31 mars 2023

Un voyage en pays amazigh malgré l’orage à l’horizon

Aller en Libye était quelque chose d’inenvisageable pour moi. Oui, comment visiter un territoire sous domination du système de Kadhafi ? Même en Kabylie pourtant mon pays natal, cela fait dix-huit ans que je n’y suis pas allé. En effet, pourquoi me rendre en terre kabyle sous régence quasi coloniale, voire purement colonisée ? M’y rendre serait en effet pour moi, quelque part, l’acceptation du fait accompli, à savoir vivre dans son propre pays l’humiliation au quotidien…

Mais, ce lundi 25 juillet, tout a été enfin possible pour moi sous un autre ciel berbère. Oui, j’ai atterri sur un territoire amazigh débarrassé de la colonisation, un pays sous contrôle total d’Amazighs… Croisons les doigts pour que ce le soit pour toujours.

Pour me rendre en Libye, j’ai fait confiance à mes frères de combat qui se battent depuis février pour la chute du régime du dictateur de Tripoli. Ils m’ont invité à m’y rendre pour partager avec moi le bonheur qu’ils vivent depuis plusieurs semaines. Cette invite arrivait à un point nommé : c’est que j’envisageais en parallèle de concrétiser mon engagement dans la guerre livrée à Kadhafi et à son régime par une visite dans le pays amazigh afin de leur exprimer mon soutien à leur combat. Je tenais aussi à leur exprimer de facto la solidarité de Tamazgha, une organisation berbériste dans laquelle je milite depuis dix-huit ans.

Tamazgha s’est effectivement engagée dans une action contre le régime de Kadhafi depuis décembre 2010, lorsque deux militants amazighs, Mazigh et Madghis Bouzakhar, furent arrêtés arbitrairement par le régime de Kadhafi qui leur préparait une condamnation à mort. Ces deux militants appartiennent aussi à l’organisation Tamazgha. C’est donc tout naturellement que nous nous sommes joints au soulèvement du 17 février que nous l’avons accompagné très particulièrement à Adrar n Infusen et Zwara en œuvrant depuis Paris. Ce soutien à distance est très important et nécessaire, mais une présence physique aux côtés des combattants est encore plus significative sur le plan psychologique. Leur rendre visite et en rendre compte est encore mieux…

Sur le plan personnel, cela me permettait également d’être conséquent avec moi-même dans la mesure où je suis partisan du combat pour la libération des territoires amazighs colonisés par les régimes arabo-musulmans. En effet, quoi de plus naturel qu’un berbériste aille apporter son aide à des combattants amazighs qui se battent pour se libérer ?

Mon voyage a commencé par la visite de familles de Lalut (Nalut) réfugiés à Douiret (Tunisie). La visite a été facilitée par des Amazighs de Tunisie qui sont en contact avec les réfugiés libyens. Ma surprise a été agréable lorsque le vieux Ahmed Sliman, qui semblait être le représentant de ces familles, me parlait de tamazight comme ne le feraient pas beaucoup de prétendus militants berbères. J’étais impressionné autant par sa culture et ses connaissances que par ses convictions concernant la langue et la culture amazighes. La rencontre fut courte mais très enrichissante. Il m’a, par exemple, repris en évoquant "Nalut" en me précisant que "Nalut" est le nom que Kadhafi a attibué à cette ville qui s’appelle en réalité "Lalut".

Vers 17h, Fethi et son fils Madghis ont mis au point les derniers détails de la mission de mon transport vers Ifrane (Libye) par Mohand et Abdellah venus de Tunis avec un véhicule chargé de marchandises. Pour que je puisse me rendre à Ifrane (Yefren), Mahmoud, le troisième voyageur, a dû renoncer à sa place. On a alors rajouté à la charge de la voiture mon sac à dos ainsi que 100 drapeaux amazighs.

 

 

 

 

 

A un point de contrôle de Lalut

 

 

 

 

 

Passé le poste frontalier Dehiba-Wazzen, nous sommes entrés en territoire sous contrôle des combattants amazighs : liberté je t’embrasse ! Dès le premier point de contrôle, je n’ai pas résisté à l’envie de demander à mes accompagnateurs de marquer une pause et à descendre saluer les combattants qui assuraient la surveillance du point de contrôle. Mon "azul" a été accueilli chaleureusement par les combattants armés qui m’ont invité à prendre le thé avec eux. J’ai décliné leur invitation : "Non, merci, je tenais juste à vous saluer et à vous féliciter pour votre travail. Nous sommes fiers de vous !" leur-ai-je dit. Je leur ai demandé également s’il était possible de prendre des photos avec eux. Ils ont accepté avec enthousiasme. J’ai aussi tenu à prendre l’arme de l’un d’entre eux ornée d’un beau "zad". Il me l’a confiée avec joie. Notre échange s’est entièrement effectué en tamazight. Je ne peux exprimer l’émotion que j’ai ressentie à cet instant, un sentiment de liberté et d’existence tout simplement. J’étais enfin sur un territoire sous contrôle amazigh !

