1 juin 2023

Le dieu des musulmans n’est pas le même

Or, il n’y a pas de soumission chez ces deux formes de croyance.

Donnons trois exemples, Adam, Moïse, Jésus.

Adam :

Voilà comment le présente le Coran : Sourate II, verset 31 (traduction Masson, Folio/Gallimard ) :

« Il apprit à Adam le nom de tous les êtres, (…) ».

Dieu apprend à Adam qui tient donc là un rôle passif.

Dans la Bible, il est dit ceci (traduction d’Ostervald (1890), chapitre II, verset 19 :

« (…) l’Éternel Dieu avait formé de la terre toutes les bêtes des champs et tous les oiseaux des cieux ; puis il les avait fait venir vers Adam, afin qu’il vît comment il les nommerait, et que le nom qu’Adam donnerait à tout animal vivant, fût son nom ».

Ainsi, c’est Adam qui nomme, il donne un nom, il a un rôle actif.

Idem, dans la traduction de la Bible, établie sous la direction de l’École biblique de Jérusalem (Les éditions du Cerf, 1998) il est dit (p. 35), chapitre 2, verset 19 :

« Yahvé Dieu modela encore du sol toutes les bêtes sauvages et tous les oiseaux du ciel, et il les amena à l’homme pour voir comment celui-ci les appellerait : chacun devait porter le nom que l’homme lui aurait donné ».

Le Coran ne parle pas de rôle actif d’Adam. Il fait état plutôt de son instruction et ensuite d’un dialogue entre Dieu et les anges puis celui-ci demande à Adam de dire à ceux-là les noms des êtres qu’il lui avait appris. Adam obtempère :

« Il apprit à Adam le nom de tous les êtres, puis il les présenta aux anges en disant : « faites-moi connaître leurs noms, si vous êtes véridiques ».
(II/32): Ils dirent : « Gloire à toi ! Nous ne avons rien en dehors de ce que tu nous as enseigné ; tu es, en vérité, celui qui sait tout, le Sage ».
(II/33): Il dit « O Adam ! Fais-le leur connaître les noms de ces êtres ! »
Quand Adam en eut instruit les anges, le Seigneur dit : « Ne vous ai-je pas avertis ? Je connais le mystère des cieux et de la terre ; je connais ce que vous montrez et ce que vous tenez secret » » .

Dans le Coran, Adam transmet les noms appris, alors que dans la Bible non seulement Adam les nomme, mais Dieu veille à ce que cela soit avec ses propres termes.
Pourtant Masson, dans sa note 1 au mot «être» du verset coranique (II/31) « Il apprit à Adam le nom de tous les êtres », se méprend totalement en y accolant une interprétation issue du texte biblique ! Ainsi Masson écrit :

« Ceci constitue une nouvelle affirmation du pouvoir de l’homme sur la création. On lit dans la Genèse (II,20) : « L’homme appela…de leurs noms tous les bestiaux, les oiseaux des cieux, tous les animaux des champs » Cf. Jean Chrysostome, Homelia IX in Genesim, II, 19, P. G. LIII, 79 ; Philon, op.cit., N)148, p. 241 ».

Or, le texte du Coran n’affirme en rien le «pouvoir de l’homme sur la création » mais plutôt sa capacité à apprendre le nom de tous les êtres, ce qui est tout à fait différent. Par ailleurs, Masson s’appuie sur le verset 20 (tout en citant, curieusement, sans en donner le contenu, le verset 19 via une référence à Chrysostome), alors que le verset 19 précise bien, lui, le rôle actif d’Adam. On ne comprend pas le verset 20 sans celui qui le précède.

Ainsi dans la traduction d’Ostervald il est dit pour le verset 20 :

« Et Adam donna les noms à tous les animaux domestiques, et aux oiseaux des cieux, et à toutes les bêtes des champs ; (…) »

Adam donne les noms, à lui, et non pas ceux que lui auraient indiqué Dieu.
Masson mélange donc tout tant il subit l’influence de ce qu’il traduit, affirmant le pouvoir de l’homme tout en citant un verset qui n’est pas compréhensible sans celui qui le précède puisque l’on pourrait penser que Adam donne des noms que lui auraient enseigné Dieu comme avance le Coran, alors que le verset 19 dit bien que c’est Adam et lui seul qui donne les noms.
La traduction de la Bible, établie sous la direction de l’École biblique de Jérusalem, ne diffère guère de celle d’ Ostervald pour le verset 20.
D’ailleurs, le plus intéressant dans ce verset 20 réside moins dans sa continuation du verset 19 que dans le fait qu’Adam s’aperçoit de sa solitude parmi les animaux . Ainsi dans l’édition du Cerf il est dit :

« L’homme donna des noms à tous les bestiaux, aux oiseaux du ciel et à toutes les bêtes sauvages, mais, pour un homme, il ne trouva pas l’aide qui lui fut assortie ».

