La ghettoïsation
A la création du nouvel état d’Israël en 1948, les dirigeants manifestèrent leur volonté de créer un état dont le caractère culturel et ethnique serait protégé. C’est dans cette perspective, et par manque de discernement entre les termes juif et hébreu (1), qu’ils définirent (maladroitement) l’état d’Israël naissant en tant qu’état « juif et démocratique ». Cet état se définit donc d’un côté en tant qu’état juif en ce qui concerne sa politique d’émigration (la fameuse loi du retour) et en tant que démocratique pour ce qui est de ses fondements politiques, juridiques et sociaux. Ce qui engendre des problèmes insolubles, entre autres quant à l’émergence d’un creuset commun à tous les citoyens de cet état, juifs comme non-juifs. Conscients de ce problème, les premiers dirigeants de l’état d’Israël pensèrent l’éluder en redéfinissant Israël comme un état plurinational.
Cette plurinationalité se traduisit par la reconnaissance de l’arabe en tant que langue officielle d’Israël exactement au même titre que l’hébreu, avec la création de programmes d’éducation distincts (en arabe ou en hébreu) réservés aux membres des différentes « nationalités ». Définie par les lois de l’état d’Israël comme partie intégrante de la « nation arabe », la population arabophone (2) fut donc poussée à s’identifier à un arabisme auquel ils ne voulaient pas forcément adhérer. Par refus de dépasser le cadre identitaire juif confondu avec celui de peuple hébreu, l’état d’Israël imposa donc à cette population l’adoption d’une identité nationale “arabe”.
Et c’est ainsi que le réveil de l’identité hébraïque originelle de cette population devint impossible. En Israël en effet, la ‘nationalité’ de chacun était mentionnée dans la carte d’identité. Mais il s’agissait d’un simple artifice sémantique. Car pour les juifs, celle-ci était qualifiée de ‘juive’, alors que pour les chrétiens et les musulmans, elle était nommée ‘arabe’. Or si l’état d’Israël était réellement plurinational, il aurait fallu employer pour tous les citoyens des termes homologues, soit empruntés au contexte religieux (juif, musulman, chrétien, druze, alaouite, bahaï, etc…), soit des appellations ethniques (hébreu, araméen, assyrien etc…) soit encore nationaux (israélien, ou arabe). En créant cet amalgame, l’état d’Israël empêcha désormais la naissance d’un creuset ethno-culturel commun sur lequel peut se développer une cohésion à l’ensemble de sa population.
Or la conjonction des dimensions ‘juive’ et ‘démocratique’ implique que l’état d’Israël se doit d’être peuplé en majorité de juifs s’il ne veut pas abandonner son caractère démocratique. En corollaire, les changements dans “l’équilibre démographique” entre juifs et non-juifs sont susceptibles de saper les fondements même de cet état. C’est cette singulière réalité qui poussa les différents dirigeants israéliens à toujours tenter de calquer les frontières selon cet équilibre démographique. Par la définition d’Israël en tant qu’état juif et démocratique, a été implicitement entérinée l’idée que les frontières du pays seraient fluctuantes, plastiques et dépendantes d’une “majorité juive”.
C’est la volonté de maintenir un caractère ‘juif et démocratique’ à l’état d’Israël qui a poussé les dirigeants du pays à ne jamais considérer la Judée et la Samarie comme des territoires libérés, mais plutôt comme “monnaie d’échange” en contrepartie d’un accord de paix. C’est aussi la raison pour laquelle les implantations, dans la bande de Gaza par exemple, ont toujours été regardées comme temporaires et conditionnelles. Leurs existences pouvaient être remises en question à n’importe quel moment, en fonction des circonstances démographiques, souvent camouflées sous des allégations de “contingences de sécurité” (3).
Car si Israël avait annexé les territoires libérés lors de la Guerre des Six Jours, il aurait fallu octroyer la citoyenneté israélienne à toute la population arabophone de ces régions, ce qui aurait d’un seul coup, par voie démocratique, transformé Israël en un pays arabe. C’est ce que craignaient les gouvernements israéliens. C’est pourquoi, depuis 1967, se sont succédés différents plans de retrait visant à intégrer à l’état d’Israël un maximum de territoires sans pour autant compromettre le fragile ‘équilibre démographique’.