J’ai notamment échangé avec Abdellah et Mohand autant sur la « révolution » que sur la question amazighe. Notre long voyage nocturne était accompagné par les chansons d’Oulahlou, Matoub, Idir, Akli D. et d’autres…

 

 

 

 

 

Abdellah et Mohand (au volant)

 

 

 

 

 

J’ai passé toute la journée du mardi 26 juillet à Ifrane (Yefren) où j’ai visité différents villages. Il a fallu d’abord réaliser que j’étais bien à Adrar n Infusen et apprécier le paysage. Sur la route qui nous a conduits jusque là, moi et mon hôte, j’ai dû constater les dégradations gratuites commises par les troupes kadhafistes dans les villages d’Ifrane.

A Ifrane, on ne peut ne pas ne pas visiter le Centre Médias d’At-Yefren (At-Yefren Media center) dirigé par Mazigh Bouzakhar. En plus du travail d’information et de communication que ce centre effectue, le bâtiment qui l’accueille abrite déjà plusieurs associations et organisations de la société civile des villages d’Ifrane (Tanit, association pour les femmes et les enfants d’At-Yefren, Tira pour la langue et la culture amazighes, l’Association nationale pour la culture amazighe, le Centre d’Adrar n Infusen pour les études et la recherche historiques, l’Association Ifri pour la toponymie amazighe, Tiwattriwin pour l’émancipation de la femme, l’Association des artistes amazighs). Ce centre abrite également le Projet Asirem pour la solidarité avec At-Yefren ainsi que le Musée de la guerre d’At-Yefren. Au moins deux publications paraissent à Ifran : Tilelli et Tamellult. Au moins deux associations assurent régulièrement des cours de tamazight aux enfants.

L’ensemble des responsables des associations rencontrés ainsi que les usagers du centre sont dans un état d’esprit exceptionnel. J’ai été impressionné par leur engagement et leur dynamisme ainsi que leur volonté d’arriver vite vers leurs objectifs. Inutile de vous dire que la question amazighe n’est plus taboue à Ifrane. L’amazighité est vécue le plus naturellement du monde. J’en veux pour preuve que toute la documentation, toute la littérature, toutes les indications, sont en tamazight (en caractères tifinagh). L’arabe est la deuxième langue à Ifrane. Parfois, l’anglais vient en troisième position.

Les rues d’Ifran sont déjà aux couleurs amazighes. Ainsi, on aperçoit des motifs amazighs un peu partout dans la ville, des zad mis par-ci, par-là et des drapeaux amazighs qui flottent sur les toits de certaines maisons. J’ai eu l’honneur de passer ma première nuit à Ifrane dans une demeure sur laquelle flottait notre drapeau.

J’étais en train de visiter l’ancienne prison [1] de la ville lorsque j’ai entendu de loin la musique du chanteur kabyle Idir populaire à Adrar n Infusen. Plus rien ne pouvait me surprendre dans ce pays réellement libéré… Mais je voulais comprendre d’où était diffusée la musique. De plus, dans un pays en guerre on ne peut pas imaginer que les populations puissent avoir le temps de diffuser de la musique. Pourtant tel était bien le cas à Ifrane. Madjer, mon guide pour la journée, m’a expliqué que la musique venait de Taddart n Tlelli (la Maison de la liberté). Je lui ai demandé, bien entendu, de m’y conduire. Taddart n Tlelli est l’un de ces bâtiments qu’occupait, il y a peu, l’administration de Kadhafi où était édifiée une grande effigie de son fameux "livre vert". Les jeunes d’Ifrane ont investi ce lieu dès le début du soulèvement de février 2011. Ils ont détruit le monument de propagande et réquisitionné le bâtiment aujourd’hui transformé en un lieu de rencontre de débat et de libre expression. D’ailleurs le nom du lieu l’indique bien. Dans Taddart n Tlelli on trouve une exposition des différentes armes que les troupes kadhafistes ont utilisées pour tirer sur les populations. Des peintures murales relatent les événements vécus par la ville. Une sonorisation mise en place dans les jardins du bâtiment diffuse la musique du chanteur kabyle Idir.