Dans les versets 21 et 22, il est exaucé, puisque la femme se voit créer. Rien de tel dans le Coran. Rien qui souligne la nécessité de
la femme pour l’homme, chair de sa chair.

Moïse.

Dans l’Exode, le Décalogue, (XX), des paroles fondamentales sont prononcées puisqu’ils s’agit des Commandements. Or, nul trace de ceux-ci dans le Coran puisque le nom de Moïse apparaît pour la première fois dans le verset 51 de la sourate II pour tout autre chose, les quarante nuits (Exode, XXIV, 18) dont l’importance est d’une toute autre nature puisqu’il y est plutôt question de Liturgie et non de Morale pour la direction de l’esprit et du corps.

Et Abraham ? Dans la Bible, il vient avant Moïse (Genèse, 12), rien de tel dans le Coran, puisque Moïse y apparaît le premier et bien après le Décalogue (Ex, XX). La Sourate de La Vache n’est donc pas une chronologie. puisque au verset 62 il est question des chrétiens (également au verset 113) alors qu’ils apparaissent bien après dans l’Histoire.
Abraham vient au verset 124 pour recevoir certains «ordres », ce qui est bien vague alors que dans la Bible (Genèse,12,1) il lui est indiqué précisément qu’il va aller vers «le pays que je t’indiquerai ».

Au verset 125 de la Sourate II, il est question d’Ismaël auquel il serait confié une mission, sans plus de précision. Dans la Genèse, 16, 12, la mission d’Ismaël est très clairement définie :

«Celui-là sera un onagre d’homme, sa main contre tous, la main de tous contre lui, il s’établira à la face de tous ses frères».

Puis en 17,19, alors qu’Abraham pensait que Dieu lui parlait d’Ismaël, Dieu lui annonce la venue d’Isaac, pour lequel il dit:

« et j’établirai mon alliance avec lui, comme une alliance perpétuelle (…) ».

En 20, Dieu ne néglige pas Ismaël puisqu’il promet qu’il engendrera 12 princes et qu’il fera de lui une grande nation, mais Dieu persiste en 21 en disant que c’est avec Isaac qu’il établira l’alliance. Ismaël est circoncis le premier (17,23) parce qu’Isaac n’est pas encore né. Rien de tel dans la Sourate II, le choix d’Isaac par Dieu n’est pas inscrit. Pas plus que la demande de son sacrifice (Genèse, 22, 1). Il faut attendre le verset 133 pour qu’Isaac soit écrit en même temps que les noms d’Abraham, d’Ismaël, et le verset 136 ajoute ceux de Jacob, de Moïse et de Jésus…alors que Jésus vient bien après dans l’Histoire Commune.

Conclusion ? Il ne s’agit pas de la même Histoire. Donc il ne s’agit pas du même Dieu. Ce sont les mêmes noms, certes, mais pas du tout la même trame. La Bible relate un Commencement et l’arrivée de l’Homme capable de nommer les choses. Rien de tel dans le Coran. L’homme n’est que soumis, instrument. Certes Abraham obéit lorsqu’il s’agit de sacrifier Isaac. Mais il ne le dit pas à l’enfant. Pourquoi ? Sans doute parce qu’il avait choisi d’obéir.

Si ce n’est pas la même Histoire, ce n’est pas le même Dieu.

Jésus.

Ainsi, il est dit dans l’islam que Jésus Christ n’est qu’un prophète, (sourate IV, verset 171), or cela n’est pas exact selon les Évangiles.

Observons cette question plus en détail en commençant par une lecture de la parole chrétienne.

Dans les Évangiles, il semble bien que Jésus soit Fils de Dieu (Matthieu. Chapitre III, Verset 17), non pas comme étant autre chose que Dieu mais moment singulier (Mt. IV, 7) : lorsque celui-ci devient la Direction (Mt. XXIII, 10).
Car Dieu vient apporter la Bonne Nouvelle (Mt. IV, 23) de manière visible, terrestre. Il se fait donc Fils, c’est-à-dire Homme, mais pas n’importe lequel, car il s’agit de vivre grâce à l'action du Saint-Esprit (Mt. I, 18). C’est-à-dire de vivre dans la Vérité, celle du Souffle de Vie qui a permis que Dieu devienne aussi Chair.

