1 juin 2023
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La négation de la Shoah dans l’idéologie et la stratégie du régime iranien

Nier la légitimité d’Israël


Nous pouvons distinguer deux buts essentiels. Le premier est le refus de toute légitimité à la création et à l’existence de l’Etat d’Israël en tant que refuge assurant aux Juifs la sécurité après la Shoah. Pour atteindre ce but, Ahmadinejad affirme qu’il n’y a jamais eu d’Holocauste et que si les Juifs ont bien été touchés durant la Deuxième guerre mondiale – une affirmation devant être vérifiée au moyen de recherches approfondies -, ils ne l’ont pas été plus que les autres. En aucun cas, le “mythe” de l’Holocauste ne peut justifier la création de l’Etat d’Israël en Palestine.

L’élimination de l’entité sioniste – l’Etat d’Israël


Le deuxième but est – ainsi que le déclare fréquemment Ahmadinejad – d’”effacer Israël de la carte.” Ahmadinejad est conscient du fait que tant que le monde gardera en mémoire la Shoah, il rejettera toute tentative visant à perpétrer un nouveau génocide juif. Pour effacer Israël de la carte, il est donc indispensable d’effacer la mémoire de la Shoah. Il s’agit donc d’un négationnisme planifié et prémédité

Diabolisation


Effacer la mémoire de la Shoah peut se faire qu’en diabolisant les Juifs et l’Etat d’Israël. La diabolisation est une condition au génocide. Nous nous souvenons qu’Hitler avait entamé une importante campagne de diabolisation des Juifs avant de passer aux exterminations de masse. Ahmadinejad et le régime iranien font de même en menant une virulente campagne antisémite de démonisation.

La télévision d’Etat produit des séries allant dans ce sens. Celles-ci recourent aux calomnies bien connues, accusant les Juifs d’incorporer du sang d’enfants non juifs au pain azyme de la Pâque juive ou d’enlever des enfants non-juifs pour voler leurs organes. Les Juifs sont décrits comme des sous-hommes, des singes et des porcs. Ils sont représentés dans ces séries en train de persécuter le prophète Mahomet par des pratiques vaudous ou de torturer une figure historique rappelant Jésus sur la Croix. Ce ne sont là que deux exemples parmi beaucoup d’autres.

Il convient de souligner que ce phénomène est contrôlé au plus haut niveau par l’Etat. Il est révélateur que la première apparition publique d’Ahmadinejad après son investiture fut donnée devant des réalisateurs de séries télévisées.

Tout cela est entrepris afin de diaboliser les Juifs et Israël, ce qui, comme je l’ai dit plus tôt, est une condition à leur élimination. Il n’est toutefois pas possible de diaboliser un peuple considéré comme victime de la Shoah. Tant que les Juifs seront perçus comme les victimes de la Shoah, cette diabolisation ne pourra prendre racine. Nier l’existence de la Shoah est donc une nécessité, visant à ôter aux Juifs leur statut de victimes.

C’est pourquoi ces trois éléments, liés entre eux, que sont la négation de la Shoah, l’élimination de l’Etat d’Israël et la diabolisation des Juifs, ne cessent de revenir dans les déclarations d’Ahmadinejad et d’autres hauts responsables iraniens.

Il est vrai que ces trois éléments ont été énoncés séparément dans les médias. Le fait de les entendre réunis, dans le contexte que je viens juste de définir, nous permettra de comprendre leur fonction et leur signification dans le cadre de l’idéologie et de la stratégie du régime iranien.

Dans un discours bien connu donné le 23 octobre 2005 lors de la conférence iranienne ayant pour thème “Le monde sans le sionisme”, Ahmadinejad a exposé ses vues sur l’Etat d’Israël, le qualifiant de mal absolu et d’instrument de l’Occident pour dominer les musulmans. Répondant à ceux qui demandaient s’il est possible de vivre dans un monde sans Amérique et sans sionisme, il a dit : “Autant que vous sachiez que ce slogan et cet objectif sont réalisables et pourront très certainement être atteints.”

P
lus loin dans son discours, il a cité Khomeiny en ces termes : “Ce régime qui occupe Qods (Jérusalem) doit être supprimé des pages de l’histoire.” Commentant cette phrase de son mentor spirituel, Ahmadinejad a déclaré : “Cette phrase est pleine de sagesse. Le problème palestinien n’est pas un problème sur lequel nous pouvons faire des compromis.” Plus tard, il a précisé : “Très bientôt, le monde islamique sera purgé de cette tâche de honte (Israël) qui se trouve en son sein. Cet objectif peut être atteint.” Ce discours a clairement annoncé l’objectif final : l’élimination d’Israël.

Lors de la réunion de l’Organisation de la conférence islamique, intervenue à la Mecque début décembre 2005, Ahmadinejad a émis des propos révélant clairement le lien existant entre l’élimination de l’Etat d’Israël et la négation de la Shoah : “Certains pays européens s’entêtent à affirmer qu’Hitler a brûlé des millions de Juifs opprimés dans les fours crématoires. Ils insistent si fort que si quelqu’un prouve le contraire, ils le condamnent et le jettent en prison. Bien que nous n’acceptions pas cette affirmation, admettons qu’elle soit véridique et demandons aux Européens : est-ce que l’exécution de Juifs opprimés par Hitler (justifie) le soutien au régime qui occupe Jérusalem ?…”

Cette question d’Ahmadinejad est révélatrice : selon lui, l’Holocauste est le seul élément qui puisse justifier l’existence de l’Etat d’Israël. Elle implique deux choses : a) que l’Holocauste est un mythe et b) que même s’il avait vraiment eu lieu, il ne suffirait pas à justifier l’existence d’Israël. Dans les deux cas, l’obsession d’Ahmadinejad ne porte pas sur l’Holocauste, mais sur l’existence même d’Israël. Si nier la Shoah peut permettre de remettre en cause l’existence d’Israël, celle-ci doit être niée.