Madjer est artiste. Il s’occupe de l’Association des artistes amazighs. Il parle parfaitement tamazight. Dire qu’il y a seulement cinq ans qu’il a commencé à l’apprendre. Auparavant il habitait à Tripoli et ne parlait qu’en arabe. Comme tous les jeunes d’Ifran, Madjer a pris les armes (d agrawli : c’est ainsi qu’on appelle les combattants à Adrar n Infusen) au début du soulèvement. Et malgré ses diverses activités notamment au Media Center, il lui arrive d’aller au front (iteffegh) et son arme est soigneusement gardée. Dans les rues d’Ifran, on croise des compagnons de combat de Madjer, tous jeunes, qui étaient contents de rencontrer un Kabyle dans leur village. Très vite, ils m’ont accaparé, ils m’ont fait monter dans leur pick-up pour me faire visiter la ville et ils m’ont raconté avec beaucoup d’enthousiasme leurs exploits contre les troupes kadhafistes. Par la suite, ils m’ont conduit au Centre de commandement militaire d’Ifrane qu’ils m’ont fait visiter. C’est un Club sportif qui l’abrite, ce qui permet d’ailleurs l’utilisation de ses équipements pour la (re)mise en forme physique des combattants. Quelle agréable surprise et quel bonheur ce fut de voir le drapeau amazigh flotter dans ce Centre de commandement militaire. C’est un ex-officier de l’armée libyenne qui coordonne les opérations militaires dans la région depuis ce Centre. Les combattants me montrent des véhicules pris aux troupes kadhafistes lors d’accrochages. Il est difficile de voir un véhicule qui ne porte pas un insigne amazigh ; c’est dire à quel point l’amazighité est ancrée dans cette région et que leur détermination à vivre pleinement leur identité est acquise. Pour l’anecdote la quasi-totalité des combattants portent des t-shirts avec des symboles amazighs : certains avec le signe zad d’autres avec des drapeaux amazighs au dos, d’autres avec des tifinaghs, …

 

 

 

 

 

Agrawli

 

 

 

 

 

Certains combattants sont très jeunes. C’est le cas d’un jeune de dix-neuf ans venu de Zwara (Iwlellen) toujours sous occupation du régime de Kadhafi. Il est venu pour se battre aux côtés de ses frères dans cette région libérée. Lorsque je l’ai revu le soir de ce mardi 26 juillet partir au front, j’ai eu la chaire de poule et les larmes aux yeux. Il fait partie des renforts envoyés d’Ifrane vers le front Ouest où une bataille était annoncée pour tenter de récupérer d’autres localités notamment Ghazayat. Le 28 juillet, alors que j’étais déjà de retour à Paris, j’ai appris que les combattants amazighs avaient repoussé les troupes kadhafistes et avaient pu récupérer trois localités.

Madjer, mon guide, ayant observé ma sensibilité au patrimoine qui caractérise la région, m’a offert un véritable voyage dans l’Histoire de l’Afrique du Nord. C’est ainsi qu’il m’a emmené voir, de loin, les villages troglodytes. Il m’a fait visiter un village juif en état de délabrement, un cimetière juif, une mosquée ancienne en état de délabrement également, un temple judéo-chrétien. Il m’a fait visiter un ardjan, une ancienne habitation souterraine où les femmes et les enfants notamment se réfugiaient quand les troupes kadhafistes tiraient leurs GRAD sur les habitations. J’ai même pu visiter Taddart n Iselyan, un musée où sont rassemblés notamment différents objets anciens caractérisant la culture locale.

 

 

 

 

 


Madjer chantant la Libye

 

 

 

 

A l’exception du centre de commandement militaire, je n’ai vu aucune personne porter une arme durant toute ma visite. Les combattants eux-mêmes, en revenant du front, laissent leurs armes au Centre de commandement militaire pour les reprendre lorsqu’ils repartent au front.

 

Sur l’itinéraire qui m’a conduit à Ifrane, je me suis arrêté à Djerba où j’ai rencontré des Amazighs de Libye, principalement de Zwara, réfugiés dans l’île. J’ai longuement discuté avec eux. Du séjour provisoire imposé dans cette ville, ils consacrent leur temps à produire. Ils participent ainsi à la révolution de manière intellectuelle. Ils m’ont présenté le journal Tgrawla qu’ils publient à Djerba et qu’ils font parvenir au pays. Un groupe parmi eux travaille à la réalisation d’outils pédagogiques pour l’enseignement de tamazight. Certains sont déjà publiés, d’autres sont au stade de la réalisation. C’est dans le cadre de la Société nationale de la culture amazighe (Tasetnit tanamurt n tadelsa tamazight) qu’ils effectuent ces travaux. C’est dire à quel point tamazight est au centre de leur combat.

