Régis Debray vient de se fendre d'une énième diatribe contre Israël (le Point en publie les bonnes feuilles), du moins, principe de précaution oblige, d'un certain Israël, et ce pour son bien. Bien sûr. Au nom d'Israël, comme d'aucuns s'agitent au nom de la Terre, ce sieur professe, sermonne, se prend pour une réincarnation de Bernanos matiné de Maritain et de Blondel, ou alors n'est pas Alain ou Valéry qui veut. Ne parlons pas de Hugo, Zola, Balzac. Profitons de l'occasion d'ailleurs pour esquisser un tri.
Il est certes sans doute vain de contribuer objectivement à la décantation historique inéluctable qui de toute façon s'effectue en permanence en indiquant les individus, philosophes, scientifiques, artistes, personnages pieux, fabuleux, qui apportent quelque chose à l'aventure humaine.
Qui se souviendra d'un Debray dans cent ans ? Comparé à un Platon, Aristote, Hegel… Idem pour les Foucault, Bourdieu etc, ou le sous nietzschéisme et le marxisme vulgaire en pack de six, s'horrifiant d'observer qu'il existe du pouvoir de la domination, appelant non pas à les civiliser mais à les supprimer, et toute la sociologie et la philosophie des générations actuelles d'intellectuels sont charpentées de ce bois vermoulu, pas étonnant dans ce cas que les formateurs issus de leurs cours n'ont plus cours y compris dans les cours d'école, chassez le naturel il revient au galop, en pis.
Par contre, et sans spécialement user de l'argument d'autorité, vous n'entendrez guère parler ou peu d'un Raymond Boudon, Jean Baechler, une Chantal Delsol, un Shmuel Trigano, Jean-Pierre Bensimon, mais un peu plus heureusement d'un Pascal Bruckner, d'un Yves Roucaute, d'un Pierre-André Taguieff, pas du tout d'un WVO Quine… Pourtant ces gens tiennent bien la rampe du temps. Même s'ils restent dans l'ombre, (malgré leurs titres académiques, par exemple Boudon, membre d'une dizaine d'académies, Roucaute détenteur de deux agrégations, doctorat etc… Delsol, Baechler, membres de l'Institut…); mais ils ne sont pas estampillés enfants terribles, (ils ne sont pas de la gôche ! celle qui veut raser et baiser gratis) et aussi parce que le phénomène de la répercussion médiatique qui a tant profité aux artistes, aux musiciens particulièrement, donnent de la surface bien plus à l'ivraie qu'au bon grain du fait que ce dernier se tient à distance du spectacle permanent.
Et, comme celui-ci a horreur du vide, il le remplit par exemple avec les Laurey et Hardy de l'entartrage happening, par exemple les Miller et Bonnaud de chez Durand qui, face à la démographe Michèle Tribalat, (une femme qui compte désormais : de plus en plus notre Alfred Sauvy) s'entêtaient à lui asséner que rien n'a changé rien ne bouge concernant l'immigration, Miller s'acharnant à effacer ses propres racines (alors qu'un breton, un corse, en seront fiers, affirmant que la plupart des immigrés actuels veulent devenir français, ce qui est faux, surtout lorsqu'ils sont élevés dans le mensonge.
Il n'y a qu'à voir la manière dont un cinéaste trafique le 8 mai 1945 à Sétif, toute une génération est assise entre deux chaises en réalité : ou continuer à répandre de la fausse monnaie et pérorer chez Ruq-Dur-Ardi-Tad ou alors méditer dans le silence (et un peu d'internet) l'effondrement du radeau France s'enfonçant en même temps que le Titanic Occident.
Rappelez-vous : si l'on en croit BHL (qui s'y connaît en entartrage) : " Il valait mieux se tromper avec Sartre qu'avoir raison avec Aron", on voit bien le résultat, tant BHL, tout comme Finkielkraut (au bout du compte, et sa confrontation si molle avec Badiou, relaté sur ce blog, en fut un exemple), a décidé de raisonner non pas certes comme Debray sur Israël, mais pas si loin que cela au bout du compte (à dormir debout) à savoir nier déjà la nature humaine et donc également l'avidité de puissance des palestiniens. Oslo oublié bien sûr. 1947, acceptation des juifs, refus des arabes, que dire de plus ? 1917, (plan Balfour) aussi, et rien à voir avec la Shoah pourtant. Dès la victoire des nazis en 1933 au fond les nationalistes arabomusulmans ne voulaient plus entendre parler d'une Palestine "multicuturelle"… Qui osera le dire que les palestiniens veulent expulser tous les juifs des territoires ? Septembre 1971, le roi de Jordanie tue 15000 palestiniens, qui s'en souvient ?…On peut continuer à l'infini, même s'il faut se rappeler aussi que Rabin a été assassiné par un juif.
Seulement, Debray, sur Europe 1 ce jeudi de l'Ascension, persiste et signe dans l'ignorance têtue de l'eurocentriste tiersmondiste post-guevariste, en critiquant les organisations juives qui soutiennent Israël, justifiant en quelque sorte le fait que des juifs soient attaqués dans les rues en France (1), demandant même un "dialogue" avec le Hamas, on croit rêver, un Hamas qui massacre les palestiniens du Fatah sans que l'on ne dise rien, comme le FLN algérien massacrait ceux qui n'était pas de son bord. Mais devait-on dialoguer avec Hitler lorsque l'on savait que ce dernier n'en avait cure malgré le change donné à Chamberlain et consorts ? Et pourquoi le nationalisme, le désir de puissance, ne devraient être que l'apanage des Juifs et des Occidentaux ? N'est-ce pas là véhiculer encore le vieil adage antisémite du peuple dominateur? Postmarxisme et rousseauisme voient uniquement la cause du mal dans la propriété privée et l'existence du groupe, on en est encore là (et Mélanchon, nouveau Pivert annone l'ensemble). Debray, comme BHL (qui ne jure que par Deleuze et Foucault c'est dire), comme Finkielkraut (sans Heidegger, qui est-il au fond ?), n'ont rien appris, n'ont rien compris, ce ne sont pas des politiques de toute façon mais des "intello", blablabla, ils ne veulent pas voir que le nationalisme arabe et musulman n'a pas encore fait son bilan critique et raisonne encore en terme de supériorité à la manière nazie, faisons le bilan du monde arabo-islamique, comparons-le avec l'Asie, l'Amérique du Sud, et même l'Afrique, et l'on verra bien quels sont les réels obstacles à un réel développement de qualité.
On sent bien décidément que le tri a commencé, que la page se tourne, et qu'il faut laisser la place aux vrais penseurs, pas aux pseudo intellos de pacotille. Mais telles ces étoiles mortes dont la lumière luit encore dans le ciel, leur présence se fait encore oppressante, (on en a encore pour des années sans doute), alors qu'ils n'ont "plus" rien à dire, alors qu'ils sont en réalité de plus en plus des obstacles pour l'émergence, enfin, de la vérité sur cette question (eh hop les hyènes se mirent à ricaner en lisant l'avant dernier mot). Wait and see donc.
Le 13 mai 2010
4 réflexions sur « Régis Debray ou la médiocrité »