Mais ce que la romancière décrit ici ne semble guère si improbable, si extravagant, après tout. Des Républiques islamiques existent déjà, comme des lieux où les femmes n’ont d’autre choix que d’être voilées, voire de porter la bourka, d’autres où l’on envoie tout un chacun, adolescents et femmes y compris, se faire exploser pour tuer le plus grand nombre de personnes considérées comme étant l’ennemi. Des pays où la conquête du monde au nom de l’Islam est redevenu à l’ordre du jour.
A cela l’auteur ajoute high tech et coloration communiste, autre forme de fascisme. Avec, par exemple, l’application d’un rigoureux contrôle des naissances.
Le tout décrit un monde déshumanisé, mais qui, pourtant, avait été fondé sur ce qui semblait être de bonnes intentions, qui, on le sait, pavent l’enfer. Monde mécanique qui ne parvient pourtant pas totalement à éradiquer ce qui est humain chez certains. D’où la façon de vivre du cofondateur de la République de Wasa, pseudo élite hypocrite, et c’est ce qui motivera en fin de compte Sana, l’héroïne du roman.
Ecriture fluide d’un livre qui se lit aisément et ouvre des pistes de réflexion.
Editeur : SCALI, roman
RÉSUMÉ DU LIVRE
En 2028, à la suite de la révolution de 2013, le monde musulman est fédéré en Républiques islamiques. Dans la RIP-Wasa, véritable éprouvette sociale, Sana, pionnière de la révolution, est citoyenne modèle. Pourtant elle découvre qu’elle est sur la liste rouge des dissidents. Qui a intérêt à se débarrasser d’elle ? Le commandeur Aziz ? Fatima, sa soeur de combat ? A moins que ce ne soit Mohammed son mari ? Que cache cette insidieuse disgrâce ? En une semaine, du samedi au vendredi, suivons la voie de la sensuelle Sana dans ce ‘Meilleur des mondes d’islam’ aux terrifiantes et poétiques extrémités.
Avant la révolution, on pouvait payer et attendre. A ce prix on s’embarquait sur un frêle esquif pour toucher une autre terre. Mais la situation internationale avait changé. L’Europe, affaiblie mais en pleine reconstruction, n’accueillait plus d’étrangers. Le leader, Erik Hohenzollern, un jeune homme d’une beauté saisissante, avait emporté l’adhésion populaire avec ses concepts de nature et de race. Si l’Europe se reconnaissait officiellement de tradition chrétienne, la laïcité dominait la vie politique et sociale. Certains musulmans choisirent de retourner au pays de leurs ancêtres pour aider la Révolution – on entendit plus parler de ceux-là. Les autres, terrifiés par ce qui se passait de l’autre côté de la Méditerranée, trouvèrent leur épanouissement dans le christianisme, religion ancienne sous-tendue par une véritable philosophie du libre arbitre et de la liberté individuelle. Cependant qu’une branche très tolérante de l’islam, menée par des universitaires réfléchissant à l’application des sciences humaines contemporaines à la lecture des textes fondateurs, se développait en Occident. Descendre vers le sud ? Mais à mille kilomètres au sud de Merchek commençait le plus grand désert que l’humanité n’est jamais connu, jusqu’à l’océan Indien.
Chapitre : Dimanche – Page : 71
Sana se repassait en mémoire les images tragiques de l’histoire : le ghetto de Varsovie, les ratonnades de Paris sous Papon, l’édification du mur de Berlin, le printemps de Prague, Tian Anmen, la guerre de Yougoslavie, les massacres d’Algérie… Un matin, une nuit, l’impensable se produisait, les chars envahissaient la ville, des camions vomissaient des militaires, le contrôle devenait systématique, la liberté disparaissait et la parole mourait. Un nouveau mur de la honte pouvait s’élever dans les jardins et les esprits. Les censeurs et autres coupeurs de têtes étaient peut-être déjà là, embusqués dans les forêts d’eucalyptus, prêts à voler à tous ces gens leur Révolution, celle pour laquelle ils avaient été prêts à sacrifier leur vie, jadis.
Chapitre : Lundi – Page : 75 –
Le contentement. C’était une notion que le Commandeur développait longuement dans son ‘livre jaune’. Un concept qu’on étudiait dès la maternelle. Le contentement, écrivait le Commandeur, était ‘cet état de repos mental et physique dans lequel le sentiment du devoir accompli vous plonge, sans qu’aucune question ne vienne ébranler l’édifice absolu de l’état des choses et des actes particuliers et collectifs ayant contribué à y arriver’. Le contentement, c’était aussi une ‘anesthésie générale de l’esprit critique, cet esprit tapageur qu’il fallait faire taire en nous, par tous les moyens’.
A ceux qui n’arrivaient pas à atteindre le contentement, il conseillait en premier lieu la prière : remettre son ‘moi’ au divin, lui faire transcender les limites du matériel. Nous n’étions pas maîtres des choses – une force supérieure guidait nos actions individuelle et collectives. Le contentement exigeait la soumission. Au cas où la prière ne suffisait pas, il était conseillé de passer à une danse tournante sur un pied accompagné d’un chant scandant le mot ‘con-ten-te-ment’. Le contentement ne craignait pas le ridicule.
Chapitre : Jeudi – Page : 134 –
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