Tamazight langue officielle. A Ifran, les Imazighen ne sont pas dupes : le futur Etat libyen devra décréter tamazight langue officielle. Cela va de soi. Tout naturellement tamazight est utilisée comme langue de travail. A titre d’exemple, l’ensemble des documents officiels du CNT local d’Ifrane sont produits dans deux langues : tamazight et arabe. En prévision du projet constitutionnel que le CNT envisage d’élaborer, plusieurs réunions se sont tenues pour en débattre. La question amazighe a été, naturellement, au centre des débats. Pour Imazighen d’Adrar n Infusen, il est hors question que tamazight soit marginalisée. Son intégration comme langue officielle dans le projet constitutionnel devra être sanctionné. Six organisations de la société civile à Ifran ont soumis au débat un document de deux pages (en tamazight et en arabe) dans lequel ils ont insisté sur la nécessité d’instaurer un Etat moderne basé sur la démocratie, la pluralité. Dans la première ébauche du document, les six organisations estiment que tamazight et l’arabe sont les deux langues officielles de la Libye et qu’elles doivent avoir les mêmes droits dans leur usages dans les institutions nationales.

Négocier avec Kadhafi !! Cela est évident pour tout le monde : pour eux, Kadhafi et sa famille appartiennent au passé et rien, mais vraiment rien, ne peut justifier une quelconque négociation avec ce tyran et ses mercenaires. Les Imazighen d’Adrar souhaitent juste une chose : que Kadhafi voit le pays libre et vivre son amazighité, cette amazighité qu’il a toujours eu la volonté d’annihiler.

Les Kabyles. Les Kabyles et la Kabylie restent un repère pour tous les gens. J’ai été impressionné par le nombre de personnes, même très jeunes, qui m’ont dit avoir été en Kabylie. Lorsque je leur ai dit que j’étais de Kabylie, ils m’ont quasiment tous demandé "d’où exactement en Kabylie ?" Un jeune m’a même dit "Nekki h’udjegh-d di Tewrt n Musa" ("j’ai accompli un pèlerinage à Taourit Moussa, village de Matoub Lounès"). Cette phrase montre en même temps la place qu’a Matoub à Adrar n Infusen mais aussi la popularité d’Oulahlou dans cette région. Cette formule est en effet un passage d’une chanson d’Oulahlou : "La Kabylie". Leur culture kabyle dépasse, j’en suis sûr, celle de nombre de Kabyles de Kabylie.

Mais demeure une équivoque. Imazighen d’Adrar se posent des questions sur le silence des kabyles et la Kabylie devant la situation dramatique qu’ils vivent. En effet, ils ne comprennent pas pourquoi en Kabylie, la population ne s’est pas exprimée publiquement en faveur du combat des Imazighen contre Kadhafi. Ils s’étonnent que les Kabyles n’aient pas dénoncé l’attitude de l’Etat algérien qui soutient Kadhafi et ses mercenaires. Alors qu’ils savent que les kabyles, au delà du soutien de principe qu’ils pouvaient apporter à leur combat, auraient dû saisir l’occasion pour se libérer eux-mêmes. Question de tempo dirais-je spontanément… Je leur ai, bien entendu, promis de transmettre leur message.

Chabane, un Kabyle héros à Zwara. Lors de mon passage à Djerba, j’ai rencontré un groupe d’habitants de Zwara qui a une grande reconnaissance envers Chaabane, un Kabyle installé à Zwara. Il a pris les armes auprès des combattants en tant que berbère. Tout le monde le connaît au pays, il doit avoir la quarantaine. Les combattants libyens ont insisté pour qu’il rentre en Kabylie mais il a refusé et a tenu à rester au front. C’est en quelque sortes notre représentant kabyle au feu des armes.

Musique. Même si les jeunes d’Adrar écoutent beaucoup la musique kabyle, notamment Oulahlou, cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de chanteurs en tamazight à Adrar. Si vous visitez le Centre Media At-Yefren vous repartirez avec une compilation de cinq artistes amazighs de Libye [La Rédaction de Tamazgha.fr s’efforcera de mettre en ligne cette compilation]. Et dans cet article, je vous propose d’écouter la chanson "D Imazighen alamma nemmut" ("Berbères jusqu’à la mort !") de Ali Ftis qui donne une idée de l’engagement amazigh à Adrar.

