Ayant donc bien voté et ainsi permis à Nicolas Sarkozy d’accéder démocratiquement à la fonction suprême, il restait donc au président de la République à nommer son Premier ministre, ce qu’il fit d’ailleurs sans attendre et visiblement avec plaisir.
Lequel Premier ministre, en l’occurrence le fidèle d’entre les fidèles François Fillon, avait alors la charge de constituer un Gouvernement reserré lui-même chargé d’appliquer les réformes structurelles précédemment annoncées par le président.
Sauf accident imprévisible et surtout incompréhensible, une confortable majorité de droite doit donc être élue au Parlement en juin prochain dont nous attendons, avec une grande impatience, qu’elle vote sans faiblesse la rupture tant promise.
Mais les Français ayant été si longtemps déçus par des promesses dont l’imposture révélée les a finalement laissés exsangues, il est bien naturel que nous fassions montre, sans nul doute aujourd’hui plus encore qu’hier, d’une prudence redoublée.
Certes, je n’ai aucune peine à concevoir qu’il faille attendre que tout soit bien en place avant de porter le moindre jugement de valeur; dans l’intervalle, le Gouvernement est donc tout à fait légitimé à consulter les forces vives de la Nation.
Toutefois, il serait absolument contre-productif d’offrir ainsi, aux uns et aux autres, des moyens ultérieurs de pression dont ils risqueraient alors de faire le plus funeste usage. Et c’est bien en cela qu’à certains signes j’éprouve déjà des craintes fondées.
Pourquoi ? Parce que j’ai l’intuition que la ligne politique choisie par le nouveau pouvoir de droite repose plus sur le consensus que sur une volonté marquée de vraie rupture, comme nous serions réellement en droit d’en espérer l’avènement.
Car il serait catastrophique que le Gouvernement fraîchement constitué ne prenne pas la vraie dimension de la réalité française; en effet, qui peut encore croire de bonne foi que la politique de la France, dans une large mesure, ne se fait pas dans la rue ?
Or, j’ai la faiblesse de penser que, déjà, nos ministres se fourvoient à trop vouloir jouer le jeu avec les mêmes forces qui, prônant et défendant depuis des lustres un statu quo forcené, n’hésitent même plus, pour défendre leurs forteresses acquises, à bafouer les règles de la démocratie !
S‘il ne s’agit nullement de récuser la nécessité, dans une démocratie libre, de garantir leur juste place aux contre-pouvoirs, en revanche, le pouvoir légitime devra sans coup férir éviter de se mettre en situation de rendre piteusement les armes à la chienlit.
C’est donc une forte mise en garde que j’adresse ici à ceux que nous élisons aujourd’hui dans l’espoir que la France recouvre liberté, dignité et prospérité. Car les Français, cette fois-ci, ne supporteront certainement pas que leurs espérances soient trahies.
Librement !