14 janvier 2025

L’Arctique en avril 2009

Voyons cela (Tous les lecteurs de ce site savent que l'on peut retrouver certains des graphiques officiels suivants, et beaucoup d'autres, dans cette page)

1) L'extension de la banquise (la mer arctique cette année), d'après Jean-Louis Santini de l'AFP, serait "la plus faible depuis les premières mesures satellitaires en 1979"

Comme on le voit immédiatement (courbe en bleu actualisée au 12 avril du NSIDC), il n'en est rien. S'il est exact que l'année 2007 a connu un minimum d'extension, il est clair qu'en cet hiver 2009, la banquise se porte beaucoup mieux. Sans préjuger de l'avenir, on observe que le trait bleu semble plutôt se rapprocher de la moyenne 1979-2000 qui sert de référence. Si on est raisonnable et non alarmiste, on a donc envie de dire que la situation s'améliore. A la même époque, en 2007, il y avait près de 700000 km carrés de glace en moins. Et nous sommes actuellement à quelques 300.000 km carrés de la moyenne de référence. (1979-2000)

Le texte de l'AFP est donc carrément mensonger. L'extension de la glace arctique n'est pas, et de loin, la plus faible depuis les premières mesures satellitaires en 1979. Une consultation rapide des autres observatoires (NORSEX et IARC-JAXA) confirment et même amplifient (dans le bon sens, pour les mesures japonaises) ces observations.

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2) L'épaisseur de la banquise serait la plus faible depuis les mesures satellitaires en 1979, d'après l'AFP. Un peu plus loin, dans son opus, J-L Santini donne des indications selon lesquelles l'épaisseur de glace serait presque partout inférieure à 2,74m…

Notons en passant qu'il est très difficile (sinon impossible) de mesurer directement l'épaisseur de la glace avec des satellites (sauf en mesurant la masse globale par des mesures gravimétriques). Les mesures satellites donnent seulement une indication sur l'existence de différentes couches de glaces déposées chaque année, ce qui peut permettre d'avancer une estimation de l'épaisseur mais sans réelle précision). Nous nous référerons aux outils les plus appropriés qui sont les bouées balises implantées au pôle Nord par la marine américaine (sans doute pour les sous marins). Les données des mesures des bouées sont sur ce site. Les emplacements de ces bouées opérationnelles sont indiquées sur cette carte. Les diagrammes détaillées sont reportés sur ce site. (h/t A. Watts) bouees

Ces bouées portent les noms suivant 2008B, 2008C, 2008D, 2006C etc. mais mesurent bien l'épaisseur de la glace en avril de cette année 2009 (sauf 2008D). Assez malheureusement, les bouées situées les plus au Nord et donc dans une zone où la glace est de moindre épaisseur, soient ont cessé d'émettre depuis quelque temps, soit ne donne que des données fragmentaires. Nous ne pouvons donc nous fier qu'aux mesures transmises par les bouées situées au nord du Groenland ou la glace est généralement plus épaisse. On fait avec ce que l'on a !

Voici, en bref, le résultat des mesures qui figurent sur le site cité ci-dessus. Les variations indiquées sont relatives à la situation actuelle par rapport à celle de l'année dernière, à la même époque.

Bouée 2008B : augmentation de l'épaisseur de plus de 50cm depuis l'automne. Epaisseur : plus de 3 m.

Bouée 2008C : augmentation de l'épaisseur identique à 2008B et épaisseur proche de 4m.

Bouée 2008D : non actualisée depuis février mais montre une épaisseur de 3,5m.

Bouée 2007J : augmentation de plus de 50cm et épaisseur de près de 4m.

Bouée 2006C : augmentation de près d'un mètre et épaisseur de plus de 3m.

La mesure de l'épaisseur s'effectue avec des jauges de température disposées tout le long du support de la bouée. L'épaisseur de la glace est atteinte quand la température atteint -2°C qui est la point de congélation de l'eau de mer. Vous avez d'autres résultats de mesures directes ici et ici. Elles confirment les mesures précédentes. Pour ceux qui sont intéressés voici, à titre d'exemple, le graphe représentant les séries des bouees2températures relevées sur la bouée 2006C.

En ordonnées, la profondeur mesurée en cm à partir de la surface. En abscisse la température des différentes sondes disposées le long de l'axe de la bouée, immergé verticalement

On voit que pour chacune des séries de mesure, la température de la glace croit en partant de la surface et à mesure qu'on se rapproche de l'eau sous-jacente. En effet, la température de l'air sur l'arctique est bien inférieure à celle de l'eau sous jacente qui est de -2°C environ. Comme on le voit sur ce graphique, l'épaisseur de la glace est mesurée à partir de la surface jusqu'au point ou la température devient constante et égale à -2°C.

La courbe en gros points rouges est la courbe du 7 avril 2009. Celle en petits carrés rouges est du 6 avril 2008. Ce graphique montre que la glace est plus épaisse cette année, d'environ 70 cm.