Il m’est difficile de résumer tout ce que j’ai vécu lors de mon incursion dans ce pays amazigh. Mais, le but ici est d’essayer de partager avec les lecteurs de Tamazgha.fr un peu du bonheur avec lequel j’ai été comblé trois jours durant… et contribuer à faire connaître la situation réelle que vivent les Imazighen d’Adrar qui se battent pour en finir avec le régime de Kadhafi.

Avec ce voyage, je suis revenu déterminé à poursuivre mon action aux côtés des militants de Tamazgha et à redoubler d’efforts pour convaincre de l’urgence pour les autres Imazighen de prendre conscience de la chance historique qui se présente à nous et pour l’avenir de Tamazight. L’Histoire nous en voudra notre indifférence et notre silence.

La mobilisation du plus grand nombre d’Imazighen aussi bien en Afrique du Nord qu’en Europe notamment en France s’impose. Imazighen d’Adrar n Infusen ont besoin de notre soutien et nous avons besoin d’eux. Ce qu’ils sont en train d’accomplir est déterminant pour l’avenir du combat amazigh. En les aidant, nous améliorerons nos chances de victoire dans un milieu hostile à l’amazighité ; et si nous les laissons livrés à eux-mêmes, l’Histoire nous demandera des comptes.

Quant à moi, j’ai promis d’y retourner le plus tôt possible : je ne peux résister à l’envie de vivre en pays amazigh libre et je ne peux rester indifférent aux appels de tous ces combattants libres et décidés de rendre à Tamazght sa dignité.

Je ne peux terminer ce témoignage sans remercier toutes les personnes qui ont facilité mon voyage. Je remercie très particulièrement le Dr. Fethi Bouzakhar, basé à Tataouine. Il a managé mon voyage et s’est occupé de l’ensemble des questions matérielles et logistiques. Youssef Amrou qui m’a accueilli à Djerba. Il m’a été d’un grand conseil. Je n’oublierai jamais qu’avec lui je me suis offert, à contre cœur, un téléphone portable qui finalement m’a été, je l’avoue, très utile lors de mon voyage. Merci à Kamal Boucetta qui a notamment facilité mon séjour à Djerba. Merci Imad Benyahiatène, du village At Uresighen, qui m’a fait découvrir quelques merveilles de l’île amazighe notamment le village d’Iqellalen. Merci à Nouri Nemri, de Matmata.

Que soit remercié Mahmoud contraint à rester trois jours à Tataouine pour que je puisse me rendre à Ifrane. Toutes mes reconnaissances à Mohand et Abdellah avec qui j’ai fait la route Tataouine-Ifran.

Les frères Madghis et Mazigh Bouzakhar qui m’ont encouragé à me rendre à Ifrane. Madjer qui a été mon guide à Ifrane ce mardi 26 juillet 2011 et avec qui j’ai appris beaucoup de choses.

Enfin, je tiens à remercier tous les Libyens qui m’ont accueilli comme un frère.

Masin Ferkal.
 

 

 

 

 

 

Chanson "Imazighen" d’Ali Ftis

 

 

 

 

 

 

Voir vidéos du voyage

 

 

 

 

 


 

Une maison sur laquelle flotte un drapeau amazigh


Avec les jeunes combattants d’Ifrane

 

 

 

 

 


dans la rue à Ifrane

 

 

 

 

 


Avec un jeune combattant

 

 

 

 

 


Belgacem, responsable de "Taddart n Tlelli"

 

 

 

 

 


Un carrefour à Ifrane

 

 

 

 

 


Un jeune combattant de 19 ans, venu de Zwara

 

 

 

 

 


Le centre de commandement militaire d’Ifrane

 

 

 

 

 


Au Centre de commandement militaire d’Ifrane

 

 

 

 

 


Au centre de commandement militaire d’Ifrane

 

 

 

 

 


Au Centre de commandement militaire d’Ifrane avec des combattants

 

 

 

 

 


Dans un quartier à Ifrane

 

 

 

 

 


Avec l’artiste Madjer (à gauche) et Mazigh Bouzakhar (à droite)

 

 

 

 

 


Avec des combattants de Kabaw à un point de contrôle

 

 

 

 

 


Avec Abdellah au poste frontière Dhiba-Wazzen

 

 

 

 

 


Au poste frontière de Wazzen
A un point de contrôle de Lalut

 

 

 

 

 


A un point de contrôle de Kabaw

 

 

 

 

 


Ifran : anciennes maisons troglodytes

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 


 

 

 

 

 


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Notes

 

 

 

 

 

[1] Très vite après le 17 février, la prison d’Ifrane a été attaquée par les jeunes qui ont pu chasser les troupes kadhafistes offrant, ainsi, la liberté à l’ensemble des prisonniers. J’ai pu me rendre compte des conditions inhumaines dans lesquelles vivaient les prisonniers.

