Lu sur le blog de Jean-Paul Oury (sur Facebook) :
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Manuel Valls : Les progrès extraordinaires, en matière de génétique, de médecine, de biologie, d’aventure spatiale, la révolution de la communication entre les hommes grâce à Internet… On peut s’émerveiller de vivre un temps digne de Jules Verne ! Et surtout je suis fasciné par l’extraordinaire capacité qu’a l’être humain à s’adapter à son temps, à la réalité qui l’entoure, même dans les conditions les plus effrayantes. C’est l’enjeu de la politique : utiliser les avancées de la science pour conjurer la barbarie.
Claude Askolovitch : Tu crois encore à la science rédemptrice ?
Manuel Valls : Si tu as un doute, viens au génopole d’Evry : on y développe la recherche de demain, celles des sciences du vivant et des biotechnologies. On réalise des avancées considérables pour la médecine, par exemple à partir des cellules souches… Oui, je crois que la science peut nous sauver. Il ne faut pas l’abandonner à elle-même : elle doit être neutre et transparente, débattue et contrôlée ; il faut susciter le débat public, impliquer les citoyens, leur expliquer les enjeux et les risques. Mais la science et le progrès sont plus que jamais une évidence et une raison d’espérer. J’ai beaucoup de mal avec des tendances régressives qui deviennent dominantes à gauche.
Clause Askolovitch : Quelles régressions ?
Manuel Valls : Je trouve dommageable la pente antinucléaire qu’a épousée une partie du PS. Que des leaders aussi considérables que Laurent Fabius et Ségolène Royal endossent cette régression est inquiétant. On ne peut pas, logiquement, vouloir conjurer le réchauffement climatique en se privant d’un atout. Je trouve aussi tragiques les fatwas anti-OGM. Là encore, je regrette que la peur du progrès ait circonvenu la gauche – et la droite aussi. Qu’on s’interdise cette piste, quand il va falloir nourrir 9 milliards d’êtres humains, c’est de la non assistance à l’humanité en danger !
Claude Askolovitch : Tu préfères offrir les agriculteurs à Monsanto ? Tu aimes le business, mais à ce point…
Manuel Valls : Je suis pour qu’on travaille sur les OGM et qu’on n’hésite pas à s’en servir. Et puis, chaque OGM est différent. Plutôt que les interdire, il faut au contraire augmenter les moyens en faveur de la recherche sur les biotechnologies, afin de lever les doutes sur l’innocuité des organismes génétiquement modifiés. Et il faut avoir le courage de reconnaître que cette recherche passe obligatoirement, dans des conditions très strictes, par des expérimentations en plein champ.
Claude Askolovitch : Tu ne répons pas sur Monsanto. Confier l’avenir alimentaire de la planète à une multinationale, c’est étrange ?
Manuel Valls : Mais ta question est une question verrouillée, qui écarte par avance tout débat. On interdit la réflexion par des arguments terrorisants : Monsanto est le diable, Monsanto produit des OGM, les OGM sont diaboliques ! Je ne marche pas. L’enjeu, pour l’humanité, ce sont les OGM en eux-mêmes et ce qu’ils peuvent apporter à une planète menacée de surpopulation, d’épuisement des ressources en eau et de disette. Ensuite, on peut discuter de Monsanto. Evidemment, il faut contrôler cette industrie, comme toutes les autres. La surpuissance des semenciers, Monsanto ou un autre, leur tendance au monopole, leurs abus, leurs stratégies prédatrices, on doit évidemment les restreindre, les maîtriser, les combattre souvent. Nous ne pouvons pas permettre l’asservissement de paysans, en Afrique du Sud ou en Indre, par une entreprise : c’est un enjeu majeur. Et on doit poser clairement un régime de responsabilité juridique face aux risques de « contamination »… J’emploie malgré moi le mot des anti-OGM !
Clause Askolovitch : Comment doit-on dire ?
Manuel Valls : Face au risque de dissémination du pollen vers des cultures non-OGM, la loi doit déterminer un régime de responsabilité. Evidemment, dit comme ça, tu as moins peur ! Mais toute cette affaire a justement été détournée par les marchands de peur. Je veux revenir au politique. Je suis pour le progrès et pour l’encadrement de ce progrès. Je suis progressiste, parce que je ne laisse pas tout le pouvoir au marché : ça me paraît très cohérent. Encore une fois, c’est la réalité qui doit primer. A-t-on besoin des OGM ? Oui, je le crois. En matière de santé, d’environnement, mais aussi d’agriculture.