Autrement dit, la totalité des bouées (disponibles) de mesure montrent que l'épaisseur de la glace a augmenté et non diminué depuis un an. Il faut cependant rester prudent avec ce genre d'affirmations car les bouées (qui ne peuvent être attachées) sont entraînées par la dérive générale des glaces de l'artique (voir un petit film ici qui montre la magnifique" centrifugeuse" arctique qui, en 2007, a expulsé les parties englacées vers les mers plus chaudes où elles ont pû fondre entraînant une disparition d'une partie de la glace).

D'autre part et enfin, l'équipe Catlin ( citée ci-dessus) et qui a effectué des mesures directes radars ou (et) forages dans la banquise, a trouvé que l'épaisseur de la banquise fluctuait entre 1,15 et 3;75m (admirez la précision !) sur une distance parcourue de quelques 200km en direction du pôle (voir la carte du trajet ici). Alors et compte tenu de ces observations on peut se demander comment le reporter de l'AFP peut-il affirmer que "l'épaisseur de la glace est presque partout inférieure à 2,74 m" (admirez encore la précision)…Presque partout ? Nous avons de la chance d'avoir trouvé les endroits où ce n'est pas le cas…
Et la suite de l'article est du même tonneau : Alarmisme infondé, mais supposé "payant", "étayé" par des déclarations d"experts" non identifiés… le tout rédigé à la va vite.

Comment est-il possible qu'une agence renommée comme l'AFP en arrive à proférer des affirmations en totale contradiction avec les faits observés ? vont se demander les lecteurs attentifs…

On peut, bien entendu, comme dans le cas des "rayons cosmétiques", imaginer que ces dépêches sont rédigées sur un coin de table par des journalistes incompétents, plus ou moins activistes et peu attentifs. Certes…
Cependant et sans exclure cette possibilité, je pense plutôt que ce journaliste est atteint du syndrome "Gotchaux" (voir ici) qui nous racontait sur France Info, en février 2008, au cours d'un hiver particulièrement glacial pour une grande partie de la planète, que les rennes lapons souffraient de la chaleur… alors qu'un froid intense régnait en Laponie.
Il s'agissait visiblement d'un commentaire plus ou moins recyclé de l'année dernière ou des années précédentes. Une lecture attentive de cette dépêche de l'AFP montre qu'il en est probablement de même pour celle-ci…au mépris de toute évidence scientifique, bien entendu. Les gogos et les journalistes de la presse mainstream n'y voient que du feu. Et bien sûr, Les politiques avalent, sans lever un sourcil, tout ce qui est publié dans le Monde…

Comme de bien entendu, le "journaliste" de l'AFP ne pouvait laisser passer la "crise" de la plaque Wilkin de l'antarctique qui revient chaque année au printemps, comme les hirondelles dans les soupentes de nos étables. Il est vrai qu'il fallait faire vite car le regel des glaces au pôle sud est déjà bien amorcé. Ils sont même un peu en retard. Dans la même dépêche, Santini déclare qu" Aux antipodes, des observations par satellite de l'Agence spatiale européenne (ESA) dévoilées le 3 avril indiquent que le pan de glace "Wilkin" d'une superficie équivalente à la Jamaïque est en passe de se détacher du continent antarctique."

Tiens ? Il disaient exactement la même chose, il y a précisément un an (voir ici) .
Alors, une fois encore, quelle est la situation de l'antarctique en ce début avril 2009 ?
Les lecteurs intéressés par la situation exacte de l'arctique et des raisons qui déterminent son évolution peuvent aller visiter le site de l'International Arctic Research Center (Univ Alaska)

L'Antarctique en avril 2009 ?

Vous trouverez, bien sûr, toutes les données officielles et actualisées sur l'état actuel de l'antarctique en ce mois d'avril 2009 sur la page "indicateurs". dont celle-ci produite par le NSIDC américain (Université du Colorado) qui centralise les données sur les pôles. antaravr09


Comme vous le savez, l'année 2008 a battu tous les records (de l'ère des satellites) (ici en tiretés noirs) d'extension pour la glace antarctique. La courbe en trait continu noir représente l'étendue moyenne de la glace antarctique entre les années 1979 et 2000. C'est ce que l'on appelle "la normale".

Comme vous le constatez, (courbe en bleu) la surface de la mer glacée antarctique est constamment restée au dessus de la normale en ce début d'année 2009, sauf peut-être en février où elle se trouvait très proche de celle-ci. Quoiqu'il en soit, en cette mi avril 2009, la surface actuelle excède d'environ 1 million de km2, la surface normale qui est d'environ 6,8 millions de km2 à cette époque de l'année… Et elle se rapproche peu à peu de la surface atteinte lors du record de l'année dernière.



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Le NSIDC nous fournit aussi un graphique rétrospectif (ci-contre) de l'évolution de l'extension de la glace de l'hémisphère Sud au cours des 38 dernières années. Comme on le voit, depuis près de 40 ans (au moins) la surface de la banquise antarctique augmente continuement.