Cette condition prime même à l’idée de faire de ces territoires libérés une monnaie d’échange. Dans l’impossibilité de signer des traités de paix avec les palestinistes, les dirigeants israéliens ont immédiatement opté pour le retrait unilatéral de ces terres, soit par abandon pur et simple de certaines régions, soit par la construction d’un mur de séparation, dont le tracé est destiné à devenir à terme la ligne de retrait d’Israël des territoires historiques du pays des hébreux.
Au delà des divers prétextes (4) , le mur est en réalité une manifestation d’un retrait unilatéral d’Israël des territoires libérés en 1967. Il est la muraille du ghetto dans lequel Israël se renferme pour conserver son caractère « juif et démocratique » (5) .
Le refus d’intégrer les territoires libérés en 1967 au nom de l’idéologie de l’état-ghetto eut aussi comme conséquence immédiate la création d’un statut à part de la population arabophone qui y vivait. Complètement exclue dès le début de la possibilité de devenir citoyens de l’état d’Israël, la population arabophone de Judée-Samarie devint la proie facile des palestinistes.
De par l’exigence de l’état-ghetto, les dirigeants israéliens ont promu la création d’un nouvel état, la “Palestine”, et ce afin de normaliser le statut de la population arabophone qu’Israël refusait d’intégrer dans l’état pour préserver son caractère « juif et démocratique ». Pour cacher cette réalité, les dirigeants israéliens ont trahi les pionniers de la Bande de Gaza, en les délégitimant et en les présentant aux yeux du peuple comme l’obstacle même à la paix, la source de tous les maux qui affectent le pays. Souvent alimentée par des agitateurs travaillant pour le compte de la police secrète israélienne, cette campagne de diffamation en vint progressivement à légitimer l’usage de la force afin de perpétrer une véritable épuration ethnique anti-hébreue! Tout en “renflouant” les pionniers hébreux dans les nouvelles frontières de l’état-ghetto, le gouvernement de Sharon a transféré encore une fois la légitimité de revendications politiques tels que le droit à l’auto- détermination aux seuls “palestiens” (6) .
La création de l’entité palestiniste, en dépit de son aspiration à dissoudre l’état d’Israël, se révèle ici comme une véritable exigence politique israélienne, née de l’impossibilité de créer un cadre « national » adéquat à la révolution hébraïque (7).
Israël a abandonné la vocation originelle du mouvement Hébreu de libération qui prônait la laïcisation et l’hébraïsation de tous les citoyens (sans exception!) du pays (8). Par cette trahison, les dirigeants israéliens ont confiné l’état d’Israël à un Vatican juif, travesti en état-nation, dans lequel il devint rigoureusement impossible de développer un creuset culturel commun à tous les habitants, juifs ou non-juifs. En effet, si les dirigeants peuvent à tout moment décider de se défaire d’une région pour maintenir le caractère « juif » du pays , cela implique que les populations non-juives ne peuvent plus se fondre dans le moule d’une « nation indivisible par principe », nation à laquelle elles ne sont rattachées que temporairement.
Ayant rapidement décelé ce talon d’Achille, les palestinistes ont adopté une stratégie de destruction d’Israël de l’intérieur, par submersion démographique.
Le cheval de Troie démographique
En Janvier 2006, le démographe post-sioniste Arnon Sopher a affirmé devant les médias israéliennes que la volte-face idéologique de Sharon était dû “au fait démographique”, c’est-à-dire à la crainte de “la perte d’une majorité juive par l’annexion de territoires palestiniens”. Il a ajouté avec fierté qu’il se flattait d’être l’instigateur de ce revirement après avoir démontré à Sharon qu’Israël allait perdre sa majorité juive en 2030.
Souvenons-nous aussi que 13 ans auparavant, le 13 Septembre 1993, Arafat, après sa célèbre poignée de main avec Rabin, avait déclaré dans une interview accordée à la deuxième chaîne israélienne :
« La matrice palestinienne est notre arme secrète » (9) .
L’idée était simple: puisque la loi israélienne tolère la polygamie uniquement chez les musulmans (qu’ils soient citoyens d’Israël ou des “territoires sous administration”), il suffit pour chaque musulman (de nationalité israélienne ou pas) de faire venir des femmes depuis les pays arabes limitrophes pour renverser en quelques décennies l’équilibre démographique. En outre, étant donné que toute femme mariée à un musulman doit, selon la Shari’a, se convertir à l’Islam (elle et même ses enfants d’un premier mariage!) et donc donner naissance à des enfants automatiquement musulmans, la poussée démographique devient exponentielle!
