23 mars 2025

Un Festival du cinéma israélien à suivre absolument (up to date)

Israël est très largement vilipendé, on le sait.Tous azimuts. Pour voir la réalité de ce qu'est Israël il faut voir les films que propose du 10 au 16 mars 2010 à Paris ce Festival http://www.isratim.co.il/programme_Isratim_2010.pdf  Une réalité douce amère bien loin des clichés imbéciles et destructeurs, même si l'on en retrouve certains dans une partie des films sélectionnés. Et qui sont l'œuvre de réalisateurs formés en Israël, parfois financés par des institutions israéliennes. Un exemple aussi de la vigueur de la démocratie israélienne. Évoquant ce phénomène, le ministre de la Culture israélien, Limor Livnat, n'a d'ailleurs pas hésité à parler de « trahison. »

Comme nous le montre le film exceptionnel qu'est « Lebanon » de Samuel Maoz, Lion d'Or à Venise, dans les salles actuellement, la guerre, ce n'est jamais ni beau et les soldats israéliens, de jeunes appelés pour la plupart, la mènent comme ils peuvent, avec leur courage, leur humanité, avec tout ce que cela comporte, leurs peurs ou doutes y compris.

Et, pour parler de guerre aussi, ce dixième Festival nous donne l'occasion de revoir le très beau film « Beaufort » de John Cedar, sorti en 2007. Il évoque aussi le Liban, à partir de 1982 jusqu'au départ israélien, présenté comme une faiblesse israélienne par un Hezbollah, mouvement terroriste qui exploita à merveille la détresse des mères israéliennes. Le film, tout en nuances, qui montre la guerre dans son horreur, propose aussi une réflexion en profondeur, loin de tout manichéisme.

L'histoire du pays qui commença souvent avec un idéal socialiste qui se traduisit dans le mouvement des kibbutzim aujourd'hui quasiment disparu est retracée avec tendresse, humour mais aussi cruauté dans un film comme « Eskimos en Galilée, » de Jonathan Paz et ses merveilleux acteurs qui, comme le veut le scénario, ne sont plus de prime jeunesse.

Il y a encore l'évocation de la Shoah, de l'impunité de criminels de guerre ou d'une paix « un jour » avec la Syrie, mais aussi de la société israélienne avec ses bons et ses méchants dans le film d'Ari Folan « Made in Israel. »

Une quantité de films, donc, longs métrages, mini fictions, documentaires, qui reflètent la richesse d'un cinéma israélien de très grande qualité. Yvan Attal, qui parraine cette dixième édition salue d'ailleurs « le développement spectaculaire du cinéma dans ce pays qui malgré les difficultés économiques notamment, a investi dans la production, grâce à l'apport déterminant de coproductions avec la France. »

Il y a également tout un pan du Festival qui donne la parole à des réalisateurs comme Mohamed Bakri, qui a réalisé, entre autres, le film « Jénine, Jénine, » qui avait été déprogrammé d'une diffusion à la télévision française car cette programmation avait provoqué un tollé justifié. Il y prétendait, en effet, que les soldats israéliens auraient perpétré un massacre à Jénine, ce qui avait été clairement démenti par l'ONU. Mohamed Bakri admettait d'ailleurs plus tard avoir pris des libertés avec la vérité.

Trois films ont été choisis pour rendre hommage à Ram Loevy, surnommé « le père du cinéma israélien. »  Celui-ci a réalisé quelque 60 films pour la télévision publique israélienne. Certains n'ont été programmés que bien après leur réalisation, la critique de la société israélienne et d'Israël qu'il y faisait n'étant pas toujours bienvenue. Le très prestigieux Prix d'Israël, la plus haute distinction du pays, lui a pourtant été décernée ce qui démontre, là encore, la nature et la qualité de la démocratie israélienne. Il faut dire que ses personnages et ses scénarios, dans les films choisis pour le Festival, sont loin de tout manichéisme.

Dans « Le Pain, » il montre la réalité d'une couche de la société israélienne particulièrement pauvre. On y voit  le quotidien d'une famille qui vit dans une ville déshéritée comme il en existe dans plusieurs régions d'Israël. Un quotidien difficile avec ses malheurs mais aussi ses bonheurs que bouleverse le licenciement sans indemnité du père, patriarche à l'ancienne qui a pourtant laissé sa fille aînée partir faire des études à Tel Aviv.

