On peut critiquer Bayrou sur beaucoup de choses et ne pas partager, du tout, les considérations naïves d'un Edouard Fillias d'Alternative Libérale voyant en Bayrou un "libéral" alors qu'il est plutôt un social démocrate mâtinée de multiculturalisme et de syndicalisme utopique, même s'il a su intelligemment se gausser de Sarkozy lorsque celui-ci créa l'UOIF…
Mais on peut reconnaître qu'il avait vu juste sur cette volonté de ne pas succomber au centralisme bureaucratique du chiraquisme anti-libéral, d'une part, et cette volonté, d'autre part, de refuser les clivages idéologiques parce que les problèmes ne sont ni de droite ni de gauche mais réels, et qu'ils nécessitent aussi des réponses réelles c'est-à-dire proposant bien plus que des réponses dites objectives autrement dit abstraites ou possibles parce que des réponses réelles cela veut dire des propositions effectives qui font avancer les choses.
Cependant, en partant de cette bonne problématisation Bayrou répond à côté en pensant que c'est plutôt à gauche qu'à droite qu'il peut trouver les bonnes solutions. C'est évidemment loin d'être sûr. Parce que la France a plus besoin qu'on la libère de carcans au lieu du contraire. Ce n'est pas un manque d'Etat qui l'étouffe, mais à la fois un trop et un pas assez d'Etat : un trop d'Etat qui contrôle la santé l'éducation les entreprises et donc maintient trop haut les charges sociales ; un pas assez d'Etat dans la justice, la police, l'armée, la citoyenneté en général par exemple l'intégration la laïcité…
Bayrou a réussi à faire croire qu'il pouvait concilier une stucture de relations sociales basée sur la protection des acquis et un désir de renouveau ; sauf que c'est trop contradictoire, aussi a-t-il échoué à convaincre à la fois les partisans des régimes spéciaux et les chevaliers d'industrie en herbe désireux d'innover.
Que va-t-il se passer ? Soit Bayrou joue franchement la carte social-démocrate et en fait change d'alliance en pensant, naïvement, que c'est par la bureaucratie étatique et syndicaliste que le changement doit passer, ce qui implique dans ce cas un possible tandem avec le PS aux législatives ; soit il admet qu'il a plus de choses à partager avec Sarkozy qu'avec Royal, ce qui lui permettrait de se souvenir que nombre des membres de l'UDF cogèrent avec l'UMP beaucoup de collectivités locales et que les 80 députés de l'UDF ont été élus avec des voix UMP…
Il semble bien que les sirènes à gauche soient trop fortes et que cela soit la première solution qui le tente. Sauf que le PS est tellement emprisonné dans son carcan idéologique paléo-marxiste qu'il va sûrement hésiter à faire le premier pas, ce qui va être tout bonus dans ce cas pour Sarkozy, lui qui a su rallier en plus une partie de l'intelligentsia post soixante-huitarde…
Les tous prochains jours vont être d'un plus haut intérêt…