Pour perdurer en tant qu’état juif et démocratique, Israël a un besoin vital d’une “Alyah” (immigration) massive des juifs de la Diaspora. Or étant donné que cette conjecture n’est pas réaliste (10), Israël sera donc contraint d’abandonner progressivement non seulement la Judée-Samarie mais aussi la Galilée, la plaine du Sharon, le Néguev, pour se transformer progressivement en un petit ghetto centré sur Tel Aviv et sa proche banlieue.
Le post-sionisme
La motivation essentielle du courant post-sioniste est d’extirper toute revendication historique à l’état d’Israël, afin de le faire rentrer dans le moule des nations modernes, autant par son ethos, sa constitution, son identité que ses revendications territoriales. Les post-sionistes ne prônent pas la liquidation pure et simple de l’état d’Israël. Plus prosaïquement, et à l’image des nations ‘modernes’, ils réclament le “droit de la majorité” à déterminer l’identité officielle du pays. Mais comme ils revendiquent également le caractère « juif » de l’état d’Israël, les post-sionistes se montrent prêts à lâcher toute partie d’Israël dès que la population « non-juive » y devient majoritaire. C’est là l’apothéose de l’idéologie de l’état-ghetto. Pour accréditer leurs positions, et ruiner tous les fondements du sionisme originel, les post-sionistes se mobilisent pour occulter ou démentir toutes les évidences quant à l’existence historique du peuple Hébreu, le plus souvent sous couvert scientifique.
C’est avec un succès médiatique remarquable qu’ils oeuvrent également à falsifier l’histoire du réveil politique hébreu à l’époque moderne.
Puisque la ruine du sionisme, sous toutes ses formes, est regardée comme une condition à la “normalisation” de la situation au Proche Orient, il est compréhensible que les activistes impliqués dans ce processus, les tenants de l’idéologie post-sioniste en Israël, soient considérés comme une force motrice à encourager. Et c’est la raison pour laquelle ce camp post-sioniste bénéficie d’un appui international complètement disproportionné à sa taille, tant au niveau politique, financier, académique que médiatique.
Par le biais des post-sionistes, cette situation se traduit depuis quelques années par l’ingérence étrangère dans les ‘affaires intérieures’ d’Israël. Ce phénomène, amorcé lui aussi avec les accords d’Oslo, ne devrait que s’amplifier au fil du durcissement des positions palestinistes, et déchirer davantage la société israélienne qu’elle ne l’est aujourd’hui.
L’engagement de certains intellectuels israéliens, pudiquement désignés « post-sionistes », dans cette ghettoïsation ne s’arrête pas là. Ils délégitiment l’état d’Israël en inventant officiellement une autochtonie à tout ce qui n’était pas juif. Et en parallèle, ils cantonnent les “juifs” dans le carcan d’une dimension exclusivement religieuse, pour transférer des «droits nationaux aux palestiniens », et ce avant même que ces derniers n’aient eu le souci de les revendiquer.
Ils oeuvrent également à rafraîchir certains vieux mythes à des fins politiques. Par exemple, le mythe de l’âge d’or andalou, celui d’une tolérance religieuse et d’une liberté d’opinions durant l’occupation musulmane de l’Espagne, sert de caution historique à leur aspiration. Cette falsification est non seulement remise aujourd’hui en valeur, mais encore élargie puisqu’elle déborde sur des fables relatant une situation prétendument « idyllique » des communautés juives en terre d’Islam, du Maroc à l’Afghanistan. Un tel mythe ne se cultive pas uniquement dans les universités, sous forme de thèses de doctorat. Il commence depuis quelques années à se diffuser à grande échelle parmi les israéliens dont les parents sont originaires de pays arabes. Ces derniers convertissent en un fantasme de paradis perdu leur amertume vis-à-vis de la discrimination réelle dont furent souvent victimes leurs parents à leur venue en Israël.