Pour le mouvement amazigh, la Libye est un Etat laïc qui ne peut exister sans Tamazight

La récente déclaration constitutionnelle du CNT a suscité beaucoup de commentaires et de réactions. Certaines voix, dans l’opinion dite occidentale notamment, la qualifient de révolutionnaire (inutile de dire jusqu’où ces voix sont prêtes à sortir les grands mots… qu’importe le flacon, pour vu que vous ayez l’ivresse !! Leur dirons-nous).

D’autres voix, au sein du mouvement amazigh cette fois, disent de cette déclaration qu’elle est tout simplement une mascarade !

En réalité, la déclaration constitutionnelle du CNT de Moustapha Abdouldjalil pose les jalons d’une république islamique. Cela est synonyme de la définitive éradication de l’amazighité. Inutile d’insister alors sur le pourquoi de l’acharnement avec lequel ce projet doit être combattu. Il faut barrer la route à ses porteurs avant qu’il ne soit trop tard !

Pourtant Imazighen de Libye, par la voix du Mouvement amazigh, ont fait savoir leur vision du futur Etat libyen. Après de nombreuses réunions tenues à travers plusieurs villes d’Adrar notamment à Jadu et à Ifran, les organisations de la société civile ont rédigé un document par lequel elles livrent les grandes lignes de leur projet pour le futur Etat libyen. Pour ces organisations, la Libye de demain devra être débarrassée de tout obscurantisme ; la Libye de demain ne pourra se concevoir sans Tamazight ; la Libye de demain devra être un Etat moderne respectueux de toutes les libertés ; la Libye de demain ne pourra être autre qu’un Etat décentralisé,…

Le document rendu public par le Mouvement amazigh a été adressé au CNT pour qu’il en tienne compte dans ses débats en vue de la rédaction de la déclaration constitutionnelle. C’était sans compter sur l’héritage dictatorial de certains membres du CNT voulant voir en la chute de Kadhafi l’occasion de concrétiser leur projet d’instauration d’une république araboislamique tranchant définitivement avec les racines amazigh de ce pays…

Non seulement le Mouvement amazigh n’a reçu aucune réponse à ses propositions, mais il a eu la grande surprise de découvrir un projet de constitution en totale contradiction avec ses aspirations.

Nous publions ci-après la version française des propositions du Mouvement amazigh d’Adrar n Infusen.

La Rédaction.


Comment le Mouvement amazigh libyen voit la Libye de demain

Le moment est venu pour construire le nouvel Etat libyen moderne et libre. La conscience intellectuelle qui aspire à la démocratie et au respect de la diversité doit émaner des valeurs humaines universelles comme la reconnaissance et le respect de l’autre, le dialogue et la tolérance afin que nous puissions construire une entente nationale et travailler pour l’intérêt de tous.

Afin de construire prochainement un Etat démocratique qui respecte la liberté, la dignité et l’égalité, nous pensons que le respect des Droits de l’homme est incontournable. Afin de contribuer au débat sur la réalisation de ce projet, nous proposons notre conception concernant la prochaine constitution d’un nouvel Etat libyen démocratique, unifié et libre.

1- La langue amazighe en tant que patrimoine de tous les libyens sans exception, et la langue arabe, sont les deux langues officielles de la Libye. Elles jouissent des mêmes droits et des mêmes privilèges quant à leur utilisation au niveau de toutes les institutions de l’Etat. L’Etat travaillera à la protéger, à la perfectionner et à assurer son utilisation dans tous les domaines. L’Etat veillera aussi à enseigner les langues étrangères les plus utilisées dans le monde afin d’accéder à la science et à la modernité, de s’ouvrir sur les autres cultures et civilisations.

2- Après la libération et la stabilité de la Libye, les symboles de l’Etat doivent être conformes aux dimensions identitaire, historique, culturelle et intellectuelle de la Libye.

3- La Libye est un Etat laic démocratique et souverain, avec un régime constitutionnel et parlementaire basé sur la séparation souple et équilibrée des pouvoirs (législatif, judiciaire et exécutif) et la décentralisation.

