, la politique d’immigration de la CE encouragea le souhait isla-miste d’islamiser l’Europe, et lui donna des bases très concrètes. Les chiffres réels de cette immigration furent dissimulés au public comme s’ils constituaient un secret d’État. L’exportation dans les pays d’accueil, de la culture des immigrés, faveur exorbitante et unique dans l’histoire de l’immigration, fut intégrée dans les accords entre la CE et la Ligue Arabe comme un droit inaliénable des immigrés. Il constitua un obstacle à leur intégration, d’autant plus que les liens avec les pays d’émigration furent encouragés et maintenus au maximum par des accords culturels, politiques et économiques et par une collaboration et des échanges au niveau universitaire et international. Les Saint-Just européens de l’antiracisme réussirent à éliminer toute discussion concernant l’insécurité, la criminalité et le fanatisme religieux de certains milieux d’une popu-lation qui refusait l’intégration. Cette politique de l’autruche fut soutenue par les appareils de pouvoir de toutes tendances politiques et religieuses.

L’infrastructure culturelle du DEA permit d’importer en Europe le bagage culturel traditionnel de préjugés anti-chrétiens et anti-juifs, contre l’Occident et Israël, des peuples et de la civilisation du djihad. C’est dans ces années là que le thème du djihad fut récupéré pour alimenter un activisme terroriste. Des milieux de l’immigration s’en firent les vecteurs et les diffuseurs en Europe, avec le silence complice des universitaires, des politiciens et de tout l’appareil culturel du DEA. La déconsidération de la culture judéo-chrétienne « infidèle » s’exprima dans l’affirmation de la supériorité de la civilisation islamique, à laquelle se seraient humblement abreuvés les savants européens.

Ni les centres du savoir répartis dans l’Europe latine et byzantine pour le Moyen Age, ni dans les siècles suivants, la création de l’imprimerie, essentielle à la diffusion du savoir, ni les découvertes scientifiques de l’Europe et leurs applications technologiques, ni l’évolution novatrice de ses institutions juridiques et politiques, ni sa richesse artistique et culturelle, ne peuvent entamer l’axiome de son infériorité par rapport aux Arabes, créateurs de la science et des arts. Cette absurdité, répétée obséquieusement par nos ministres européens constitue, en fait, un principe religieux du monde arabe qui ne reconnaît aucune supériorité aux civilisations infidèles. Les termes mêmes de «civilisation judéo- chrétienne » sont refusés par les musulmans fondamentalistes (note 17) qui n’admirent qu’une seule civilisation, la civilisation islamique qui englobe, par Abraham — prophète musulman — les juifs et les chrétiens.

C’est pourquoi nos ministres ne parlent plus de civilisation judéo-chrétienne mais de civilisation abrahamique. D’ailleurs le judaïsme et Israël polarisent une telle haine que l’Europe se rallie volontiers à l’abrahamisme qui joue le rôle d’escamotage du judaïsme.

La vague d’expansionnisme culturel et religieux arabe, qui emporte l’Europe, est intégrée dans la fonctionnalité du DEA. L’UE répudie ainsi ses racines juives et rejette le christianisme parce qu’il en est issu. L’ablation de la mémoire historique de l’Europe, pour y greffer la conception arabo-islamique de l’histoire, permet aujourd’hui la diffusion d’une sorte de pseudo-culture négationniste et culpabilisante, où la vénération du mythe andalou remplace la connaissance des invasions dévastatrices musulmanes. L’obséquiosité des universitaires soumis à un pouvoir politique entièrement dominé par le matérialisme économique, rappelle les pires périodes du déclin de l’intelligence. La censure de la pensée, la suppression de la liberté intellectuelle, importées des pays musulmans dans l’emballage d’une culture de haine contre Israël, conduit aujourd’hui à l’exclusion et au boycott des universitaires israéliens par leurs collègues d’Europe.

à suivre…

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