Cette nostalgie du pays qu’ils laissaient derrière eux prend la dimension d’une amnésie collective. L’existence des juifs (et des chrétiens) était extrêmement précaire et tragique avant que les autorités coloniales françaises (Afrique du Nord, Syrie, Liban) ou britannique (Egypte, Irak, Iran) n’abolissent le statut de dhimmi dans ces pays. Ceux qui n’ont jamais bénéficié du protectorat des puissances coloniales européennes, tels les juifs du Yémen, sont bien là pour rappeler aujourd’hui ce qu’était un dhimmi, et la situation sordide à laquelle il se trouvait condamné.
Le mythe de la tolérance sous les auspices de l’Islam sert depuis quelques années de support à une branche israélienne du palestinisme : Haqeshet hamizrahit (littéralement : le croissant oriental). Ce mouvement constitué de juifs dont les ancêtres vivaient dans “l’Umma” islamique se revendiquent désormais non plus comme des israéliens, mais comme des arabes de religion juive, ou, plus succinctement, comme des « juifs arabes ». En tant que tels, ils expriment une adhésion non pas idéologique, mais bien identitaire avec le pan-arabisme. C’est pourquoi ils revendiquent eux aussi l’affiliation à une « nation palestinienne » (11) .
Arborant une telle idéologie, les militants du croissant oriental sont en voie de créer une réalité jusqu’alors inconnue. Avec son avènement, des hébreux rejettent la revendication la plus fondamentale de leur peuple pour réintégrer de leur plein gré le statut de dhimmi au nom d’un fantasme identitaire dont le palestinisme devient le cadre.
L’anti-sionisme
L’idéologie post-sioniste connaît également une branche radicale, les anti-sionistes, qui au nom d’une négation de l’existence même du peuple hébreu, en viennent à épouser pleinement la cause palestiniste. Cette branche fondamentaliste du post-sionisme, formée principalement d’universitaires, milite ouvertement en faveur d’une ‘grande Palestine’ édifiée sur les ruines de l’état d’Israël. Et son influence augmente progressivement parmi les post-sionistes au fur et à mesure que l’idée d’une coexistence pacifique de deux entités distinctes devient moins réaliste.
A terme, il est probable que le soutien dont les anti-sionistes bénéficient parmi l’intelligentsia occidentale devrait même lui permettre de prendre de vitesse les post-sionistes. C’est pourquoi les anti-sionistes sont désormais en passe de devenir les artisans de la dissolution politique d’Israël, jouant ainsi le rôle de fossoyeurs dans l’idéologie de la « Grande Tombe » (12) que les palestinistes ressortent déjà des oubliettes.
Mais les post- et anti-sionistes ne sont pas les seuls grands gagnants de l’affaire. Ils partagent ce privilège avec les juifs religieux orthodoxes, eux qui, depuis le début du 20e siècle, ont combattu le mouvement laïc hébreu de libération. Ces juifs religieux (tels les “Netourei-Qarta”, mais pas seulement eux), ont toujours considéré l’Islam comme une religion monothéiste pure et légitime, alors que le Christianisme était perçue comme une abomination idolâtre. C’est donc au nom de leur solidarité et leur allégeance au monothéisme, qu’ils aspirent à la destruction de cet état d’Israël “hérétique”. Ces juifs religieux fantasment sur une “Palestine” musulmane où ils pourront imposer, au nom du Sultan, la “Halakha” (le code religieux rabbinique) sur l’ensemble de la communauté juive re-dhimmitisée et re-ghettoïsée.
Tout comme les anti-sionistes laïcs intègrent progressivement dans leurs rangs les post-sionistes, ces anti-sionistes religieux servent désormais de pôle d’attraction privilégié pour les désabusés du sionisme national-religieux.
Ces derniers avaient interprété le réveil du peuple hébreu sur sa terre, l’indépendance du pays et la libération de la Judée-Samarie, uniquement sous un angle religieux messianique, l’étape indispensable au processus de rédemption d’Israël annoncé par les prophètes de la Bible. Dès lors, ils n’ont pu interpréter l’évacuation programmée de la Judée-Samarie, le cœur même de l’Israël historique, comme une « défaillance divine », mais comme leur propre erreur humaine de compréhension des « plans divins ». Cette remise en cause, cet effondrement de leurs valeurs pousse les sionistes religieux à un renversement de leurs croyances les plus fondamentales, pour rejoindre le camp des orthodoxes anti-sionistes.
