23 janvier 2025
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Lutter contre le voile dans l’espace public

Une mère d’élève de ma classe ne tarde pas à exprimer ouvertement son étonnement : « pourquoi voit on tant de femmes voilées dans les sorties scolaires ? ». L’aide maternelle, avec laquelle je travaille et qui n’a pas peur de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas, s’énerve un peu : « Les enfants savent bien que les mamans s’habillent comme ça parce qu’elles sont musulmanes, ils comprennent bien qu’elles sont différentes et que c’est pas drôle pour elle quand il fait aussi chaud ! ». Je ne peux m’empêcher de penser (comme elle sans doute) qu’en acceptant les mères voilées dans les sorties scolaires, l’école contribue à véhiculer une certaine image de la femme, image de la femme soumise, celle qui cache sa féminité, celle qui souffre en silence. Un malaise partagé s’installe.

Vivement intéressée par notre conversation qui se voulait discrète, une autre mère d’élève me demande ce qu’il en est de l’application de la loi contre les signes religieux à l’école publique arrogeant qu’il est quand même peut probable que toutes ces écoles en visite à Thoiry ce 13 juin soient (sauf la nôtre) des école privées. Je n’ai pas de réponse. Il n’y en a pas d’officiel. Aucun texte ne stipule que la loi du 15 mars s’applique aussi dans le cadre des sorties scolaires. Il est simplement dit, dans la circulaire d’application de cette loi, que « les directeurs d’écoles ont le devoir de s’assurer des qualités morales et laïques des intervenants ».

Que peuvent faire les enseignants et les chefs d’établissements avec de telles directives ? Laisser les voilées investir l’école publique de peur d’être traités de racistes comme cela a eu lieu à Montreuil par les communautaristes d’ « Une école pour tous » ? Monsieur Brard, député maire de Montreuil avait, en effet, eu l’audace d’envoyer aux directeurs d’école de sa ville, une lettre précisant que « les accompagnateurs des sorties scolaires ne devaient pas afficher leurs croyances » étant considérés, dans ce cadre précis, comme des « agents bénévoles de l’Education Nationale ». En décembre 2004 déjà, plusieurs directeurs d’établissements scolaires de Nanterre avaient été conspués par les mères voilées du Collectif pour la Dignité des Mères Parents d’Elèves (CDMPE) qui prétendaient être les victimes d’une discrimination raciste car non admises dans les sorties scolaires.

Moi je dis bravo à ceux qui ont le courage d’intervenir par le pouvoir de leur fonction, qu’ils soient élus, directeurs d’écoles ou simples enseignants, pour empêcher la prolifération du voile dans l’espace public. L’absence de directive précise au sujet de l’accompagnement scolaire, renforcée par la position de la FCPE et des syndicat d’enseignants comme le SNUipp qui se sont opposés à la loi contre les signes religieux, laissent les enseignants démunis et en proie aux pressions des islamistes qui cherchent à investir l’espace de l’école publique dans certains quartiers en faisant admettre que le voile n’est rien d’autre qu’un élément de la diversité culturelle française.

Il est question de bien autre chose que du droit au respect des différences ou de l’aide à l’intégration que les enseignantes pensent apporter aux mères voilées en les faisant sortir de chez elles. Les femmes musulmanes qui ont acquis leur liberté par un combat quotidien contre les traditions et les croyances d’un islam radical qui opprime et asservit ne peuvent comprendre ces discours véhiculés par une gauche communautariste qui fait le jeu des intégristes de tout poil. Et que dire de l’Education Nationale impuissante à faire face aux demandes de soutien formulées par les profs et chefs d’établissements qui subissent intimidations, chantage et lettre d’accusation pour discrimination raciste ? Que de lâcheté ! En tant que femme, en tant que mère et en tant qu’enseignante, je dis qu’il est inadmissible que les choses continuent ainsi. L’école n’est qu’un aspect de la réalité. Je ne supporte plus de voir des femmes, dans la rue, transformées en Belphégor. Je ne supporte plus ces images qui, à l’époque de l’Afghanistan des talibans, avaient ému la France entière.

Aujourd’hui, dans trop de quartiers, elles sont devenues une réalité. Je ne supporte plus de voir des gamines de plus en plus jeunes voilées, et je ne supporte plus l’absence de réactions de la société toute entière, devant ce que je considère une agression contre mon histoire, mes combats, mes valeurs. Est-ce être sévère et injuste d’affirmer que l’islam radical avance en même temps que diminue la surface visible du corps des femmes musulmanes? Des hommes et des femmes ont lutté depuis des siècles pour que l’égalité entre les sexes soient admise comme un progrès universel. Nous n’avons pas le droit, aujourd’hui en France, de laisser, au nom de ces luttes historiques, au nom de toutes celles qui souffrent et luttent en Iran et ailleurs, l’intégrisme religieux prendre le pouvoir sur les femmes. Il faut protéger les femmes musulmanes du port de cet uniforme réactionnaire, et celles qui veulent le porter le font chez elles ou à la mosquée.

Il ne me convient pas que cela soit le seul Myard, député de la droite catholique, qui pose cette question. Je n’ai pas d’illusion sur le maire de Maisons-Laffitte, je connais ses pratiques et sa complaisance avec les écoles privées dans sa ville, et sa conception de la laïcité est celle de Villiers, qui combat l’islam au nom de la guerre des civilisations. Mais qui osera, à gauche, proposer une loi pour limiter le port du voile, l’interdire aux mineurs et prohiber la burka partout en France ? Au nom de la défense et de la dignité de la moitié de l’humanité ? Certains amis me disent que cela serait une laïcité à la turque, et qu’il ne faut pas aller sur ce terrain. Moi, j’amalgame le voile à l’iranienne et les burkas à des tenues militantes et prosélytes, j’en ai marre d’en voir de plus en plus, je ne veux plus être agressée par cela, et j’en ai assez qu’il ne se passe rien autour de ces tenues insultantes pour les femmes.

ReSPUBLICA n°483 – Mardi 20 Juin 2006

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