4- Il est interdit de constituer des partis politiques sur une base religieuse, régionale, ethnique ou tribale. Et de manière générale, sur toute autre base discriminatoire ou contraire aux Droits de l’homme tels que reconnus universellement ;

5- Garantir l’égalité des libertés et des droits politiques, civiques, économiques, sociaux et culturels pour tous les libyens (hommes et femmes). L’Etat veillera à garantir et à protéger l’égalité des chances et le droit à la vie comme premier droit de tout être humain. Donner et garantir les mêmes chances aux personnalités, coalitions et courants politiques afin d’exprimer librement leurs idées et conceptions dans le cadre d’un dialogue serein, pacifique, démocratique et conforme à la loi aussi bien au niveau des droits que des devoirs.

6- Garantir la liberté d’existence sous toutes ses formes -intellectuelle, d’opinion, expressive- à travers toutes les formes de création, de diffusion et d’édition.
 

Vive la Libye – La Libye libre

Mouvement culturel amazigh,
Le 12 août 2011.





 

Constitution libyenne : la société civile d’Adrar n Infusen répond au CNT

En réaction à la publication de la déclaration constitutionnelle du CNT, des organisations de la société civile amazighe d’Adrar n Infusen ont rendu public, en date du 18 août, un communiqué par lequel elles affirment leur attachement à l’amazighité de la Libye. Selon Imazighen d’Adrar, il n’est pas question de négocier ce fait historique qui n’a besoin, par ailleurs, de la reconnaissance de quiconque. Par ce communiqué, Imazighen de Libye réitèrent leur vision de la Libye post-kadhafi et rappellent au CNT de Benghazi qu’ils tiennent à une Libye libre débarrassée de tout obscurantisme. Il ne peut donc y avoir aucune place pour une constitution discriminatoire à l’égard de l’amazighité. En somme, pas de Libye sans Tamazight !

Pour ceux qui pouvaient encore en douter, les Amazighs de Libye ne sont pas dupes. Leur détermination à redonner à l’amazighité la place qui lui revient de droit sur sa terre est inébranlable. Le CNT devra donc revoir sa copie de déclaration constitutionnelle s’il veut compter avec eux.

Le Mouvement amazigh à travers l’Afrique du Nord n’a-t-il pas intérêt à soutenir Imazighen de Libye et leur exprimer sa solidarité dans ce combat qu’ils mènent pour leur liberté ? Surtout qu’ils ont à faire face au rouleau compresseur arabo-islamique prêt à tout pour combattre toute initiative visant à remettre en cause sa suprématie en Afrique du Nord. C’est dans l’intérêt de l’ensemble de Tamazgha que d’être aux côtés des combattants de la liberté d’Adrar n Infusen.

Ci-après nous publions la version française (traduction libre) du communiqué.

La Rédaction

 

 

 

 

 

 

Communiqué

 

 

 

 

 

 

Étant donné que Tamazight n’a été imposée après une quelconque conquête, colonisation ou brassages culturels, elle est une langue nationale qui n’a pas besoin de la reconnaissance de qui que ce soit. Tamazight est la langue nationale des peuples de l’Afrique du nord. Le peuple amazigh qui vit sur cette terre depuis des temps immémoriaux en a fait usage depuis toujours.

Les recherches historiques et anthropologiques ainsi que les traditions toujours observées de nos jours prouvent ces réalités.

La constitutionalisation de Tamazight en tant que langue, culture, identité et civilisation est une revendication fondamentale de la mouvance amazighe en Libye. Elle le restera. Le Mouvement amazigh n’admettra pas sa remise « au calendes grecques ». Le mouvement amazigh exige également l’intégration de Tamazight dans toutes les institutions publiques ainsi que dans la vie quotidienne en tant que l’un des fondements de l’identité nationale. Tamazight est une responsabilité nationale et un bien commun de tous les Libyens sans exception. Seule son inscription dans la constitution garantira sa protection.

Les organisations civiles d’Adrar n Infusen,
At Yefren, le 18 août 2011.

- Lire le communiqué en arabe sur Ossanlibya.org
 


 

 


 

 

 

La dérive du CNT : un projet constitutionnel discriminatoire

Alors que les Berbères à l’Ouest multiplient les fronts pour libérer Tripoli et faire tomber le tyran, les Arabes à l’Est, au chaud depuis quatre mois après la libération de Benghazi par la coalition occidentale, ils veulent sceller un avenir arabo-musulman à la Libye au mépris de l’identité ancestrale du pays.

 

 

Il n’est pas besoin d’aller loin dans la lecture du projet constitutionnel du Conseil national de transition libyen (CNT) pour savoir "de quel bois il se chauffe".