Il faut savoir que la totalité des variations saisonnières que l'on voit apparaître sur ces graphiques, proviennent de l'apparition et de la disparition des glaces des marges océaniques. C'est donc bien la surface de la banquise qui est représentée sur ces graphes (sea ice extent). Cette surface reflète en général la température des mers environnantes (la température de la mer profonde antarctique est à la baisse comme je vous l'ai indiqué dans cette page).
Bien entendu, et malgré ces graphiques très parlants, certains vous diront que tout cela est conforme aux théories du GIEC parce que plus de chaleur signifie aussi plus d'humidité et donc plus de neige. Malheureusement pour eux, la surface qui augmente sur cs graphiques est celle de la banquise et non point celle de l'intérieur du continent arctique. Ce n'est pas la neige qui fabrique l'essentiel (à l'exception des zones d'écoulement des glaciers) des glaces côtières mais le froid du vent et de la mer sous-jacente. Leur argument ne tient pas !

Mais, dans ces conditions, qu'en est-il de la zone de déchargement des glaciers tels que la fameuse zone Wilkin qui tient en haleine les lecteurs de la presse à grand tirage qui, bien entendu, n'évoque jamais l'augmentation énorme des glaces antarctiques ? volcano

La réponse est toute simple : La Wilkin's Ice shelf dont je vous redonne l'image ci-contre, est une petite langue de glace marquée mais non visible sur cette photo. Elle se trouve sur la bordure de la péninsule Ouest du continent antarctique, qui se trouve être un région riche en volcans (voir cette page) située dans le prolongement de la cordillère des andes américaines qui va jusqu'à l'Erebus (au sein du continent antarctique). C'est dans cette langue de terre tourmentée que se trouvent l'essentiel des glaciers de l'antarctique qui s'écoulent naturellement dans la mer en se débarrassant, sous forme d'énormes blocs de glaces, des neiges accumulées sur les sommets.

Pour expliquer ceci, je ne peux faire mieux que de citer les recommandations de Syun Ichi Akasofu alors directeur et fondateur du Centre de Recherche International de l'Arctique :

" Exiger des mass médias qu'ils cessent d'utiliser des films montrant de gros blocs de glace s'écroulant à l'extrémité des glaciers ainsi que les débâcles au printemps, comme des soi-disant preuves de l'effet de serre anthropique. (Les glaciers sont en fait, des "rivières de glace" dont l'écroulement est naturel et la débâcle au printemps normale; Tous ces événements se répètent ainsi depuis les temps géologiques)" (NDT: ne pas oublier qu'Akasofu fait allusion aux glaciers de l'hémisphère Nord dont la débâcle se fait au printemps et en été).

Autrement dit, le "Wilkin's Ice shelf ", si cher au médias et à l'AFP (voir la même alerte en mars 2008 ici), finira tôt au tard par s'effondrer dans la mer où son sort dépendra des courants marins. Il est fort possible qu'il se morcelle ou se rattache à la banquise présente dans cette région ou encore dérive quelque temps pour se rattacher en un autre point du continent. C'est le sort subi par toutes les sorties d'écoulement des glaciers depuis la nuit des temps. Si cet écoulement ne se produisait pas, les montagnes atteindraient des hauteurs inimaginables, en stockant la neige qui tombe chaque année depuis la nuit des temps et qui ne font jamais. C'est une évidence : il faut bien que cette accumulation de glace provenant de la neige gelée, empilée chaque année, s'évacue de temps en temps. Compte tenu de la nature physique de la glace, cela ne peut se faire que par morcellements successifs en (parfois) de très gros morceaux. Tout dépend de la structure géologique du milieu.

L'ensemble de la "plaque" de mer glacée Wilkin couvre quelques 15000 km2. Cela paraît énorme mais ne représente guère que 1,5% de la masse de glace gagnée par l'antarctique sur la mer environnante en ce mois d'avril 2009. Pourquoi dès lors, les journalistes de l'AFP (et les autres) oublient-ils toujours d'évoquer les 98,5% gagnés et ne parlent-ils, toujours et chaque année, que des 1,5% (pas encore) perdus ? Il faudrait leur offrir une calculette.

J'avais écrit un texte assez proche de celui-ci en mars de l'année dernière (ici) au sujet de cette fameuse plaque Wilkin. Faudra-t-il que je recommence en 2010 ? Hélas oui, sans doute… On peut seulement espérer que le médias se seront un peu calmés après la prochaine réunion de Copenhague en décembre 2009, laquelle doit nous concocter un Kyoyo2. D'ici là, il faut faire chauffer les rotatives, y compris en reprennant intégralement les articles et les photos de l'année précédente… En voici un exemple frappant trouvé ici (où il y en a d'autres)
Pris la main dans le sac, les journalistes du Guardian UK et de l'Observer…!

copie
























 Pensée unique 2009

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