« L'Indien au Soleil, » montre les complexités de la société israélienne avec trois personnages principaux, de jeunes appelés venant d'horizons très différents et qui vont nouer des relations déterminantes dans le cadre de l'armée. Il y a l'Indien, issu d'une communauté venue d'Inde, qui vit dans une extrême pauvreté, loin des chemins battus mais pour qui l'honneur est primordial. Un jeune Ashkénaze qui a refusé de devenir officier et a cessé d'être pratiquant, un Séfarade, plus soucieux de respecter l'ordre établi mais est cependant un camarade loyal…

Et enfin « Football en Israël, » documentaire fouillé qui évoque quelques années significatives dans la trajectoire de l'équipe de football de la ville arabe de Bnei Sakhin en Galilée. Cette équipe, qui avait alors un entraîneur et un gardien de but juifs, remporta la coupe d'Israël et représenta l'État hébreu lors de matchs internationaux. Mais cette excellence ne dura qu'un temps, ses joueurs faisant preuve d'une trop grande agressivité sur le terrain. Celle-ci leur ayant été inculquée par un entraîneur appliquant des méthodes préconisées pour amener à la victoire une équipe de football de joueurs juifs subissant l'antisémitisme polonais d'avant-guerre. Ce que ne précise toutefois pas le film est que l'assurance enseignée à ces joueurs juifs ne dégénéra jamais comme ce fut le cas de l'équipe de Bnei Sakhin. Cette assurance qui dégénère amène d'ailleurs le Président arabe du club d'accepter la démission de l'entraineur juif. Le réalisateur présente ici encore une réalité très contrastée et il est intéressant aussi d'entendre les opinions exprimées par certains Arabes israéliens, que ce soit lorsqu'ils rendent Allah responsable de leurs victoires sur le terrain de football ou lorsqu'ils parlent très librement d'expulsions de leurs terres. On regrettera toutefois  que certaines déclarations soient présentées comme des vérités alors que dans des conversations, Ram Loevy reconnaisse, par exemple, que le départ des Arabes d'Israël a été motivé par un ensemble de facteurs complexes, dont l'appel lancé par les dirigeants des pays arabes avoisinant les enjoignant de leur laisser le champ libre pour lancer une offensive et pouvoir ainsi aisément « jeter les Juifs à la mer, » au lendemain du vote de la partition par l'ONU. La présentation de telles affirmations comme vérités pouvant être utilisée que dans des campagnes de delégitimation d'Israël. On peut redouter la même utilisation des seuls propos racistes prononcés dans le film et qui sont le fait de supporters imbéciles d'un club de football juif de Jérusalem, alors qu'aucun propos antisémite tenu par des protagonistes arabes n'est évoqué. Or, l'on sait que tous les Arabes israéliens ne sont pas angéliques.

Le directeur du Festival, Charles Zhrien, se félicite d'avoir anticipé « le succès confirmé aujourd'hui des films israéliens sur les écrans internationaux, » contribuant à « cette reconnaissance en favorisant la découverte de cinéastes talentueux… » Et il note qu'il y a aujourd'hui 17 écoles de cinéma en Israël.

A ce propos soulignons que le film « Ajami » fait partie de la très riche sélection. Co-réalisé par Yaron Shani et Scandar Copti, sélectionné pour l'Oscar du meilleur film étranger, récompense qu'il n'a pas remporté, Scandar Copti, provoquant l'indignation générale, avait déclaré avant la cérémonie qu'il ne représentait pas Israël, ce pays ne le représentant pas selon lui. Yaron Shani s'était démarqué de son co-réalisateur, – Arabe israélien pourtant diplômé du prestigieux Technion – soulignant pour sa part que le film, qui se déroule dans un quartier multiculturel de Jaffa, traite de problèmes de société israéliens, a été tourné en hébreu avec des acteurs israéliens et grâce à une subvention du ministère de la culture israélien.

 

Hélène Keller-Lind

 

Festival http://www.isratim.co.il/

 

Gaumont Opéra, 2 Boulevard des Capucines, M° Opéra ou Chaussée d'Antin Lafayette.

Tous les jours jusqu'au 16 mars inclus. A partir de 13 h

 

Plein tarif : 9;90 €, Documentaires / courts-métrages / table ronde / master class : 6 €
Étudiants / lycéens / plus de 60 ans :
7,40 €, Moins de 12 ans : 4,90 €
Carte 5 places des cinémas Gaumont et Pathé d'Ile-de-France : 7,50 €
7,50 € la place avec la carte 5 places valable dans les cinémas Gaumont et Pathé d'Ile-de-France soit 37,50 €*, valable tous les jours à toutes les séances pendant 2 mois à partir de la date d'achat pour 1, 2 ou 3 places par séance.



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