Les arabophones non musulmans
Un exode massif de la population non-musulmane de Judée-Samarie s’observe depuis la signature des traités d’Oslo. Les chrétiens arabophones ont résisté tant bien que mal à 13 siècles d’occupation arabo-musulmane. Mais ils optent maintenant pour l’exil depuis que le monde occidental fait la politique de l’autruche devant la réapplication par le Hamas de la charia’. L’indépendance d’un état “palestinien” devrait porter ce processus à son paroxysme, en vidant quasiment complètement la région de sa population non-musulmane (qui était encore majoritaire au début du 20e siècle!) et en réimposant le statut de dhimmi à ceux qui, comme les samaritains, refusent catégoriquement de quitter le pays (13) .
La mainmise de l’idéologie islamiste sur la population arabophone ne fera que s’accroître avec la création d’un état palestinien en Judée-Samarie et dans la bande côtière de Gaza. Et c’est pourquoi la création d’un tel état exacerbera la volonté de rayer de la carte “l’entité sioniste” en l’islamisant et créant sur ses décombres “l’Ard Sham” coranique, qui engloberait “la Grande Palestine”, le Liban et la Syrie.
La fin d’Israël?
La signature des traités d’Oslo entre les dirigeants israéliens et les tenants d’une idéologie prônant la destruction d’Israël a porté au grand jour les contradictions et les dissensions internes de l’état d’Israël. En corollaire, il entérina chez les israéliens une apathie politique et un fatalisme face à une situation présentée comme inextricable. Cette faillite politique eut un double effet. D’un côté, elle poussa de nombreux israéliens vers des mouvements idéologiquement plus radicaux, et forcément plus cohérents, comme les mouvements post-sionistes et anti-sionistes. De l’autre, elle épuisa le traditionnel clivage travailliste-nationaliste (Avoda-Likoud) en le remplaçant par une nébuleuse politique, Kadima, dépourvue de toute idéologie.
La population arabophone d’Israël subira elle aussi les contrecoups d’une telle métamorphose. Devant un état d’Israël en voie de décomposition, cette population s’alignera progressivement à “la cause palestiniste”. Cette force montante, démographiquement parlant (14) , devrait renforcer considérablement l’impact de l’aile radicale du post-sionisme, comme de l’anti-sionisme. Certes, tous les arabophones en Israël ne se montrent pas favorables à une telle évolution. Mais « l’alignement » sera pour eux une question de survie face aux menaces des iihadistes islamiques.
Si rien de particulier n’entrave un tel engrenage, la fin est déjà scellée. Les exactions et les persécutions emporteront la plus grande partie de la population hébreue, sous l’œil impassible des instances internationales. Le sort des survivants ressemblera à celui des précédents massacres à grande échelle dont fut victime ce peuple durant les deux derniers millénaires. Une partie se coupera de ses racines historiques, regardées comme une véritable malédiction, et sera tentée de s’islamiser afin d’éviter le traitement “au fil de l’épée”.
L’autre choisira l’exil, pour se renfermer une fois de plus dans le ghetto religieux judaïque, jurant après un tel désastre de ne plus jamais tenter de « précipiter » le cours des événements. Ce mouvement communautaire dans son essence donnera probablement une nouvelle vitalité à ‘l’idéologie diasporique’ remise récemment au goût du jour (15) .
Les arabophones, de leur côté, occulteront à jamais leurs racines hébraïques qui pour eux aussi, ne furent qu’une source de malentendus et de malheurs durant tout le 20e siècle.
La ruine d’Israël signera alors la fin des rêves de renaissance d’un des plus vieux peuples de l’humanité, qui se refusa depuis des millénaires à disparaître sous le joug des conquérants. Et le peuple Hébreu dispersé atteindra ici un degré ultime d’aliénation, proportionnel à l’audace politique qu’il exprima, de façon si maladroite, durant tout le 20e siècle.
La solution hébraïque
Le slogan à la mode “deux peuples, deux états“, prôné par tous, est une duperie. La création d’une “Palestine” vivant en paix aux côtés “d’Israël” est une des plus subtiles usurpations que l’Histoire a réservé à l’Humanité (16).
Cette fiction n’est destinée qu’à conforter le public dans ses lénifiantes positions, à lui permettre de surfer sur une vague angélique malgré le Tsunami islamique qui gronde. En ignorant l’alternative hébraïque, l’état d’Israël a arrosé les graines du palestinisme. Il en est devenu le cauchemar du rêve Hébreu.