Dans le même discours, Ahmadinejad a aussi dit : “Si vous (Européens), estimez avoir commis une injustice à l’encontre des Juifs, pourquoi les musulmans et les Palestiniens devraient-ils en payer le prix ? D’accord, vous avez opprimé (les Juifs). Mettez donc une partie de l’Europe à la disposition du régime sioniste…” Encore une fois, la ligne directrice est le non droit d’Israël à l’existence. Nier l’Holocauste est important pour Ahmadinejad, vu que celui-ci confère une justification morale à la création et à l’existence de l’Etat d’Israël.

Dans le discours que vous avez vu plus tôt sur DVD, daté du 14 décembre 2005, Ahmadinejad a encore une fois lié ces deux éléments majeurs. Il qualifie de “mythe” la Shoah, mais cette fois ajoute : “Si vous (Européens) dites vrai quand vous affirmez avoir exterminé six millions de Juifs lors de la Deuxième guerre mondiale… Si vous avez commis un crime, il n’est que juste que vous placiez un morceau de votre terre à leur disposition – en Europe, en Amérique, au Canada ou en Alaska…” Une fois de plus, la négation de la Shoah représente avant tout pour Ahmadinejad un moyen de délégitimer l’existence d’Israël.

Le président iranien s’efforce ensuite de dépeindre les Juifs comme les véritables oppresseurs, plutôt que comme les victimes : “Le sionisme est lui-même une idéologie occidentale colonialiste (liée) à des idées laïques et à des méthodes fascistes -fondée par les Anglais. Jusqu’à aujourd’hui, avec l’aide directe de l’Amérique et d’une partie de l’Europe, (le sionisme) massacre les musulmans.” Il ajoute plus loin : “Voilà une question importante à laquelle doivent répondre les pays occidentaux et les médias : y a-t-il un crime commis par (l’Occident) à cette époque (la Deuxième guerre mondiale) que les sionistes ne commettent pas aujourd’hui ? Le sionisme est essentiellement un nouveau fascisme…”

Voilà donc la vision d’Ahmadinejad : les sionistes sont les véritables oppresseurs et assassins. Et s’il prétend parfois faire la différence entre sionistes et Juifs, le fait est que sa campagne de diabolisation use et abuse de préjugés antisémites utilisés à maintes reprises dans l’histoire pour décrire les Juifs (et pas seulement les sionistes) comme des oppresseurs et des meurtriers.

Comme vous venez de le voir sur le DVD, le véritable Holocauste, tel que décrit par Ahmadinejad, a été commis par les Juifs : par le roi juif du Yémen, Youssef Dhu Nuwas qui, prétend-il, brûlait les chrétiens aux premiers temps du christianisme, et par les Juifs iraniens, comme le décrirait le Livre d’Esther. En outre, les Juifs de l’époque moderne continueraient de se comporter comme des assassins, tuant de nombreux enfants chrétiens à Londres et à Paris – comme vous avez pu le voir de vos propres yeux, pour incorporer du sang au pain azyme consommé à Pessah.

En résumé, la négation de l’Holocauste est une donnée inextricable de la diabolisation visant à atteindre l’objectif final, qui est l’élimination d’Israël.

Ces trois éléments clés mentionnés plus haut ont une place importante dans l’identité et les travaux des personnes invitées par le régime iranien à la conférence de Téhéran sur la négation de la Shoah. Leur opposition explicite à l’existence d’Israël revête une importance de tout premier ordre. C’est pourquoi les membres de la secte juive anti-sioniste Neturei Karta ont aussi été invités. Le régime iranien maintient avec eux des liens puissants. Puis vient la diabolisation des Juifs visant à justifier le programme d’élimination. C’est ainsi qu’ont été invités de nombreux négationnistes, dont Frederick Toben, qui ne se contente pas de nier la Shoah, mais qui ajoute que les Juifs ont intentionnellement répandu le virus du SIDA aux Etats-Unis.

Le discours d’Ahmadinejad lors du colloque négationniste illustre pour le mieux le rôle que joue la négation de la Shoah dans l’idéologie et la stratégie du régime iranien. Il commence son discours en s’adressant aux négationnistes de la conférence : “Vous êtes chez vous en Iran. Ici vous pourrez librement exprimer vos opinions, d’une façon amicale et dans une atmosphère de liberté.” Puis il enchaîne sans transition : “La courbe de vie du régime sioniste est sur sa descente… Je vous le dis maintenant… Le régime sioniste sera éradiqué et l’humanité libérée.”

Voir des extraits vidéo : http://www.memritv.org/Search.asp?ACT=S5&P1=156.

mms://207.232.26.152/events/IRANHOLOCAUST.WMV

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