(Publié en janvier 2013)
(Le Caire, dans les années 50)
L'intimidation opérée depuis quelques temps, et illustrée par cette campagne liant "islamophobie" à un "délit" -comme s'il s'agissait de racisme, comme si l'islam était une race, empêche toujours le débat démocratique et donc se situe plutôt dans l'horizon totalitaire qui parfois explose, littéralement, aujourd'hui dans le pays Touareg dominé par les arabo-musulmans ; pourtant, il est possible de critiquer, en démocratie, tout discours y compris sacré ; le récuser fait que l'on se situe d'emblée hors champ, y compris de celui de cet islam du Xème siècle qui admettait des discussions avec la philosophie grecque, les religions juives et chrétiennes (infra) ; mais depuis domine l'idée de rendre tout débat impossible comme on le voit à nouveau ces temps-ci.
Admettons pourtant qu'une critique de l'islam soit à nouveau recevable comme naguère, y compris par les plus intransigeants : comment? En leur rappelant que sur le plan théologique l'islam se distingue du christianisme en niant non seulement le caractère divin de Jésus (le judaïsme aussi le nie) mais en réécrivant toute l'histoire du monothéisme jusqu'à poser que Dieu empêcha le bras d'Abraham de s'abattre sur Ismaël alors qu'il s'agit d'Isaac, ou de considérer que Adam se mit à réciter les noms d'animaux alors qu'il les inventa. Or, est-ce que le fait d'indiquer que l'islam remet en cause ceci, voire ce qu'il y a de plus sacré dans les autres religions, fait de cette constatation une diatribe raciste ? C'est l'inverse qui est vrai : en empêchant de comprendre pourquoi l'islam recule à partir au fond de la victoire des Normands en Sicile, à Lépante par Venise, et devant Vienne ; qu'est-ce qui a fait que la puissance ne suffit pas pour devenir Athènes ou Rome ? Sparte à la rigueur (et encore, n'oublions pas qu'elle vainquit la Perse) ; et pourquoi dans ce cas les théologiens musulmans du 14ème siècle (BJC) tel que Cheykh al Islam Ibn Taymiyyah décidèrent de combattre la philosophie.
Justement ! admettons que la philosophie veuille sa revanche, par exemple que l'on ne soit pas religieux au sens institutionnel ; l'islam reste tout autant critiquable mais comme système politico-juridique qui concentre tous les pouvoirs dans les mains du Commandeur des Croyants sans que l'on puisse contrebalancer la puissance par l'autorité de la connaissance et par la discussion. Al-Farabi (Turc) a bien montré cela (voir "Philosopher à Bagdad au Xème siècle", Seuil, 2007) mais c'était encore au temps "mu'tazilite" (et "hanafite") qui reconnaissait que le Coran avait été "créé" et non pas "incréé" c'est-à-dire intouchable. Aujourd'hui un Al-farabi aurait été abattu bien sûr, non pas par un djihadiste nécessairement mais par un de ses sbires prosélytes du politiquement correct à la française qui considère que toute critique est blasphématoire (ou "aliénante") puisqu'il s'agit de dériver au-delà de la critique comme le disait Lyotard, le pape de la postmodernité, c'est-à-dire rechercher un discours sans démonstration, un cours sans dissentiment, désignant et scellant le cour des choses, au profit de quelques-uns, mais de cela il faudrait (sollen) le taire. Eh bien non.