Quelle est cette Bonne Nouvelle ? Le Royaume des Cieux est accessible dès maintenant pour celui qui sait voir (Mt.V, 8).
Le péché Originel est pardonné : Dieu veut oublier la désobéissance d'Adam et Ève. Et Dieu ne veut pas que l'on fasse semblant de croire en Lui si cela ne se voit pas au plus profond des pensées, dans leur intimité même (MT. V, 28). Il ne suffit pas de respecter les Lois pour être l’Élu. Il faut se développer dans l'horizon de sa Grâce, c’est-à-dire en son sein même : c'est l'action du Saint-Esprit ce souffle de vie.
Voilà pourquoi Dieu est à la fois Un et se transsubtantialise en trois Personnes. Comment est-ce possible ? C’est ce que nous allons voir.

Lorsque Dieu est Commencement (et Fin) c'est le Père.
Lorsque Dieu est Direction fait Chair pour apporter la Bonne Nouvelle, et aussi comment vivre avec elle, c'est le Fils, c’est l’Homme, c’est Jésus.
Lorsque Dieu est Souffle de Vie, Providence, Grâce, afin que l'Humain (se) développe dans la Vérité, et en bonne intelligence avec la Nature, c’est l'Esprit Saint.

Dieu est certes unique, mais comme il est tout puissant, il peut se mettre en forme selon ce qu’il faut faire lorsqu’il s’agit d’intervenir sur Terre de façon visible.

Augustin dit par exemple dans La Trinité en commentant Jean: de lui (le Père ), par lui ( le Fils ) en lui ( le Saint Esprit) :

"Je vous demande de qui parle l’Apôtre dans cet autre passage: "De lui, par lui et en lui sont toutes choses. A lui la gloire dans les siècles. Amen" (Rom., XI, 36) ? S’il parle du Père, du Fils, du Saint-Esprit, en désignant chacune des Personnes par chacun des mots : "de lui" du Père ; "par lui" par le Fils ; "en lui" en l’Esprit Saint, il est évident pourtant que le Père, le Fils, le Saint-Esprit sont un seul Dieu, puisqu’il conclut : "A lui la gloire dans les siècles des siècles".

Au début de ce passage il ne dit pas : "O profondeur de la sagesse et de la science du Père" ni "du Fils" ni "du Saint-esprit", mais "ô profondeur de la sagesse et de la science de Dieu! Que ses jugements sont insondables et ses voies impénétrables, car qui donc a connu la pensée du Seigneur ou a été son conseiller ? ou qui lui a donné le premier pour qu’il ait à recevoir en retour ? De lui, par lui, en lui sont toutes choses…A lui la gloire dans les siècles des siècles. Amen" (Rom., XI, 33-36)".

Qu’en conclure ? Déjà que Jésus n’est pas musulman, contrairement à ce qui est répandu par certains arabo-islamistes, tentant de créer un Évangile musulman (Khalidi Tarif, Un musulman nommé Jésus, 2001,Traduction, Albin Michel, 2003), qui serait en définitive le seul habilité à parler de Jésus…
Ensuite ceci : si islam veut dire entière soumission à Dieu (ou le devenir musulman) alors l’humain n’est pas libre comme étant distinct de Dieu.
Car être soumis veut dire obéir, et à la lettre, celle du Coran, dit incréé et inamovible, or, dès la Genèse, lorsque Ève tend le Fruit de la Connaissance du Bien et du Mal, à Adam, et que celui-ci décide de l’accepter, et que Dieu ne les tue pas mais les chasse, il les rend libre, y compris jusqu’à désobéir.
Par la suite, Dieu, sous la forme de Christ (pour les chrétiens) vient pardonner ce geste en affirmant une nouvelle alliance entre les Humains et Dieu. Ce qui implique la possibilité de faire évoluer la Lettre, tout en se maintenant dans l’Esprit.
Il y a bien là une différence, et de taille.
Ce qui implique de se demander une chose sans avoir besoin de se demander pourquoi le Coran réécrit, systématiquement, la Bible et le Nouveau Testament, tout en prétendant que ce sont les Juifs et les Chrétiens qui auraient falsifiés leur propre livre !!!

S’agit-il du même Dieu ?

Ne serait-il pas possible, qu’en fait, les musulmans, prient un autre Dieu ? Ils pensent, certes, être celui d’Adam, par exemple, alors que ce n’est pas vrai, nous venons de le voir avec la Genèse.
Certes, les musulmans peuvent expliquer que tout ce qui est inscrit dans le Coran est Dieu, sauf que, en réalité, ce n’est pas le même Dieu.

Cet exemple montre bien qu’il ne suffit pas de dire que les Juifs, les Chrétiens, auraient"falsifié" puisque le problème n’est pas là, mais bien dans la suppression de la liberté offert par Dieu à l’homme.

Si ce qui importe consiste à respecter la Tradition alors celle-ci explique bien qu'il ne s'agit pas, en retour, de se soumettre, mais de s'offrir, ce qui implique qu'il existe la Loi de Dieu. Mais aussi, depuis Adam, la Loi de l'Homme. Libre.

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