C’est "au nom de dieu clément et miséricordieux" que le CNT ouvre l’introduction de ce projet. La couleur est bien annoncée…

L’article 1 relève du classique des Etats arabo-islmaiques en place en Afrique du Nord. En effet, les hommes de Benghazi tiennent à bien préciser que la religion du futur Etat libyen sera l’islam et sa langue officielle est l’arabe. Prenant les gens pour des dupes, ils rajoutent que les droits linguistiques et culturels de l’ensemble des composantes de la société libyenne seront préservés. Plus grave encore, il est dit que la source principale de la législation libyenne sera la’ chariεa… « Attan a baba twaγit » comme dirait l’autre, en kabyle… Cet Etat musulman s’engagerait à garantir aux non-musulmans la liberté de pratiquer leurs droits religieux ainsi que le respect de leurs systèmes de statut personnel. Le refrain est déjà bien connu !

En résumé, il s’agit d’un travail arabe fait pour des Arabes… Et aux non-Arabes, ils disent "circulez il n’y a rien à voir ! ". Pourtant, nous avons beaucoup entendu depuis le début des révoltes en février qu’en Libye "il y a des Arabes et des Berbères et tout le monde doit jouir de ses droits". Ce qu’oublient ces Arabes de Benghazi c’est que combat n’est pas encore terminé…

Ils se disent vouloir construire un Etat garantissant les mêmes droits à tous les Libyens, alors que leur premier acte est méprisant en n’accordant aucun statut à la langue des Berbères, la langue la plus ancienne en Afrique du Nord, la seule langue historiquement légitime dans cette région.

S’il n’y avait pas l’œil occidental sensible aux droits de l’Homme et aux libertés, même les formules, par ailleurs creuses, qui évoquent le respect de droits, seraient absentes dans ce projet.

Tout ça pour ça ! On croyait vraiment qu’il y avait un peu d’intelligence parmi ces rigollots de Benghazi ! Mais là, ils viennent de dévoiler leurs véritables intentions envers l’amazighité. Il n’est pas exclu d’ailleurs que la staff de Benghazi ait bénéficié des conseils des Qataris !

Le moins que l’on puisse dire c’est que les arabo-musulmans ne perdent pas le nord (ou plutôt l’Orient !). Tout doit s’effacer devant l’islam et l’arabe. Reste à savoir si les Imazighen de Libye accepteront cette mascarade et se plieront à la volonté du CNT ?!

Ceux de Benghazi qui ont vu leur cité libérée par la coalition à la tête de laquelle la France n’ont pas fait le moindre pas en dehors de chez eux (Certes ont-ils imité leurs "voisins") mais depuis quatre mois, ils attendent que l’Otan déloge le tyran de Tripoli, alors que les Imazighen à l’ouest lorsqu’ils ont libéré leur pays, ils ont organisé l’offensive sur Tripoli et ses environs. Pourtant, l’intervention de l’OTAN est arrivée tard dans cette région. Alors que les Berbères se battent pour la libération totale de la Libye, les pantins de Benghazi "réfléchissent", au chaud, à l’avenir de la Libye… et quel avenir ? Un avenir arabo-musulman régi par la chariεa. Et le tout au détriment des Imazighen (Berbères).

Il nous reste à dire qu’il s’agit là d’un projet de constitution concocté par le CNT et n’engage que le CNT. Mais est-ce que ce dernier est vraiment représentatif de l’ensemble des Libyens. En l’occurrence par ce projet constitutionnel, il vient de prouver le contraire.

Imazighen accepteront-t-ils ce projet ? Accepteront-ils que les pseudo-Arabes décideront seuls sur l’avenir de la Libye ? Cela semble peu probable : ne disent-ils pas que la nouvelle Libye ne se fera jamais sans Tamazight. Les jours à venir nous le diront.

En tous cas, si le CNT souhaite continuer à représenter l’ensemble des Libyens, il va devoir revoir sa copie.

Positivons, et disons que cette occasion de rendre public le projet de constitution a le mérite de dévoiler les véritables intentions du CNT et des hommes de Benghazi quant à leur vision du futur Etat libyen. Et là, au moins nous savons à qui nous avons à faire. Imazighen auront à redoubler de vigilance et élaborer une stratégie adéquate afin que l’avenir ne se fera pas à leur détriment.

En ces moments difficiles, Imazighen de Libye ont plus que jamais besoin du soutien et de la solidarité de l’ensemble des Imazighen pour mener leur combat qui s’annonce sur plusieurs fronts.

La Rédaction.
 

 

 

 

 

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