980 jours se seront en effet écoulés entre le premier rapport de l’A.I.E.A. dénonçant le non-respect des règles de non-prolifération par l’Iran et la première saisine du Conseil de sécurité sur la question le mois dernier. Et alors que les preuves des transgressions iraniennes s’accumulent, comme le souligne ce rapport attendu de l’A.I.E.A. paru samedi 29 avril, et que le président iranien multiplie les appels à la destruction d’Israël et se gausse ouvertement des injonctions et possibles sanctions onusiennes, le monde, bien qu’émergent de sa torpeur inconsciente et/ou candide, tergiverse encore sur le bien-fondé d’un recours à la coercition, diplomatique ou armée.
Il est vrai que l’absence de preuve irréfutable joue en faveur de la théocratie islamique qui clâme auprès de qui veut l’entendre que son programme nucléaire ne vise que des objectifs purement civils. Mais l’existence d’un programme clandestin avancé, que le rapport de l’A.I.E.A. susmentionné vient de “révéler“, conforte l’hypothèse déjà solide de futures applications militaires. Le 22 janvier dernier, des images satellites avaient déjà dévoilé que l’Iran avait secrètement étendu ses installations de production sur le site de Natanz, site dont l’existence avait elle même été révélée en 2002 par un mouvement d’opposition au régime iranien. D’autres images, diffusées il y a quelques semaines, montrent également que la construction du réacteur à eau lourde d’Arak se poursuit à un rythme régulier, au mépris des injonctions de l’A.I.E.A. . Plus récemment, le président Ahmadinejad a déclaré la semaine dernière que les scientifiques iraniens étaient en train de tester des centrifugeuses de type P-2, bien plus efficientes que celles de modèle P-1 acquises auprès du Pakistan il y a 10 ans. L’intention de l’Iran d’installer prochainement 3.000 centrifugeuses est également fortement préoccupante – 1.500 centrifugeuses fonctionnant conjointement permettraient en moins d’un an de produire suffisamment de combustible pour la fabrication d’une bombe atomique.
Le site Vital Perspective liste ainsi les avancées dissimulées par le régime perse à l’A.I.E.A. :
1- Construction d’un complexe pilote d’enrichissement de l’uranium
2- Construction d’installations d’enrichissement à grande échellle
3- Construction d’installations permettant de convertir le minerai d’uranium en gaz héxafluoride d’uranium pouvant ensuite être enrichi pour créer des armes atomiques.
4- Construction d’un réacteur à eau lourde utilisable pour la production de plutonium à usage militaire sans maîtrise préalable du processus d’enrichissement.
5- Importation de plans et composants de centrifugeuses utilisables pour l’enrichissement d’uranium
6- Importation d’1,8 kg de minerai d’uranium et expérimentations sur la séparation du plutonium.
7- Expérimentation sur le polonium (un isotope radioactif utilisé pour déclencher et augmenter les explosion nucléaires)
8- Importation de manuels détaillant le processus de militarisation de l’uranium hautement enrichi.
Que dire enfin de l’achat récent à la Corée du Nord de missiles balistiques BM-25 d’une portée de 2.500 km capable de transporter une charge nucléaire? Les missile Shahab 3 et Shahab 4, développés par l’Iran, n’ont en comparaison qu’une portée respective de 1.300 et 2.000 kilomètres. Cette acquisition met donc une partie non-négligeable de l’Europe centrale et orientale à portée de tir.
Il est donc bel et bien temps pour le monde de réagir avec force pour signifier au régime théocratique iranien que s’il continue sur cette voie, il devra en payer le prix. Mais pour l’heure, tandis que les aiguilles tournent, la désunion semble être de mise au sein de la communauté internationale quant à la conduite à tenir. La Chine, soucieuse de sécuriser ses importations en hydrocarbures, et la Russie, dont l’Iran est un client important, sont, pour le moment, opposées à toute forme de sanction. Les puissances européennes, Allemagne et France en tête, bien que désormais convaincues de la mauvaise foi du régime des ayatollahs, ne paraissent guère plus enclin à s’engager sur la voie de la coercition.
S‘il advenait néanmoins, en raison de l’inflexibilité de Téhéran et de préoccupations sécuritaires, que le monde s’unisse, deux solutions de sortie de crise devraient être éliminées. Un recours prolongé à des sanctions uniquement économiques et diplomatiques, tout d’abord, qui risquerait de s’avérer totalement inefficace. En effet, de telles mesures renforceraient certainement la détermination de la théocratie iranienne et pousserait cette-dernièrecette-dernière à accroître le rythme de développement et de production de son programme nucléaire. Par ailleurs, le cas de l’Inde et du Pakistan démontre empiriquement qu’il est difficile de maintenir de telles sanctions à l’encontre d’une nation du “club atomique“. Ensuite, il ne faut surtout pas céder à la tentation du marchandage dont l’exemple Nord-coréen prouve clairement les limites et l’inefficacité. Le passé de l’Iran en matière de non-respect de ses engagements et de transparence conforte en outre cette opinion.
Le recours à des sanctions économiques et diplomatiques potentiellement suivies d’une intervention militaire semble constituer la seule option crédible devant l’obstination iranienne. Une telle décision serait néanmoins lourde de conséquences tant le pouvoir de nuisance de l’ancienne Perse est important. Que ce soit en Irak ou au Proche-Orient, en Europe ou aux États-Unis, les représailles seront sanglantes. En outre, bien que craint et détesté par les dirigeants arabes, le président iranien dispose d’une aura considérable au sein des populations du monde arabo-musulman, qui pourraient bien voir là une attaque contre la oumma et l’Islam tout entier.
La communauté internationale, et tout particulièrement l’Occident, est donc confrontée à un choix extrêmement difficile mais qui se révèlera indéniablement déterminant pour la situation géopolitique internationale. Il est désormais temps de nous poser cette question décisive et d’en assumer la réponse: sommes nous prêts à vivre à l’ombre d’un Iran nucléaire?
Source: Ordre66