Dieudonné est en fait admiratif dans la façon dont Le Pen a réussi à se construire une aura par l'insulte et le mensonge. Dieudonné fait de même. En pis. Je l'avais rencontré lors de la dernière campagne présidentielle sur une péniche affrétée par Brice Lalonde pour une conférence de presse (j' étais membre à l'époque du bureau exécutif de Génération Ecologie) ; Dieudonné venait en "voisin", cherchant sans doute du côté de Lalonde (qu'il ne savait sans doute pas partisan d'une écologie libérale…) quelque soutien. Il n'était pas encore ce Le Pen puissance dix cherchant la petite phrase qui blesse pour avoir la une des caniveaux. Il a donc emboîté le pas de son "mentor" et va plus loin encore en embrassant l'islam du Hamas, (mais aussi celui du Quai…) en proposant un Etat "unique, multiconfessionnel, dans lequel juifs, musulmans et chrétiens vivront en paix avec leurs voisins" dit-il dans son communiqué, ce qui on le voit rejoint mot pour mot l'idéal négationniste du président islamique perse.
Quant à son fond de commerce, la traite négrière, il s'avère que sur RMC, il a non seulement répondu blanc lorsque l'on l'interrogeait sur noir (la Shoah est-elle un mythe ?), mais il a d'une part mis sur le même plan une pratique esclavagiste (mise en oeuvre aussi par l'islam, mais de cela il n'en dit pas un mot) et d'autre part un génocide qui implique une préméditation à tuer et de façon précise, tout en se servant également du travail jusqu'à épuisement comme outil du meurtre, alors que dans le cas de la traite le but n'était pas la mort de l'esclave, même si celle-ci était en effet quantité négligeable. Sauf que Dieudonné s'empare de cette "part de vrai" (comme le disait Raymond Aron à propos du communisme) pour s'en servir de levier et de lévrier en vue non pas de faire réfléchir sur les pesanteurs d'une société française recroquevillée dans ses ressentiments à défaut d'avoir un Etat à même d'en secouer la torpeur, mais Dieudonné parle en vue de semer la haine en puisant dans le vieux fond antisémite français, agitant par exemple la notion de "banquier juif" qui aurait financé à Bordeaux la traite, alors que même Voltaire avait des actions dans ce genre de "commerce", ce qui montre bien qu'au lieu de voir dans le juif un être humain comme les autres Dieudonné va y voir le grippe-sou, insufflant ainsi ce vieux relent bien connu que l'on croyait être seulement l'apanage de l'extrême droite et de l'extrême gauche stalinienne.
Et Dieudonné surfe là-dessus et à coeur joie, voyant dans la seule traite la cause de tous les maux, au lieu de s'en prendre plutôt à l'Etat jacobin qui non seulement rétablit la traite mais organise de telle sorte sa bureaucratie qu'il oblige un Breton, un Corse, et a fortiori un Martiniquais à être affecté à ses débuts à l'extérieur de sa contrée. Ou encore saura-t-on dans la prose si brillante et si savante de Dieudonné que l'Administration préférera maintenir les populations autochtones dans l'ignorance ou dans l'idée qu'elle se fait d'elles (par exemple en Afrique du Nord cataloguée de territoire "arabe" par cette "puissance musulmane" que voulait être la France…) ? De tout cela évidemment nous n'en saurons rien.
Dieu(ne lui a rien) donné a-t-il de l'avenir ? Il est certes devenu tout à la fois un compagnon de route précieux de l'alterislamisme (même si son antisémitisme camouflé en antisionisme gêne encore…mais pour combien de temps ?…) et un excitant pour le national-intégrisme façon GOLLNISCH dont il partage en fait le négationnisme, faisant même de la surenchère afin de prouver qu'il peut laver plus blanc encore. Cette gadoue peut-elle servir pour lui façonner cette statue à la Bokassa II ou à la Mobutu III qu'il forge peu à peu ?
It's too close to call ( il est encore tôt pour le dire).
31 janvier 2006