Il a brisé ses espoirs, détruit ses aspirations à refuser ce fatalisme historique imposant la soumission et la dissolution de son identité originelle dans des définitions importées et imposées par les conquérants. Il a sapé l’originalité de ses revendications les plus révolutionnaires: être un exemple vivant pour les peuples opprimés par l’arabo-islamisme. Il a travesti son besoin de crier vengeance à la face de ceux qui ont impunément envahi, opprimé et exterminé. Il s’est rabaissé au rang de république bananière, qui n’agit qu’au doigt et à l’œil de l’oncle Sam, en annihilant tout sens de dignité et toute volonté d’indépendance. Il a fait de ses habitants, soit des “colons sionistes” dans leur patrie historique, des “occupants” sur leur propre terre, soit des “palestiniens” revendiquant l’idéologie des bourreaux de leurs ancêtres.
Et le comble, il a bafoué la justification historique, les droits, la légitimité du mouvement Hébreu de libération, pour les transférer aux adeptes d’une des idéologies les plus rétrogrades, réactionnaires, criminelles, et dangereuses pour l’humanité, qu’il soit sur terre: Le pan- arabisme islamique.
Ce n’est pas “La paix maintenant” (et encore moins “Justice demain”) mais une ère de “Haine maintenant” qui va s’installer. Ce n’est pas le silence des canons mais celui des larmes qui règnera, pendant longtemps, pour le malheur de tous les habitants de cette terre.
Et la communauté internationale, pour l’instant toute heureuse de “régler” le conflit en faisant miroiter l’illusion “d’une paix juste et durable” alors qu’il est question d’une tragédie grecque, celle d’un seul peuple scindé en deux états-ghettos qui ne feront qu’exacerber le fanatisme islamique, sera responsable du sang qui coulera.
Peut-on enrayer un tel processus ? Aucune solution miracle ne peut être invoquée ici. Mais les périodes de crise sont également les seules phases de l’Histoire où un peuple est susceptible de prendre son destin en main. Il se pourrait bien que la situation de déliquescence générale de l’état d’Israël suscite un retour aux valeurs prônées par le mouvement Hébreu de libération, elles qui furent continuellement étouffées, déformées et trahies durant tout le 20e siècle.
L’avortement de la Palestine doit donc passer par la laïcisation d’Israël. Et sa déjudaïsation est la condition sine qua non à l’éradication de l’idéologie islamiste.
Il faut donc prôner un “voyage à travers le temps”, le retour à la situation d’avant la ghettoïsation d’Israël et avant qu’il ne tombe dans les pièges initiaux et fatals dans lesquels il s’est fourvoyé lui-même. Lorsqu’il n’y avait sur cette terre que des gens à la venue d’une idéologie hébraïque, laïque et libératrice.
Ce ne sera que par un long apprentissage à la laïcité parmi les “palestiens” (comme parmi les israéliens), par une démystification et démythification de leur histoire, qu’ils seront à même de recouvrer leurs origines et leur véritable identité: des hébreux qui ont été arabo-islamisés par l’épée.
Mais cette révolution des esprits, cette prise de conscience ne pourra se réaliser sans l’aide, le soutien, et l’engagement d’intellectuels et de gens de bonne volonté, de par le monde.
Afin que ce processus se déclenche des deux côtés de la muraille de Sharon (devenue un nouveau “Mur des lamentations”), il n’y a d’autre solution que de passer par le stade du ‘trou noir’ et de la politique de la terre brûlée.
« Il faut regarder le néant en face pour savoir en triompher », écrivait Louis Aragon. Ce n’est qu’une fois sonné le glas sur le fantasme et le paradoxe de l’état d’Israël en tant qu’état juif et démocratique , qu’il sera possible de passer au stade de la résistance, de l’insurrection populaire, de la lutte révolutionnaire et, s’il le faut, de la guérilla jusqu’à la jusqu’à la dislocation de cette “Palestine” artificielle et artificieuse, devenue fer de lance du pan-arabisme islamique, en vue de la libération et la reconstruction d’un état d’Israël véritablement hébreu.
