Enorme succès pour une soirée qui a réuni quelque 200 personnes, à la fois inquiètes devant les avancées du « totalitarisme islmamiste, » pour reprendre les termes de Corinne Lepage, mais heureuses de savoir qu’elles n’étaient pas isolées et de pouvoir s’exprimer « sans avoir à craindre de se faire traiter de raciste » comme le dit l’ancien ministre. Voire se faire menacer, comme l’a été et l’est Caroline Fourest, journaliste à Charlie Hebdo et rédactrice en chef de la revue ProChoix – http://www.prochoix.org/ – cible des attaques de Oumma.com, entre autres instances à forte coloration islamiste. D’où, d’ailleurs, l’intitulé choisi pour la soirée : « Nous n’avons pas peur : la liberté d’expression face à l’intimidation intégriste »
« Nous venons de vivre quelques mois intenses sur le terrain de la liberté d’expression et quelque chose est en train de se profiler, » constatait Caroline Fourest, initiatrice du Manifeste des Douze.
Un exemple, « ce député UMP du Gard qui appartient au groupe d’amitié parlementaire avec Dubaï ou le Qatar, et dépose une proposition de loi de 151 mots qui mettrait fin à 100 ans de laïcité et réactiverait le délit de blasphème… » Ou « la confusion à gauche quand le MRAP envisage de porter plainte contre Charlie-Hebdo et porte plainte contre France-Soir » pour avoir osé publier les fameuses caricatures danoises. Qui ont provoqué « les réactions hallucinantes » que l’on sait dans le monde arabo-musulman, alors que dans ce monde, justement, comme elle le souligne « des caricatures antisémites abominables visent des individus de façon raciste. »
Par ailleurs, « c’est un scandale, une honte, la manière dont les Européens ont réagi à cette affaire des caricatures, » martèle Corinne Lepage. Une réaction profil bas, on le sait.
Et il ne faut pas oublier cette autre affaire de caricatures, rappelée par un membre de l’UFAL – http://www.ufal.org/ – et de Respublica – http://www.gaucherepublicaine.org/ – : dans un « café animé »du 20 ème, « La Mer à Boire ,» – http://la.meraboire.com/ – des jeunes gens, envoyés par des moins jeunes, ont cassé pour cause de caricatures anticléricales tous azimuts qui y étaient exposés.
S‘il y a confusion à gauche devant une critique de l’Islamisme prise à tort pour un racisme, il y a également « des passerelles entre la gauche et les Islamistes, » souligne l’écrivain iranien en exil et signataire du Manifeste des Douze, Chala Chafiq qui vilipende par ailleurs, preuves à l’appui, des « chercheurs au CNRS qui soutiennent les Islamistes. » Et elle prend pour exemple des méfaits de l’Islamisme « le régime iranien qui étouffe toute liberté à l’intérieur et réduit des opposant au silence à l’extérieur. » Elle égraine quelques noms parmi « plus de cent personnes mises à mort par ce régime. » Et dit sa peur, non pas des Islamistes, mais lorsque sont « minimisées les avancées des extrémistes, les frontières de la liberté de conscience déplacées, les susceptibilités des extrémistes ménagées. » Il ne faut pas, dit cette signataire du Manifeste des Douze, « perdre les repères fondamentaux. »
A la tribune un ancien président du MRAP, Alain Callès, sort pour la première fois de sa réserve pour dénoncer « la grande dérive » de ce mouvement où se livrent des « combats de personnes, » ou règne « le clientèlisme, y compris électoral. » Et « est aujourd’hui plus contre l’islamophobie que le racisme. » Certes, dit-il, « le mécanisme islamophobe peut toucher une personne arabe, mais si l’on met l’islamophobie sur le plan du racisme, alors on a tout perdu. » Dans la salle, Yvette Roudy, ancien ministre, explique qu’en effet, « il y a habilité perverse d’adversaires qui nous connaissent par coeur et savent sur quel bouton appuyer en disant : ‘comment, vous ne me respectez pas, vous êtes néo-colonialistes, vous nous stigmatisez, vous êtes racistes !’. »
Azar Majedi, autre Iranienne, en exil à Londres, pourfend, pour sa part, le « terme d’islamophobie, un terme inventé et qui n’est pas un racisme. »
Cette offensive islamiste a touché avec succès aussi les Nations unies, avec la Commission des Droits de l’Homme « devenue une machine à lutter contre les laïques » explique Roy Brown, président, entre autres, de l’Union internationale humaniste et laïque – http://www.iheu.org/ . Commission qui vient d’être dissoute pour être remplacée par un nouveau Conseil qui prétend que « les médias ont un rôle important à jouer pour promouvoir le respect des religions. » « Les signes ne sont pas bons…. » commente Roy Brown.
Et il y a une frilosité générales. Comme on le voit avec « les ex-savants religieux et les ex-musulmans qui ne trouvent pas d’éditeurs dans les pays musulmans ou européens par peur d’être taxés d’islamophobie, » souligne Samia Labidi, écrivain et présidente d’AIME – http://www.assoaime.net/index.php-. Qui précise : « il ne faut pas confondre islamophobe et musulmanophobe, » ajoutant, « un athée n’a rien d’inférieur aux croyants. »
Quant aux « gouvernements, il jouent parfois un jeu dangereux » en s’associant avec les Frères Musulmans. Ou entrent dans un jeu qui veut que « la logique économique décide du politique, » comme le note Chalha Chafiq.
Mais, que faire, devant cette offensive ? « Définir un plan d’action, » estime Azar Majedi. Et Yvette Roudy d’en appeler à ce que « lors des prochaines élections la défense de la laïcité soit un thème premier. » Pour Corinne Lepage, « la France et l’Europe ont un rôle crucial à jouer dans ce combat contre le totalitarisme, » en effet. Et c’est là « de la politique au sens noble » qui ne saurait souffrir « aucune lâcheté. » Autre nécessité exprimée par Roy Brown : il faut en finir avec « le mythe de la tolérance islamique » et ne jamais perdre de vue le rôle primordial de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. » Ni oublier, et ils seront plusieurs à le dire, que les femmes sont les premières victimes des islamistes, tout comme les musulmans. Autre impératif : pouvoir critiquer l’Islam, comme le font d’ailleurs certains musulmans.
Quant à ce qui se passe sur le terrain il faut, dit Caroline Fourest, « que les élus redeviennent politiques, qu’ils sachent avec qui il sont censés parler, alors que des associations citoyennes crèvent de faim. » Il faut « interdire tout endoctrinement » dit Azar Majedi, et se montrer vigilant en ce qui concerne la construction de mosquées pour s’assurer qu’elles ne soient pas aux mains des islamistes, souligne Caroline Fourest qui estime, par ailleurs qu’elles n’ont pas à être financées par les deniers publics, qui ne financent aucun autre type d’établissement religieux,
Lueurs d’espoir, mis à part la détermination et la volonté de faire front commun exprimée par les participants : comme le dit Chala Chafiq, « il y a en France l’expérience très intéressante de la laïcité. » En effet, « on a gagné pour la loi sur les signes religieux et ce n’est pas rien, » ajoute Caroline Fourest. Et cette Fondation pour les Oeuvres de l’Islam peut s’avérer très positive, « à condition que l’on sache si l’argent recueilli financera une mosquée libérale ou une mosquée intégriste. »
« Il faut nous organiser quelques soient nos histoires pour défendre ce qui est essentiel à la survie de nos valeurs, » concluait Corinne Lepage.