Il y a dans le journalisme un idéal que la majorité de ses praticiens ont oublié aujourd’hui — celui qui veut que l’information, la vérité la plus objective possible, extirpée de la réalité des faits, prélevée au plus proche de l’événement, va permettre, en se répandant dans le public le plus large possible, de rétablir un équilibre, de restaurer un minimum de raison, de sauver ce qui peut l’être, de mieux guider, aussi, les initiatives de ceux dont les décisions peuvent faire la différence entre l’enfer et la vie.
En francophonie, peu de gens connaissent Anna Stepanovna Politkovskaya (bio). Cette journaliste russe a été assassinée en 2006 à Moscou, et beaucoup de choses indiquent qu’elle l’avait, elle, cet idéal. Voici quelques pistes:
Elle a reçu les distinctions suivantes pour son travail:
- First Prize of the Lettre Ulysses Award (2003)
– Hermann-Kesten Medal, PEN Germany (2003)
– Courage in Journalism Award from
the International Women’s Media Foundation (2002)
– Most Courageous Defence of Free Expression
from Index on Censorship (2002)
– Special Award of Amnesty International (2001)
Brève annonçant sa mort:
Une journaliste russe tuée à Moscou
2006-10-07
Traduit du polonais par Irena Elster
La célèbre journaliste russe Anna Politkovskaya connue par ses écrits critiques envers les autorités au sujet de la guerre en Tchétchénie, vient d’être tuée au centre de Moscou. Elle avait 48 ans. La milice recherche l’assassin tandis que la préfecture a entamé les poursuites en justice. Grâce à une caméra de rue et aux témoignages des voisins on a pu créer un premier portrait-robot de l’assassin. «Nowiaja Gazeta» journal dans lequel Politkowska publiait ses articles a affirmé qu’il mènerait sa propre enquête.
Un premier article paru en Pologne après sa mort :
Politkovskaya était la conscience du journalisme russe
2006-10-07 Swiat Gazeta
Par Marcin Wojciechowski
La nouvelle de l’assassinat d’Anna Politkovskaya affaiblit la foi dans la lutte de la vérité et du bien contre le mensonge et le mal.
Je la connaissais bien. Quand j’étais correspondant de «Gazeta Wyborcza» à Moscou, nous nous rencontrions souvent. Chacun de ses textes de «Nowa Gazeta» (Le Nouveau Journal) était intéressant. Elle écrivait surtout sur la Tchétchénie, dont 10 ans auparavant, elle n’avait encore aucune idée. C’est par hasard qu’elle a été envoyée en tant que reporter de guerre. Elle traitait cela non pas comme un échiquier stratégique, une chronique de joutes et d’escarmouches, mais comme un drame d’hommes ordinaires indépendamment de leur nationalité et de leur sympathie pour une des parties du conflit. Une approche humaine ainsi qu’une honnêteté sans limites étaient la force de ses reportages.
Les dernières années elle accompagnait les hommes touchés par la guerre en Tchétchénie. Quoiqu’il y ait eu d’autres cas semblables dans l’histoire du journalisme, je ne connais personne qui y ait consacré autant de passion.
Pendant quelques années elle accompagnait les gens touchés par la guerre en Tchétchénie. Bien qu’il y ait eu pas mal de situations semblables dans l’histoire du journalisme, je ne connais pas une personne qui l’ait fait avec autant de passion. Quant à la Tchétchénie et le Caucase, Politkovskaïa était devenue l’être-institution. On s’adressait à elle pas seulement pour avoir son opinion mais surtout pour recevoir de l’aide. C’est à elle que l’on transmettait des informations précieuses car on savait que non seulement elle n’allait pas trahir mais qu’en plus elle allait en faire un usage adéquat. C’est pourquoi non seulement des Tchétchènes lui faisaient confiance mais aussi des soldats russes qui voulaient partager la vérité avec le monde.
[…]
Extrait traduit du polonais par Irena Elster
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