“Je ne voterai pas pour ‘lui’”, me dit un “beurgeois” un peu moins fâché que les autres. “Mais tu peux écrire ce que tu veux, tu ne me feras jamais voter pour ‘elle’ ou pour quelqu’un de son parti.” Voilà qui est plus intéressant. La seconde allusion, vous l’aurez compris, concerne Ségolène Royal et, plus encore, le Parti socialiste. Car il existe entre les communautés maghrébines de France et les socialistes un différend bien plus profond qu’on ne le croit, et la rancœur ou la colère, car c’est bien de cela qu’il s’agit, refont toujours surface au moment d’un scrutin.
La colère contre des socialistes qui ont instrumentalisé la question des discriminations pour faire monter le Front national et saper l’influence de la droite classique. La colère contre des socialistes qui n’ont pas été capables de faire élire un seul Beur ou un seul Noir à l’Assemblée nationale. La colère contre les socialistes qui, lorsque viennent les batailles électorales, n’ont aucune vergogne à organiser le parachutage de candidats pistonnés dans des circonscriptions où, pourtant, des militants locaux appartenant aux minorités visibles auraient leurs chances. La colère aussi chez de nombreux “beurgeois” qui ne supportent pas le recours paternaliste du PS à l’association “couscous-merguez-makrouds-cornes-de-gazelle-thé-à-la-menthe”, alibi idéal pour vanter la tolérance et le vivre-ensemble, mais à condition que cela se passe là-bas, dans les cités, loin des salons où se préparent les carrières politiques et où s’offrent les investitures.
Le PS et le folklore associatif beur, une longue et triste histoire…
Durant des années, aux Beurs et aux Blacks impatients de se lancer en politique, le PS a dit et répété : “Ce n’est pas le moment, la France n’est pas prête.” Résultat, c’est un gouvernement de droite qui, le premier, a nommé en son sein des enfants d’immigrés maghrébins.
Bien plus que la campagne présidentielle, celle des législatives va être riche d’enseignements. Je serai très attentif à la présence de minorités visibles dans les listes de candidats, ainsi qu’à la circonscription où ils seront présentés. Car envoyer un Black ou un Beur au casse-pipe dans un scrutin perdu d’avance est aussi une manière pour les états-majors politiques de se dédouaner à bon compte.