Cette terre (qui n’est pas plus sainte que d’autres, n’en déplaisent aux monothéistes de tous poils) ne doit pas être divisée mais au contraire réunifiée afin d’empêcher son islamisation et y permettre un avenir de paix et de justice. L’état d’Israël doit simplement redevenir la patrie de tous ses habitants. Mais cette fois-ci sur une base ancienne- nouvelle:
Un pays pour un seul peuple: le peuple hébreu.
Notes
(1) Alors que “hébreu” est une définition ethnique, le terme “juif” est flou et peut signifier uniquement une appartenance religieuse. Ainsi tous les hébreux ne sont pas, historiquement parlant, des juifs, et tous les juifs (par exemple les convertis au Judaïsme) ne sont pas des hébreux.
(2) Arabophone et non arabe car ethniquement parlant les composantes de cette population sont, en grande partie, des descendants d’hébreux restés sur place après l’occupation romaine, byzantine et arabe.
(3) La « muraille de Sharon » est présentée comme une protection contre le terrorisme. Mais les dirigeants israéliens savent eux-mêmes que ce n’est qu’un leurre.
(4) Les dirigeants israéliens ne peuvent s’appuyer sur aucune perspective de paix pour justifier le retrait unilatéral, voir la recrudescence des obus Kassam sur la ville de Sderoth.
(5) Par ailleurs, la construction du mur est entendue de par le monde comme un aveu de culpabilité d’Israël.
(6) Palestiens et non “palestiniens” tels qu’ils sont appelés de façon erronée. Voir “Pour en finir avec l’usage du terme Palestine“.
(7) Ce paradoxe a sonné le glas à toute cohésion dans la société israélienne.
(8) Les chiffres sont souvent le résultat de manipulations idéologiques camouflées en “objectivité statistique”. Par exemple, Arnon Sofer ajoute au chiffre de la population “non-juive”, 300 000 immigrés de Russie dont le père est juif et la mère chrétienne. Voici comment le post-sionisme laïc rejoint soudain la position du Judaïsme orthodoxe et anti-sioniste des Netourei-Karta sur la question “Qui est juif?”. L’autorité palestinienne, quant à elle, prend également soin de « gonfler » les effectifs de la population arabophone musulmane en comptant deux fois la population de Jérusalem-est (en tant qu’israélienne et palestinienne), et en ne retirant pas les défunts des registres et des listes électorales. Voir l’étude critique de Ezrah Zohar, Le problème démographique”- Craintes et réalités, Mars 2005, Nativ, p. 34-43.
(9) Ce qui a encore amplifié la psychose démographique des israéliens.
(10) Le “réservoir” diasporique s’égrène comme une peau de chagrin. On assiste plutôt à un mouvement contraire de “Yeridah” (émigration du pays): plus de 1 million d’Israéliens vivent dans l’exil doré de l’oncle Sam!
(11) Ce repositionnement au sein de l’Umma arabe est rigoureusement le même que celui revendiqué par nombre d’arabes chrétiens en Israël.
(12) La thèse islamiste supposant que Allah a laissé l’état d’Israël se créer, en rassemblant et concentrant tous les juifs du monde entier dans un même pays, afin que les musulmans puissent les exterminer plus facilement et d’un coup!
(13) Quant aux hébréophones qui rechigneront à abandonner leur terre, leur sort est déjà scellé. Les mouvements islamistes (tout comme le Fatah de Mahmoud Abbas d’ailleurs), jurent de les exterminer jusqu’au dernier.
(14) La population arabophone dans les frontières de l’état d’Israël d’avant 1967 était estimée en 2005 à 1 300 000 âmes, répartie comme suit: 850 000 musulmans, 325 000 chrétiens, et 125 000 druzes. La population hébréophone (“juive” en très large majorité) était, dans la même année, évaluée à 5 300 000 âmes .
(15) Dans son ouvrage, Etre un peuple en diaspora (Maspéro. Paris. 1977), Richard Marienstras oppose Exil et Diaspora, terme dans lequel il conçoit l’existence d’un peuple juif (soit encore l’ensemble des communautés juives) ayant un centre politique en Israël.
(16) Khadafi a proposé récemment une “confédération”, l’hydre à deux têtes nommé «Israstine » (et pourquoi pas « Palesraël »?!), qui fait dernièrement des adeptes. Ce clown ne finit pas de se payer notre tête!
Une réflexion sur « Vers l’islamisation d’Israël? (up to date : ajout de notes) »