La totalité de l’interview de l’Express vaut d’être diffusée.
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Voici quelques extraits :
Dans votre livre, Insoumise (Robert Laffont), vous écrivez ceci: «Depuis l’assassinat de Theo Van Gogh, je suis intimement convaincue que la seule manière de formuler mes critiques repose sur une parole libérée.”
Parler librement est en effet le seul moyen de mettre au jour le fardeau de l’islam, et d’abord pour les musulmans. Plus on le fera, plus on leur permettra de réfléchir sur leur religion – ce qui est tabou dans l’islam. 1,2 milliard de musulmans ne peuvent voir qu’une seule vérité, celle que le Prophète a permise.
Mais il existe des islams différents, plus ou moins stricts selon les pays…
C‘est une supposition erronée. En Hollande, nous aurions ainsi l’islam des polders, plus consensuel, en Amérique latine l’«islam-salsa», en France un islam… du vin. Ce n’est pas vrai! C’est ce que nous souhaiterions, mais ce n’est pas la réalité. Si on définit l’islam comme la religion fondée par le Prophète et expliquée par le Coran, et plus tard les hadiths, alors il n’y a qu’un seul islam, qui dicte un cadre moral. Cela dit, oui, il y a des musulmans, ici ou là, qui ne veulent pas respecter la totalité des préceptes – les alévis turcs, certains musulmans de France boivent du vin – mais il y a toujours le risque de les voir confrontés à la pression des fanatiques qui les interrogent sur leur observance. Or, ces derniers ne peuvent que gagner, car le Coran est très clair sur les commandements. C’est pourquoi il faut adopter une perspective historique et reconnaître que l’humanité s’est développée et a beaucoup appris depuis le VIIe siècle. C’est à cette condition qu’il y aura un nouveau mouvement.
L’islam ne connaît-il donc pas d’exégèse et de critique interne?
Non, à cause de la figure du Prophète. C’est la raison pour laquelle je suis un danger pour ceux qui veulent me tuer. Car, même si je reconnais qu’à l’époque le Prophète a mis fin à l’enterrement des petites filles vivantes, mis en place un système de protection des pauvres, uni les tribus, créé une immense civilisation, je le mets quand même en cause. Or, à leurs yeux, il est le guide moral infaillible.
Le problème pour vous, c’est l’islam plus que l’islamisme…
Oui. Le problème, c’est le Prophète et le Coran.
Il n’y a donc pas de cohabitation possible entre l’islam et l’Occident.
C’est ce que je dis. Mais la cohabitation est possible avec les musulmans qui peuvent critiquer le cadre moral que la religion leur impose. A tous ceux-là, je lance: «Voulez-vous vraiment suivre intégralement la pensée du Prophète?» Certains musulmans éclairés sont prêts à cette réflexion. C’est ce que je vais dire au recteur Boubakeur, de la Grande Mosquée de Paris. Je ne crois pas en un mouvement qui prétend libéraliser l’islam sans remettre en cause le Prophète et le Coran. C’est absurde. C’est comme redécorer la maison et rester en dehors. La critique de l’islam ne peut venir que des musulmans d’Occident. Car seul l’Occident offre ce contexte de liberté. Si j’avais tenu ces propos dans n’importe quel pays musulman, je serais morte depuis longtemps déjà.
Pourquoi avez-vous quitté le parti social-démocrate pour rejoindre les rangs du parti libéral VVD ?
Parce que la gauche est exactement comme les musulmans! Je voulais mettre la priorité sur la défense des femmes immigrées victimes de violences domestiques. On m’a dit: «Non, ce n’est pas la priorité! Ce problème se réglera tout seul quand les immigrés auront des emplois et seront intégrés.» C’est exactement ce que disent les imams qui nous demandent d’accepter aujourd’hui l’oppression et l’esclavage parce que demain, au ciel, Dieu nous donnera des dattes et des raisins… Je crois qu’il faut défendre l’individu d’abord. La gauche a peur de tout. Or la peur de l’offense entretient l’injustice et la souffrance. La révolution sexuelle, l’affirmation des droits de l’individu, l’amélioration des conditions de vie des immigrés ont été les grandes causes de la gauche néerlandaise. A ses yeux, le simple fait d’appartenir à une minorité aux Pays-Bas vous donne tous les droits. Ce multiculturalisme est désastreux. Hurlez à la discrimination et toutes les portes vous seront ouvertes! Criez au racisme et vos adversaires se tairont! Or, le multiculturalisme est une théorie inconsistante: si on veut laisser les communautés garder leurs traditions, que se passe-t-il dès lors que ces mêmes traditions s’exercent au détriment des femmes ou des homosexuels? La logique multiculturelle revient à accepter la subordination des femmes aux hommes. Pourtant, les partisans du multiculturalisme ne veulent pas le reconnaître. Ce qu’ils disent, c’est que les femmes le veulent elles-mêmes. Bien sûr, c’est faux: l’oppression des femmes vient de leur éducation.
Quelle est votre réaction quand vous voyez que les auteurs des attentats commis au nom de l’islam, en Europe ou aux Etats-Unis, ont été éduqués ici ?
Cela infirme la thèse que la pauvreté est la cause du terrorisme. Cela confirme la séduction du message islamiste. Ce ne sont pas les circonstances qui ouvrent la voie au terrorisme, c’est un choix individuel. Aux Pays-Bas, ce sont de jeunes diplômés passés par de bonnes universités, en passe de trouver de très bons emplois, qui sont allés chercher sur Internet le message fondamentaliste et ont cédé à la séduction totalitaire. Il y a des graines de fascisme dans l’islam. Nous devrions comprendre ce processus. Le choix est simple: soit les intellectuels européens ont le courage de défier les dogmes et la doctrine de l’islam, comme l’ont fait leurs prédécesseurs pour le christianisme ou le judaïsme, soit ils sont prisonniers de l’idée qu’une minorité doit être tolérée et abandonnée à son propre sort. Si cette dernière option l’emporte, nous aurons encore plus d’attentats et nous perdrons de jeunes esprits brillants emportés par la folie du totalitarisme.
Avez-vous le sentiment que le choix se pose aussi clairement dans ces termes pour tous?
Non. C’est pourquoi je le répète. Beaucoup d’Européens s’interrogent aujourd’hui sur la question de l’islam. N’ayez pas peur de la controverse! L’Europe est un continent bâti sur la controverse. La globalisation fait que nombre de jeunes issus du monde arabo-musulman viendront en Europe, même si vous tentez de les en empêcher. C’est une question de démographie. Et ils reproduiront le système. Nous avons tout intérêt en tant qu’Occidentaux à réformer l’islam.