Page 94 Jean-Pierre Lledo donne sinon la clé du moins la principale du trousseau (connue par les seuls initiés): le conflit judéo-arabe n’est pas territorial, ne l’a jamais été, Israël a “toujours accepté” le “partage” et ce depuis 1947, ce qui fait que même en revenant territorialement à cette date, la réponse arabe sera toujours non.
Pourquoi ? Le livre de Jean-Pierre Lledo y répond à partir de ce prisme grossissant qu’est devenu le 7 octobre 2023 et fait écho à celui de Shmuel Trigano, Le chemin de Jérusalem, où tous deux soulèvent l’idée, également partagée par Pierre Lurçat, stipulant que nombre d’acteurs en joute, qu’ils soient Juifs ou pas, religieux ou agnostiques etc, visualisent principalement ce conflit à partir d’un prisme imaginaire fantasmé alors que celui du 7 octobre en a montré l’inanité: ce conflit relève très strictement de l’imaginaire politico-religieux en particulier du côté arabe qui le plaça immédiatement sur ce plan à la différence du côté juif empêtré en quelque sorte dans les racines multiformes du sionisme comme l’explique bien Trigano.
D’ailleurs Jean-Pierre Lledo a bien raison de rappeler dans son livre ce que Gilbert Meynier avait indiqué dans son Histoire intérieure du FLN : les acteurs du 1er novembre 54 jurèrent sur le livre musulman et non sur la Charte de l’ONU (analysé également dans Le monde arabe existe-t-il ? Histoire paradoxale des Berbères) impliquant qu’ils voulaient reprendre la colonisation arabomusulmane d’une terre qui n’a jamais été à eux (jamais) appartenant à ces Amazighs qui eurent la malchance de tomber sur la dureté implacable du joug romain que subirent aussi les Juifs (massacrés sous Trajan et Hadrien forcés à l’exil) certains d’ailleurs émigrèrent en terre Amazigh sur laquelle ils étaient déjà présents apportant aussi le christianisme aux Berbères pour certains d’entre-eux…
Jean-Pierre Lledo, issu de cette tradition juive, a relaté toute cette histoire dans ses films témoignages, et surtout en est arrivé à cette conclusion partagée également par Trigano et Lurçat: la colonisation arabomusulmane, à la différence des autres colonisations qui peuvent disparaître, parce que succombant aux contradictions internes et aux pressions externes, n’abandonne, elle, jamais; car sa singularité consiste à sacraliser chaque pouce de terrain conquis en faisant corps avec lui intégré inséré assimilé (à la façon des Borgs) dans un “moi islamique” fantasmé ; à la fois irréaliste car il ne gagnera jamais (il est même en régression contrairement aux apparences) et, en même temps, très réaliste à voir les km de tunnels sous Gaza et, antérieurement, la préparation de l’insurrection en 54 qui fut pourtant vaincue quatre ans plus tard ; De Gaulle lui donnant cependant les clés croyant ainsi arracher le soutien arabe dans sa croisade anti-anglo-saxonne, mais il échoua, 68 sonnant son glas malgré le 31 mai, puis 69 advint ou la fin et aussi le début du fléchissement (à nouveau) jusqu’à la soumission française actuelle via Eurabia...
Qui a été le De Gaulle israélien ? Peut-être Mosche Dayan car au lieu de donner les clés du Mont du Temple aux Jordaniens après la victoire de 67 (“Que faire de tout ce Vatican ?” aurait-il dit…) il aurait dû les confier à ses vrais propriétaires, le peuple Juif, et, là, à ce moment précis du “transfert de puissance” (qui n’est pas seulement un “droit de conquête” puisqu’il poussa même Mehmet II a réclamer la couronne du saint empire à la chute de Constantinople…) Israël se serait affirmé comme ayant retrouvé sa terre que même Mahomet dans ses propos (“peuple d’Israël” dit-il) n’a pas contesté mais dont il voulait la soumission (islam).
Ce “translatio imperii “est donc bien perçu depuis le début par la prégnance politico-religieuse arabomusulmane lorsqu’elle le réclame aux Juifs (qu’elle massacre s’ils ne veulent pas, Mahomet le faisant en personne comme le relate le biographe de Mahomet) et aussi elle le réclame aux chrétiens qui eux-mêmes (du moins chez les descendants de Clovis et Charlemagne) se percevaient cependant bien plus comme des continuateurs du royaume de David et Salomon (comme l’indique Luc de Goustine dans sa préface aux six livres de la République de Jean Bodin (p.13) que des remplaçants pur jus comme l’ont exigé les arabomusulmans de tout temps ; d’ailleurs les massacres qu’ils accomplirent sont là pour le prouver : en terre Amazigh malgré Dihya, en Inde (400 millions rappelle Lledo en citant Fernand Braudel, Louis Chagnon avait travaillé,lui, sur l’Egypte) sans oublier leur traite esclavagiste en Europe qui fut bien plus poignante et sanglante en Afrique que la traite transatlantique comme le relate Tidiane N’diaye dans Le génocide voilé (interdit d’enseignement à l’école de “la République” que le Crif, Akadem, continuent à défendre) surtout ceux de plus en plus djihadisés avec Wahhab, puis ce fut autour des Nazis (les deux s’acoquinant par la suite sous le joug du grand-oncle d’Arafat, Husseini, comme le relate également Pierre-André Taguieff...
D’où, décidément, devant l’immensité de ces imaginaires en joute et en lutte perpétuelle, leur réduction à une question de territoire n’est guère suffisante, voire même insultante, d’autant que, comme le relate Jean-Pierre Lledo, jamais les israéliens par exemple sous Olmert n’avaient été aussi loin dans les compromis, toujours refusés par la partie arabe (le livre de Liliane Messika et fabien Guez, la Paix impossible ?, le relate également amplement…).
Quelle solution dans ce cas ?… Reprendre le “Vatican” laissé par Dayan serait un premier pas, au sens non pas de transférer (tout de suite) la mosquée vers Ramallah mais de permettre que Juifs, Arabes, Chrétiens aussi (Jésus discutait avec les docteurs de la Loi dans le Temple alors que ses parents, inquiets, le cherchaient) puissent y prier…
Pensez-vous ! ? Êtes-vous malade ?!!! Hurleront certainement ceux qui ont amené pourtant Israël dans cette impasse (et nous aussi en France et ce de plus en plus puisque ce conflit sert à la recomposition idéologique alliant les contraires de Rivarol/ex-Gud à LFI). Mais quelle impasse ? Le fait de croire comme le soulignent les auteurs cités ici que ce conflit est seulement logique alors qu’il s’avère surtout théologico-politique et par là irrationnel en ce sens où il dépasse toute résolution rationnelle toute détermination d’un “sens” puisqu’il se situe au sein même d’une guerre totale qui n’a jamais fini comme le relatait autrefois l’ancien président Ahmadinejad … D’où la confrontation de plus en plus pressante avec le Hezbollah… D’où le fait qu’Israël (et le monde chrétien) sont de plus en plus à croisée des chemins : soit affirmer pleinement sa souveraineté y compris à l’encontre de l’ONU discréditée comme le fut la Société des Nations, soit accepter une soumission exigée par les djihadistes et leurs alliés néo-léninistes et néo-nazies…